Au plus fort de la 2e guerre mondiale, un groupe de haut gradés de l’armée Allemande décident de se débarrasser d’Adolf Hitler. L’opportunité se présente le 20 Juillet 1944; le Colonel Von Stauffenberg, l’un des conspirateurs est invité à participer à une conférence de l’état-major présidée par le Führer en personne. Il réussi le tour de force de faire rentrer dans la salle de conférence, une mallette bourrée d’explosifs et de se retirer sans éveiller de soupçon. La bombe explose, mais contre toute attente Hitler ne meurt pas dans l’explosion. La nouvelle de sa non-mort crée une fissure au sein de la coordination du complot.
Le général Friedrich Fromm, l’un des membres de cette conspiration pris de panique, fait arrêter bon nombre ses co-conspirateurs, les soumet à des procès sommaires et commence à les faire exécuter les uns après les autres. C’est alors qu’à partir de Berlin, Himmler lui intime l’ordre d’arrêter sa mascarade. Le chef des SS et de la police Allemande voit en les actions de Fromm une manœuvre d’élimination de témoins gênants.
Il avait vu juste; le général Friedrich Fromm après avoir été reconnu coupable de complicité d’assassinat du Führer, fut fusillé le 12 Mars 1945.
La façon dont a réagi ce fameux général Fromm n’est pas un fait isolé ou un accident de l’histoire; elle est caractéristique du reflexe des prédateurs occidentaux envers leurs complices lorsque les choses commencent a mal tourner ou à ne pas suivre la trajectoire prévue: c’est une technique de la diversion.
Sommes-nous en train de revivre ce genre de scenario? Fanny Pigeaud serait-elle en train de faire porter à Marafa et compagnie la responsabilité des attaques de Boko Haram Cameroun après que les instigateurs aient constaté que le mouvement n’embrase pas le Nord Cameroun comme anticipé?
Existe-t-il un lien entre la maladie de Marafa, la coupure du signal satellite à Afrique Media, l’assassinat présumé de la secrétaire de Marafa et l’article de Fanny Pigeaud ? Faisaient-ils partie d’une stratégie globale de contre-offensive et de brouillage de piste initiée par les instigateurs de la déstabilisation du Cameroun? De toute façon l’article de Fanny Pigeaud présente suffisamment d’éléments pour que l’on l’analyse sous le prisme d’une tentative de diversion. C’est curieux tout de même qu’elle livre ainsi à la vindicte populaire celui que le gouvernement français considérait comme son candidat à la magistrature suprême après le départ du président Biya.
Elle accuse en effet Marafa et compagnie d’être derrière Boko Haram Cameroun. Bien qu’il soit possible que Boko Haram Cameroun ait la sympathie de certains leaders religieux ou politiques du Nord du pays et ait même bénéficié d’une certaine participation, il semble difficile qu’à eux seuls ils soient capables de monter une opération de cette envergure.
Une rébellion, ça coute très cher et ça demande beaucoup de temps, d’expertise pour réussir. Il faut commencer par convaincre des centaines et voire des milliers de jeunes désœuvrés et de combattants professionnels d’abandonner leur gagne-pain quotidien, fut-il dérisoire en leur donnant de quoi survivre pendant tout le temps que dure l’insurrection. Il faut leur trouver des camps d’entrainement bien protégés et des professionnels de la guérilla, en général très bien payés pour les former.
Il faut assurer toute la logistique qui comprend les soins médicaux, l’alimentation, la communication. Au fait, comment Boko Haram Cameroun a-t-il pu se procurer des services de téléphone satellite ? Ces compagnies qui sont forcément européennes n’ont-elles pas le moyen d’identifier les utilisateurs de ces téléphones et passer ces informations aux services de renseignement des pays qui sont soi-disant en train d’aider le Nigeria, le Cameroun ou le Tchad dans leur lutte contre ce mouvement ? Comment sont payés ces factures et l’armement?
