L'Afrique a-t-elle abandonné le Mali?
Trois mois depuis que les touaregs du MNLA ont lancé les premières attaques dans le nord du Mali. Les jours qui ont suivi, on a pensé qu’il s’agissait d’une des prévisibles conséquences de la chute du Guide libyen. Une conséquence que l’armée régulière malienne n’aurait aucun mal à circonscrire, avait-on également pensé. Mais cette première attaque a été suivie d’autres, avec des conséquences diverses et importantes.
De sorte que désormais le Mali vit une véritable crise
politico-militaire qui pourrait remettre en cause la stabilité et
l’intégrité de ce pays qui passait pour un exemple d’expérience
démocratique réussi. Malheureusement, comme elles le font souvent, les
institutions internationales demeurent plutôt silencieuses et
spectatrices, laissant au seul Mali d’y faire face.
Il aura fallu
un mois, de nombreux morts, des milliers de déplacés ainsi que des
risques d’affrontement pour que la CEDEAO consente à se pencher sur la
crise malienne.
Pour une réaction de la part des voisins
immédiats du Mali, un tel retard n’a rien de rassurant. C’est pourtant
la toute première réaction émanant d’une instance africaine. Car
jusqu’ici, on n’a rien ou presque entendu de la part de l’Union
Africaine. Encore qu’avec le camouflet qui avait caractérisé le dernier
sommet de l’UA, on n’est pas très surpris. Cependant, il est presque
certain que ce n’est pas en ayant une attitude d’indifférence et
d’abandon à l’endroit de ses membres faisant face à des crises que
l’Union Africaine réussira à redorer son blason.
Il faut juste
rappeler que cette même attitude empreinte de démission de la part de
l’UA qui a conduit à la crise malienne d’aujourd’hui. En effet, c’est
parce que l’instance panafricaine avait été aphone dans la crise
libyenne que des touaregs armés sont revenus perturber le calme et la
sérénité relatifs dans lesquels vivaient les habitants de la partie
septentrionale du Mali.
C’est d’autant plus regrettable que le sommet de la CEDEAO qui commence aujourd’hui et qui, est le tout premier à afficher ses préoccupations face à la résurgence de la problématique touareg, pourrait n’être qu’une grosse montagne n’accouchant qu’une toute petite souris. On est d’avance convaincu que les différents Etats composant la CEDEAO ont, chacun, d’autres chats à fouetter. Pour chacun des pays de la sous-région, il y a des sujets intérieurs et des préoccupations internes qui justifient que la crise malienne ne soit pas la priorité des priorités.
Pour le géant nigérian, Boko Haram et ses vagues meurtrières sont bien plus préoccupants. Pour la Côte d’Ivoire, réussir à sortir de la crise aussi bien politique qu’économique relève de l’urgence. En Guinée, l’incapacité à achever la transition, est une menace suffisante pour qu’on n’aille pas se préoccuper des attaques touaregs. Abdoulaye Wade, quant à lui, ne viendra tout simplement pas à ce sommet. Or, les autres pays ne pèsent guère lourd pour pouvoir imposer la crise malienne dans l’agenda du sommet.
C’est certainement parce qu’elles ont pressenti cette hypothèse que les autorités maliennes ont entrepris d’user des grands moyens pour résoudre la crise qui les oppose aux combattants du MNLA. Selon les informations disponibles, en début de semaine, l’armée malienne, dans une sorte de réaction d’orgueil, aurait infligé une lourde défaite aux touaregs dans la bataille de Tessalit. De l’avis des observateurs, cette réaction de la part de l’armée malienne, était d’autant plus nécessaire que cette même armée malienne avait été couverte d’opprobre après les nombreuses défaites à elle infligée par les troupes rebelles et les fuites. Pour les analystes, cette nouvelle attitude sera déterminante dans l’issue de la crise.
Fodé Kalia Kamara