Jacques Fame Ndongo : Le sémiologue aux vers déformants

Jacques Fame Ndongo : Le sémiologue aux vers déformants 


Ses prises de parole, généralement controversées et contradictoires, font polémique. Comme c’est actuellement le cas avec les diplômes du Bts.
L’actualité s’est brutalement emballée, depuis le 23 août 2010, autour de l’organisation et de la délivrance des diplômes du Brevet de technicien supérieur (Bts), à la faveur de la cérémonie de remise d’une dizaine de parchemins dans le cadre de la session 2009 du Diplôme supérieur d’études professionnelles (Dsep), du Higher National Diploma (Hnd) et du Bts au campus du complexe universitaire Siantou à Yaoundé. Si l’événement, présidé par le ministre de l’Enseignement supérieur (Minesup), Jacques Fame Ndongo, peut paraître banal, c’est l’objet et le sujet qui préoccupent.
Au sortir de ce moment fort festif en effet, les nombreux lauréats du pays n’ont pas obtenu l’information au sujet de la disponibilité desdits diplômes.

Et pourtant, le fils d’Alexandre Ndongo Fame et d’Esther-Rosalie Mfoumou Ngbwa s’est exprimé pour la circonstance. Pour couvrir d’éloges le promoteur du groupe Siantou. Il faudra attendre trois jours pour entendre le par ailleurs chef de Nkolandom, en réaction à la surprise exprimée par le président de l’Association des promoteurs d’instituts universitaires privés, Joseph Ndi Samba, indiquer que «les diplômes sont disponibles dans [son] cabinet».
Pourtant, le 25 août 2010, le chef de la cellule de communication du Minesup, Jean-Paul Mbia, affirmait, dans ces mêmes colonnes, que la cérémonie de Siantou supérieur n’était que la première étape vers la voie véritable de ce projet de diplômation. En attendant que le Minesup, devenu ainsi le gardien en chef et distributeur désigné des parchemins, le fasse du baccalauréat et des licences, celui dont le «nom de guerre», Osubita Ebolo d’Asso’otol, jadis réputé pour ses tirades en faveur du Renouveau dans le journal Le Patriote, se prépare à se rendre à Douala.

Réplique
Mais déjà, il a chargé l’un de ses inspecteurs de préparer les promoteurs des établissements supérieurs de la capitale économique à s’organiser pour le recevoir dans les prochains jours, dans l’optique de la réplique de la cérémonie – qui fait hurler dans le secteur – de lundi dernier. Il reste à attendre que le Minesup reçoive les autorisations nécessaires de sa hiérarchie, avant de traîner son imposante suite vers la métropole économique. Dans l’intervalle, il doit répondre aux sollicitations des milliers de lauréats en quête de leurs diplômes, qui vont – on l’imagine – se précipiter dans «[son] cabinet» dès lundi prochain. Tout comme l’ancien écolier de la Sil de Ma’anmezam, Yingui, Bipindi et Mvengue devra repréciser sa pensée au reste de la communauté éducative, au sujet de la certification des diplômes.

C’est que Jacques Fame Ndongo est un ailier de débordement qui déroute. Courant 2007, le Cameroun perd certains de ses enfants, alors étudiants en pharmacie et médecine en République de Guinée, des suites de noyade alors qu’ils étaient en route pour un pique-nique sur une île voisine de Conakry. Il commettra un communiqué pour affirmer en substance que le Cameroun offre toutes les
conditions de formation pour que ses enfants ne soient pas obligés de s’exiler dans des pays de seconde zone, au risque d’y trouver la mort. A cette période, justement, l’Université des montagnes, spécialisée en pharmacie et médecine, continuait de courir après une autorisation de fonctionnement qui s’était engluée dans les labyrinthes de la tracasserie politico administrative… Toujours est-il que l’ancien élève des collèges Vogt et La retraite sera dépêché en Guinée par le chef de l’Etat, pour ramener les corps des «coupables» de l’immigration estudiantine. Principal instigateur de la programmation du Comice agropastoral d’Ebolowa à la fin de cette année, le petit-fils d’Osubita Ndongo est étrangement resté muet lors des affrontements entre communautés dans la capitale du Sud, le 26 juin dernier, alors qu’il séjournait dans la localité (à Ngoazip), pour cause d’obsèques de Ferdinand Léopold Oyono.

Jacques Fame Ndongo, passe pour être la principale élite du coin. On le présente –lui même ne le dit pas moins – comme un infatigable signataire de motions de soutien au grand Chef. Il le fit sans ciller au lendemain de l’arrestation de Pierre Désiré Engo, l’ancien patron de la Caisse nationale de prévoyance sociale (Cnps), «frère du village» et cacique du régime. Mais tout «crime» se paie, même celui qu’on croit le plus… innocent. Dans cette veine, celui que les étudiants, du temps où il était recteur d’université publique, appelaient affectueusement «Jaco», s’est fait violemment reprendre par le président de la République, lors de la clôture de la conférence Africa 21 à l’occasion des festivités du Cinquantenaire, le 20 mai 2010.
Le major de sa filière en licence ès lettres, session de 1973, avait manifestement mis le prince en colère par un brutal accès d’obséquiosité alors qu’il était appelé à présenter le rapport général de la conférence. Il finit par agacer Paul Biya, dont il se dit l’«ouvrier» en toutes circonstances, alors qu’il était lancé dans une véritable entreprise visant à tronquer les faits.

L’hôte du sommet l’interrompit net, en demandant à un collaborateur de faire taire l’impétueux orateur. Feu le célèbre écrivain Mongo Beti, à qui il consacra un pensum, le fit également en son temps dans un livre de Philippe Bisseck: «(…) M. Fame Ndongo a écrit une thèse d’État sur moi, mais je ne l’ai pas lue. En revanche ma femme l’a lue, elle m’a dit que ça ne vaut pas la peine de la lire. M. Fame Ndongo peut se prévaloir de sa thèse et dire qu’il est un grand spécialiste de Mongo Beti, mais je tiens à signaler qu’il ne m’a jamais rendu visite…»
L’écriture, comme le verbe, se font souvent chers. Plus proche de nous, le Minesup a été vertement repris voici quelques jours par des universitaires, alors qu’il venait sans peur aucune de transformer une fiche de présence à un forum sur l’employabilité des diplômés de l’enseignement supérieur en motion de soutien à qui on imagine... A 60 ans, ce pôle d’efficacité dans le discours est un infatigable spécialiste des sorties attentatoires. Et sur ce chapitre le flagrant délit d’imposture n’est jamais loin!

Léger Ntiga



29/08/2010
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