La tricherie comme mode de gouvernance

Cameroun : La tricherie comme mode de gouvernanceLa bombe a été lâchée le 20 mars dernier. A l’issue d’une session de plein droit du Conseil électoral, des 40 listes de candidats présentées par huit partis politiques, 23 ont été rejetées, parce que ne remplissant pas les conditions requises par la loi. A lui seul, le Rdpc enregistre quatre listes mises hors-jeu dans quatre régions. Dans la région de l’Adamaoua, les raisons avancées par une notification formelle faite par Elecam souligne la non production «d’attestation d’inscription sur la liste électorale par le candidat suppléant Ngoa Jacques», contrairement à ce que prévoit l’article 165 du code électoral.

A l’Extrême-Nord, c’est Mourad Fayçal qui est accusé de ne pas être Camerounais, au vu de ses pièces d’identité. Si ces deux cas peuvent être pris pour de la distraction, c’est dans la région de l’ouest que l’on s’interroge sur les fins visées par les mis en cause. Selon Elecam en effet, la candidate Akwalefo Bernadette Djeudo s’est fait délivrer son by Text-Enhance">bulletin N°3 du casier judiciaire à la Police en lieu et place de la Justice. Ceci en violation flagrante des articles 580 et 581 du code de procédure pénale. De même, Elecam estime que la déclaration de candidature en trois exemplaires du candidat suppléant Gonso Fotsin Joseph n’a pas été légalisée, comme le prescrit l’article 164 du code pénal.

La pilule a du mal à passer. Quelques plus tard, rebelote ! Une seconde bombe est servie. Après avoir inscrit le nom d'un maire Sdf de la ville de Bafoussam dans ses listes à l'occasion de son dernier congrès ordinaire, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc, au pouvoir) a enrôlé, à l'occasion de la campagne électorale en vue des sénatoriales, le maire Undp de Maga. C’est en effet dans la décision signée le 31 mars dernier portant désignations des membres des commissions régionales, départementales et communales que le secrétaire général du comité central du Rdpc, Jean Nkueté, désigne Zigla Wandi, président de la commission communale de campagne du Rdpc dans cet arrondissement situé dans le département du Mayo- Danay, région de  l'Extrême-Nord.

Alors que du côté du Rdpc, on parle de méprise, dans l’opinion, on a de plus en plus de mal à y croire et penche plutôt pour une énième manoeuvre du parti au pouvoir réputé pour ses incorrections. Un avis d’autant plus partagé que l’on sait que le Rdpc compte en son sein la majeur partie de l’élite nationale qui ne peut donc pas prétendre ignorer que l’établissement d’un extrait de casier judiciaire, par exemple, se délivre dans un tribunal et non dans un commissariat et que, dans le cas contraire, on risque bien de se faire poursuivre pour faux et usage de faux. Malheureusement, il ne faut guère espérer de sanction. De la même façon que le parti dirige le pays, il s’autorégule en excluant d’adresser des sanctions exemplaires aux personnes ainsi démasquées.

Le règne de l’inertie s’est une fois de plus installé sans que le parti puisse donner aux populations les gages d’une éthique qui fait de plus en plus défaut dans la gestion quotidienne de la société. Tout juste, susurre-t-on, des sanctions seront prises en interne. Et nous savons tous à quoi cela renvoie exactement…

© Mutations : DORINE EKWÈ


06/04/2013
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