John Fru Ndi : Power don finish

La désaffection populaire autour du Sdf ne semble pas préoccuper le Chairman dont l'engagement en faveur des masses s'essouffle inexorablement. Ce n'est le même homme que celui que l'on voyait sur des estrades de meetings extrêmement populaires à l'esplanade du stade de la Réunification de Douala. A 68 ans, il a certes pris quelques kilos qui ont arrondi sa silhouette. Ses cheveux grisonnent mais son poing est toujours fermé et son verbe demeure virulent: " Power to the people ! "


 

 

 

 

La désaffection populaire autour du Sdf ne semble pas préoccuper le Chairman dont l'engagement en faveur des masses s'essouffle inexorablement.C'est le même homme que celui que l'on voyait sur des estrades de meetings extrêmement populaires à l'esplanade du stade de la Réunification de Douala, haut lieu de la contestation du régime au début des années 1990. John Fru Ndi a toujours ses belles tenues africaines qui le rendaient si différent - du moins au premier regard, de Paul Biya qu'il pourfendait. C'est le même homme que celui que l'on voyait sur des estrades de meetings extrêmement populaires à l'esplanade du stade de la Réunification de Douala, haut lieu de la contestation du régime au début des années 1990. John Fru Ndi a toujours ses belles tenues africaines qui le rendaient si différent - du moins au premier regard, de Paul Biya qu'il pourfendait. A 68 ans, il a certes pris quelques kilos qui ont arrondi sa silhouette. Ses cheveux grisonnent mais son poing est toujours fermé et son verbe demeure virulent: " Power to the people ! "

 

 

Mais il manque quelque chose à l'homme qui vit le jour à Baba II, à quelques kilomètres de Bamenda pour que son fameux slogan, " Paul Biya must go ! ", se réalise. Comme il y a peu, alors qu'il briguait pour la deuxième fois la magistrature suprême, John Fru Ndi cherche à faire foule. C'est d'ailleurs vis-à-vis de ce public, on peut le penser sans grand risque de se tromper, que le président du Social democratic front (Sdf) semblait avoir choisi de rendre des comptes en annonçant fin juin qu'il allait publier la liste de ses biens.

 

Pour l'exemple, une telle initiative, venant du leader du premier parti de l'opposition parlementaire, aurait certainement porté. Ce d'autant plus que depuis son entrée dans les assemblées électives locales et nationales, le Sdf a toujours clamé sa volonté de montrer le contre-exemple de la gestion décriée de son adversaire, le Rdpc. N'a-t-il pas librement choisi de sanctionner depuis 1996 quelques uns parmi ses élus accusés de mauvaise gouvernance ? Dès lors, démontrer que contrairement aux accusations -sans preuves- portées contre lui par le rapport du Comité catholique contre la faim et pour le développement (Ccfd), il n'avait pas été enrichi d'une dizaine de milliards de Fcfa par des marchandages avec le pouvoir, aurait dû être pour Fru Ndi une action capitale.

 

Mais, l'homme, dont le courage et le hasard d'une contestation populaire du système oppressif du Renouveau avaient révélé aux yeux des Camerounais qu'il était possible de défier la dictature, a certainement changé d'avis. Sa fortune, a-t-il finalement dit lundi, alors qu'on en attendait le détail, n'est pas un tabou, puisque tout le monde la connaîtrait. Mieux, estime John Fru Ndi, dans une manière de renonciation à laquelle le tribun qui bravait la soldatesque ne nous avait point habitué, il semble impossible techniquement de déclarer ses biens dès lors que l'on n'est pas dans l'obligation légale de le faire et qu'aucune institution ne lui paraît suffisamment apte à enregistrer une telle déclaration.

 

Chef scout

Pourquoi diable, l'ancien commerçant qui fit naître et grandir une librairie prospère à Bamenda, la défunte Ebibi book shop, s'est-il donc aventuré sur un terrain si glissant que même les hommes au pouvoir à Yaoundé n'ont jamais cru bon de mettre en œuvre cette obligation constitutionnelle de déclaration des biens ? La réponse est simple pour le planteur de Ntarikon qui préfère les journaux qui le présentent sous les traits flatteurs d'un gentleman farmer à ceux qui lui indiquent que son parti détourne, comme le Rdpc tant décrié, des biens publics comme cette voiture de l'administration qui servait à l'organisation de sa dernière conférence de presse à Yaoundé. Pour John Fru Ndi, la presse a donc annoncé une fausse nouvelle en rapportant qu'il avait décidé de déclarer ses biens. De fait, cependant, John Fru Ndi, durant les deux mois où l'attente de sa déclaration avait été entretenue par la presse, n'a point démenti cette nouvelle, jusqu'à sa sortie de lundi.

 

Pour beaucoup, il faut donc voir dans cette volte-face, la dernière preuve du blocage d'un homme et d'une machine politiques qui ne peuvent plus proposer aux Camerounais la recette qui a fait leur succès hier. " Il n'y a plus que quelques apparatchiks et profiteurs qui se nourrissent des marrons que la sueur et la colère des milliers de sympathisants ont tiré du feu ", fait remarquer un confrère anciennement proche du parti. Mais James Chi Ngafor, désigné par la direction du Sdf pour assurer une gestion intérimaire des affaires du parti dans le Centre, depuis la crise irrédentiste de 2006, n'est évidemment pas de cet avis. Tout juste concède-t-il un émoussement de la fibre militante. Pour Jean Takougang, un cadre de la communication, il faut envisager plus sérieusement de former les militants.

 

Officiellement donc, personne au Sdf, ne dit donc que la renonciation de John Fru Ndi à déclarer ses biens est symbolique de la confusion qui caractérise les choix stratégiques du parti. Car, en déclarant à diverses reprises qu'il renonçait à mener la contestation populaire après son échec électoral de 2004, le "Chairman" en a rajouté à l'attentisme qui frappe cette formation politique qui enjoint pourtant le reste de l'opposition de suivre son fanion. Et, arc-bouté sur la certitude qu'il n'y a pas " meilleure force " pour réaliser une alternance démocratique, " Ni ", comme on l'appelle en signe de respect, n'a plus d'yeux et d'oreilles que pour " ses " députés et fidèles à qui il parle comme un chef scout s'adresserait à des louveteaux dans un camp de formation.

 

C'est dire si l'idéal démocratique prôné par le Sdf et attendu par les masses qui l'ont porté aux nues de la popularité semble avoir vécu. Même s'il restera toujours quelques derniers mohicans pour accompagner l'accusé John Fru Ndi au tribunal où il est jugé pour complicité de meurtre. Ce qui n'est pas, avec la désaffection populaire, le moindre des nuages qui pèsent sur l'avenir politique et personnel du power man.

 

Jean Baptiste Ketchateng   |  Yaoundé  ,  Cameroun   |  Publié le 19-09-2009

Source: Mutations



20/09/2009
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