Imposture : Ces pseudo-opposants qui troublent le jeu politique

Cameroun - Imposture : Ces pseudo-opposants qui troublent le jeu politique  Dans son exposé ayant porté sur l’opposition et la responsabilité du corps électoral, Alawa Zelao, enseignant à l’université de Ngaoundéré, a pointé un doigt accusateur sur ces politiciens du dimanche à la solde du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc)
 
De la pléthore des partis politiques (environ 300) existant au Cameroun, très peu disposent d’une véritable idéologie, encore moins d’un projet de société. Il s’agit en fait, de groupuscules créés par des marionnettes à la solde du régime en place, pour troubler le jeu politique national et créer la confusion dans les esprits. Ce sont des partis politiques ayant pour seule et unique mission de jouer un troubles-fête. Et très souvent, ils finissent par accorder les voix de leurs militants - s’il en existe - au Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc). Awala Zelao dresse dans son exposé, la liste de ces partis. Tout récemment, lors de l’élection présidentielle du 9 octobre 2011, le président du Nouveau mouvement populaire (Nmp) et ancien leader du Manidem manifeste pour la nouvelle indépendance et démocratie Banda Kani a décidé de soutenir la candidature de Paul Biya. Alors que ce dernier était candidat à sa propre succession pour la sixième fois consécutive. « C’est un soutien patriotique.

Je ne vise pas une quelconque insertion dans le dispositif de campagne du président de la République…Nous ne sommes ni de l’opposition, ni du pouvoir, nous sommes là pour le Cameroun. Nous sommes en mesure de nous mettre au delà du manichéisme primaire partisan qui prévaut. Cette position est extrêmement avant-gardiste », avait alors claironné Banda Kani pour justifier ce mariage forcé et improvisé. Dans la même mouvance, le président du Parti socialiste uni (Psu), Daniel Soh Fone qui n’a pour véritables militants que quelques proches parents, demanda à ses fans de porter leurs choix sur le candidat du Rdpc. Pauvre opposant ! « De toute évidence, de tels partis politiques qui sont de plus en plus nombreux, sont en attente des retombées immédiates dans le contexte électoral. Leur poids dans l’espace de compétition politique étant toujours minimalisé, le bloc au pouvoir se sert d’eux comme des marionnettes, des chausse-trappes, sorte de dindons de la farce du jeu politique. Leurs récompenses matérielles et financières s’arrêtent une fois passé le temps électoral », explique l’enseignant d’université, à l’occasion de ce colloque.

Malheureusement, ces alliances traitresses ne sont pas nouvelles au Cameroun. Awala Zelao remonte dans les années 92 pour dénicher certains de ces partis politiques de l’opposition « affamés » qu’il qualifie d’opposition institutionnalisée. Après la présidentielle de 1992, un certains nombre de partis de l’opposition ont fait leur entrée dans le gouvernement. C’est le cas du Mouvement démocratique de la République (Mdr) de Dakolé Daïssala et de l’Union des populations du Cameroun (Upc) d’Augustin Frédéric Kodock. En 1997, c’est Bello Bouba Maigari qui signe une plate-forme entre l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (Undp) et le Rdpc. Dans le même registre, pourquoi ne pas citer l’Alliance nationale pour la démocratie et le progrès (Andp) d’Amadou Moustapha et le Front du salut national du Cameroun (Fsnc) d’Issa Tchiroma Baikary. Ce jeu trouble de l’opposition camerounaise a finalement fragilisé la véritable opposition, aujourd’hui victime du localisme et du tribalisme.

Tribalisme de l’opposition

Au Cameroun, le nombre des parti politique légalisés (près de 300) équivaut presque au nombre d’ethnies (282). Pas du tout surprenant donc que chaque parti reste confiné dans l’ethnie voire le village de son leader. « Le Sdf a principalement sa base dans les régions anglophones, notamment dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest. Ce parti engrange accessoirement des résultats relatifs dans l’Ouest et le Littoral. L'Undp, malgré sa percée lors des premières élections pluralistes de 1992, s’est désormais relocalisé dans la partie septentrionale d’où est originaire son leader Bello Bouba Maïgari. L’Udc depuis le retour du pluralisme n’a pas encore fait des résultats en dehors du département du Noun, fief ethno-politique de son président Adamou Ndam Njoya. Le Mdr, longtemps considéré comme le parti des Kirdi du Nord Cameroun , est désormais réduit à un confinement ethnique de son coordonnateur Dakole Daissala, d’origine Toupouri. Le Mp de Jean Jacques Ekindi est confiné dans le département du Wouri », inventorie Awala Zelao.

