Jean samuel Noutchogouin, le camerounais le plus riche se dévoile
Il n`y a pas un seul résident de l’Afrique Centrale, qui, du lever du jour au coucher du soleil, peut achever sa journée sans consommer une denrée, utiliser un objet ou un service qui ne ramène à des intérêts liés à Jean Samuel Noutchogouin, ( JSN) un des Camerounais les plus fortunés, mais dont la discrétion reste jusqu’à ce jour, de mise.
Ainsi, en mangeant au petit déjeuner un œuf, en continuant à midi avec du poulet ou du porc, vous passerez certainement par des produits directs ou indirects de la Société des Provenderies du Cameroun, la plus grande productrice d’aliments pour bétail de la sous-région, dont le propriétaire est aussi l’un des plus grands aviculteurs et éleveurs de porcs. Si vous n’utilisez pas un rasoir Bic, vous toucherez certainement à un stylo de la même marque au bureau. Vous roulez sans doute en Toyota, ou autre, Peugeot, Suzuki... Jean Samuel Noutchogouin est l’actionnaire camerounais le plus important du groupe Cfao... A moins que vous ne soyez locataire de l’un de ses multiples immeubles à Akwa Douala, au centre ville de Yaoundé, ou alors client de de la Banque Atlantique, la dernière née des activités de ce géant de l’industrie et des affaires, qui après de longues années de silence, a enfin choisi de se dévoiler dans une livre, « A la mesure de mes pas ».
L’histoire de Jean Samuel Noutchogouin, né en 1933, commence (comme celle de bien d’autres fortunes du Cameroun) à Bandjoun, dans un petit marché, où la mère d’un petit orphelin l’envoie au marché avec trois tubercules de manioc, pour aller les vendre.
Le petit garçon, au fil des marchandages et des spéculations, découvre sa vocation et quitte « l’école du Blanc » où il n’aura d’ailleurs passé que quelques mois. Mais le premier coup de génie de Jean Samuel Noutchogoing, c’est de percevoir qu’à Bafoussam, les cultivateurs manquaient d’outils, d’acheter de la ferraille à Nkongsamba, et de faire transformer celle-ci par les forgerons traditionnels, pour en faire des houes, haches, machettes, qui prendront place dans sa quincaillerie, la première boutique et le premier business qu’il mettra sur pied. Notons au passage qu’il fait aussi apprenti- tailleur chez un oncle, mais qu’à côté de l’atelier, il met déjà une caisse de bonbons et de friandises...
La société des Provenderies du Cameroun marque l’entrée du commerçant dans le monde de l’industrie et de la transformation. La création d’Icrafon aussi, qui en fait le roi du plastique. Il couronne tout par l’acquisition de Banque Atlantique, il y a quelques années.
L’histoire de cet homme nous décomplexe largement sur la question de l’école occidentale et le savoir, le bon sens. Il y a aussi cette leçon de vie derrière : modestie, valeur de la parole donnée en affaires, mais surtout... la gestion de la question de la polygamie, véritable Talon d’Achille des grandes fortunes des Grassfields avec la question de leur transmission à d’autres générations. Ici, le destin a été dur avec JSN, qui a perdu son fils aîné, Jean Roger, à qui il destinait les rênes de son empire. Mais cet homme a poussé ses autres enfants dans des carrières solides : médecins, ingénieurs etc.
JSN, ne pouvant écrire tout seul, s’est confié à d’autres mains, qui malheureusement ont quelque peu trahi sa manière simple et prosaïque de voir et de faire les choses. Le lecteur sera ainsi choqué par les citations et références littéraires savantes qui émaillent ce récit pourtant voulu à la première personne.
Après « Le chemin de Hiala » (1994) qui raconte le parcours de Victor Fotso, voici donc cet ouvrage, qui révèle les secrets de l’un des hommes qui assurément, et sans la moindre forfanterie, est l’un des plus fortunés du Cameroun. Il faut le souligner, ces fortunes locales, fruit de l’entreprenariat indigène, sont une spécificité et une fierté du Cameroun, et peut être aussi une chance pour notre pays, dans la recherche de voies pour l’émergence, la vraie.
Haman Mana
A la mesure de mes pas
Jean Samuel Noutchogouin
Monde Global
196 pages