Ah, les armes. Il a été démontré que Boko Haram Cameroun est équipé d’armes lourdes et d’armement plus sophistiqués que certaines unités de l’armée nigériane, qui auraient refusé de combattre pour cette raison. D’où viennent ces armes et qui paye pour elles ? Si ces transactions qui s’élèvent à des centaines de millions de Francs CFA, voire des milliards sont faites en devises étrangères, notamment en Euro, qui procure à Boko Haram Cameroun ces devises ? L’achat d’armement est une opération complexe demandant une expertise et des connections très puissantes.
Fannie Pigeaud suggère que les fonds accumulés à travers l’enrichissement illicite par certaines élites du Nord constitueraient le trésor de guerre qui fait fonctionner Boko Haram. Cela semble difficile à croire ; car nous voyons mal pourquoi ces hommes qui auraient été dans le sérail mettraient en danger leurs fonds limités pour financer Boko Haram Cameroun contre une armée conventionnelle comme celle du Cameroun.
Et si cette opération avait été exécutée par les élites nordistes camerounaises que Fannie Pigeaud accuse, ils auraient généré une telle activité (virements bancaires, coups de fil, déplacements et rencontres) qu’elle aurait été détectée par les services de renseignement avant même que le projet ne prenne jour. Il est difficile à croire que cette opération ait été mise en place par des individus qu’on pourrait considérer comme amateurs dans les opérations de rébellion, sans une puissante aide extérieure. Les rebellions ne sont pas financées par des individus, mais par des Etats, qui peuvent bien évidemment se cacher derrières des exécutants locaux, et qui seuls ont la capacité de commencer et de gagner une guerre. Tous les mouvements de rébellion ou presque sont adossés sur un Etat nourricier.
Alors pour quelle Puissance travaille donc Annie Pigeaud ? Posons la question autrement : Quel est le pays qui est la Puissance dominante (bien qu’en déclin) en Afrique centrale ? Quel pays a beaucoup d’influence au Cameroun et aurait à gagner au départ du président Biya ? La France bien sûr !
Il semblerait donc que Madame Pigeaud soit en train, au nom de la France, de faire de la diversion en pointant un bouc émissaire au public camerounais en la personne de Marafa et consorts. Elle veut disculper la France de l’opération de déstabilisation du Cameroun en sacrifiant ceux qui pourraient avoir été des alliés ou alors des sympathisants. Si c’est le cas, il est à craindre pour la vie de Marafa, ses associés et proches qu’on voudrait alors faire taire. Pour éviter qu’il ne soit accusé d’un meurtre, qui ajouterait de l’huile au feu d’une situation déjà délicate, le gouvernement camerounais devrait renforcer sa protection et s’assurer qu’il reste en vie.
Franchement de la à ce que l’on pense qu’Annie Pigeaud est un agent des services de renseignements français planté au Cameroun, il n y a qu’un pas que son attitude pousse à franchir. Elle est une femme, a une bonne couverture en tant que journaliste ainsi qu’une certaine crédibilité pour y avoir vécu longtemps. Les agents de renseignements n’opèrent pas avec un T-shirt déclarant leur métier. Ils viennent sous forme de journalistes, de coopérants, d’attachés culturels ou autre personnel d’Ambassade (lorsqu’ils jouent un rôle important dans la structure de renseignement et qu’ils veulent une couverture diplomatique) ou d’employés d’ONG.
Le moins qu’on puisse dire est que la sortie de Fanny Pigeaud n’est pas de nature à renforcer la cohésion nationale. En effet, à travers l’orientation que cette dame donne à son article, on pourrait penser que Fanny Pigeaud tente de créer les conditions d’un conflit voire d’un embrasement en liguant les Camerounais les uns contre les autres. Une occasion sur laquelle sauterait son pays : la France pour intervenir au nom des Droits de l’Homme et de l’Ingérence humanitaire au Cameroun. Alors Camerounais restons vigilants.