C’est dire que les leaders de l’opposition peinent à articuler une dynamique d’organisation et de dissémination géographique qui va au-delà de leurs fiefs naturels. Une équation qu’il faut pourtant résoudre pour mettre fin au règne du roi Biya, au pouvoir depuis 30 ans et 06 jours. 

«Les communes du septentrion et l’opération Sahel Vert: des mafias en puissance»

« Au plan géographique et climatique, la partie septentrionale du pays a des problèmes spécifiques comparativement aux autres. Les populations ici sont plus exposées aux problèmes de sécheresse et de famine du fait de la rareté des pluies. Malheureusement, ce qui se fait dans le cadre de la coopération décentralisée et dans l’opération Sahel Vert ne profite qu’aux mafias».

-Le cas des communes

Le 24 septembre 2011, la Dynamique Citoyenne, une association de la société civile qui regroupe plusieurs autres associations a effectué une enquête en marge du séminaire organisé sur la coopération décentralisée. Le séminaire et l’enquête se sont déroulés dans la région de l’Extrême-Nord. Au niveau des résultats, la présidente du mouvement, Mme Andela nous a confié que personne ne contrôle rien de la gestion des communes dans cette partie du territoire. La difficulté provient du fait que presque toutes les communes dans la région ont des conventions avec l’Arabie Saoudite. Les termes desdites conventions échappent à tout contrôle et par le fait engraissent les élus au détriment des pauvres populations. Elle nous a avoué avoir été incompétente à cerner les contours de la mafia établie à ce niveau.

-Le cas de l’opération Sahel Vert

Il s’agit d’un véritable gouffre à sous qui ne profite qu’aux mafias et non à la lutte contre la désertification de la région. Notre source, Mme Andela de la Dynamique Citoyenne, nous a confié avoir, une fois obtenu du gouvernement l’autorisation de faires des enquêtes sur la question. Par la suite, le délégué s’est montré hostile à la démarche. Mme Andela que l’on sait très tenace a rencontré le ministre des Forêts qui, à son tour l’a orientée chez le directeur qui l’a reçue. Ce dernier lui a fait savoir que dans ce domaine, tout se fait dans du fictif. Or chaque année, un budget est voté pour l’opération Sahel Vert. Le projet est très vital pour cette partie du pays où se pratique l’essentielle de l’élevage. Malheureusement, chaque année, le désert avance et les populations vivent dans le drame de ses effets. Entre temps, l’argent de l’Etat débloqué pour faire face à l’avancée du désert dans la région septentrionale enrichit les privés. Tout le monde sait que c’est comme cela que ça se passe, mais rien n’est fait pour briser la spirale. Des autorités administratives aux chefs traditionnels en passant par les autorités judiciaires, chacun y trouve son compte. Un tel conflit d’intérêts obscurs ne permet pas de rendre justice.

-Abakar Ahamat et les fonctionnaires fictifs de Bamenda

Bamenda est le chef-lieu de la région du Nord-Ouest et il s’y passe des choses dans l’administration publique. La révélation fut faite par le gouverneur de la région d’alors, Abakar Ahamat, administrateur civil principal de classe hors échelle, aujourd’hui en poste dans la région de l’Adamaoua. Dans son unité de commandement, le gouverneur après enquêtes, s’est rendu compte que pas moins de 137 enseignants ont abandonné leurs postes depuis 2010, 2011 et sont à l’étranger (Usa, Canada…), mais touchent l’intégralité de leur salaire. Le ministre compétent a été saisi et les mis en cause ont été sanctionnés. Comme il fallait s’y attendre, le gouverneur a bien été vilipendé, car on ne s’attaque pas à la mafia sans laisser quelques plumes. Si et seulement si d’autres gouverneurs, préfets et sous-préfets pouvaient suivre ce bel exemple ».

© Le Messager : Joseph Flavien KANKEU


12/11/2012
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