Il y a 20 ans disparaissait le président Ahmadou Ahidjo
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Querelle autour du rapatriement de la dépouilleLa famille et le gouvernement se rejettent la responsabilité.Le rebondissement sur la question du rapatriement de la dépouille de Ahmadou Ahidjo est parti d’une question de Jean Paul Tchakoté, président de la section du Front social démocrate (Sdf) de France. Il voulait savoir, à côté d’autres préoccupations, si le président Paul Biya admettait « l’idée d’un dialogue national basé sur une réconciliation véritable avec le retour de la dépouille du président Ahidjo ». On peut remarquer que le président de la République du Cameroun a eu besoin d’une relance d’Ulysse Gosset, le journaliste de France 24 qui l’interviewait le 29 octobre 2007, pour s’exprimer sur le sujet : « Oui, il y a eu des événements malheureux, sur lesquels je ne reviendrait pas, en 1984, et l’Assemblée nationale, sur ma proposition, a voté une loi d’amnistie. Ceux qui ont vécu ces tristes événements ont retrouvé leurs droits, il y en a qui sont au gouvernement. Le problème du rapatriement de la dépouille de l’ancien président est, selon moi, un problème d’ordre familial ». Jules Romuald Nkonlak
Emile Derlin Zinzou : Tu n’eus qu’une seule passion : le CamerounExtrait de l’oraison funèbre prononcée le jour des obsèques d’Ahmadou Ahidjo par son ami, l’ancien président du Bénin.Ahidjo mon ami, mon frère, voici notre dernier rendez-vous, du moins en ce monde, puisque nous sommes croyants. (…) Heureux ceux qui meurent en laissant des traces, un sillon. Les sillons que tu as creusés attesteront longtemps encore aux yeux ds générations qui se succède, ce que tu fus que nul n’oserait contester : le bâtisseur, le père du Cameroun moderne. A la vérité, tu n’eus qu’une seule et grande passion : le Cameroun. Comme nous, tu as pu te tromper, commettre des erreurs et peut-être même des fautes. (…) Ce dont nous sommes assurés, c’est que dans la balance, le bien, le succès, les réussites l’emportent très largement (…) sur les erreurs (…). Nul ne pourra t’interdire d’Histoire et empêcher que celle-ci sereine et impartiale, dise que tu fus de ta patrie et de l’Afrique un grand un grand et digne fils (… Et le destin n’est point oublieux qui t’a ramené mourir en Afrique et ici (à Dakar). Pour l’authentique Africain que tu étais, c’est une grande consolation (…) ».
Bio-express1924 : naissance à Garoua paru dans le jour n°55 du 30 novembre 2007.
Mohamadou Ahidjo : “Il souffrait quand il apprenait certaines choses”Le fils ainé de l’ancien chef de l’Etat évoque l’exil dakarois de son père.Quelle image avez-vous gardé de votre père ? Et quel souvenir vous reste-il de l’homme qu’il fut ? Vous étiez en exil au Nigéria, pendant que votre père était au Sénégal. Quel était l’état de vos relations avec votre père ? Quand vous le rencontriez, que vous disait-il du Cameroun ? Lesquelles ? Trahisons de qui ? Encore une question, juste une question… Avait-il gardé des liens avec ses anciens collaborateurs ? De quoi est-il mort ? La question du rapatriement de sa dépouille a été évoquée par Paul Biya le 29 octobre 2007 au cours d’une interview à France 24. Depuis lors, y-a-t-il eu des contacts entre votre famille et les pouvoirs publics ? Vous avez répondu au président en disant que cette question relève d’une décision politique (le jour, n°33 du 1er novembre 2007). La position de la famille a-t-elle changé entre temps ? Propos recueillis par Xavier Luc Deutchoua (Interview parue dans le jour n°55 du 30 novembre 2007).
Il y a un an à Dakar : La commémoration chez Germaine AhidjoIl y a un an, à la veille du 18è anniversaire du décès de l’ancien président du Cameroun, à la demande du Jour, un confrère sénégalais allait à la rencontre de Fatimatou AhidjoSur la route des Almadies, un quartier huppé et résidentiel à Dakar au Sénégal, la maison du défunt président du Cameroun, El Hadj Ahmadou Ahidjo, se dresse majestueusement. Il faut montrer patte blanche pour accéder à la demeure. Un service de sécurité discret veille sur les lieux. Vu le statut de réfugiés de la famille au Sénégal, tout journaliste sénégalais doit passer par le filtre de la sécurité de la gendarmerie sénégalaise, téléphoner à quelques officiels pour avoir le droit de parler politique avec les Ahidjo. Passé cette étape, la famille du tout premier président du Cameroun, décédé à Dakar, est accueillante, voire adorable. Alassane Samba Diop,
RéactionsLouis Tobie Mbida, président du Parti des démocrates camerounaisOui au retour de la dépouille mortelle du président Ahidjo aux frais de l’Etat, avec tous les honneurs qui lui sont dus, et à l’organisation des obsèques nationales, avec journée de deuil national. Banda Kani, président du ManidemLe souvenir que je garde du président Ahidjo bien après sa mort, est celui d’un dictateur qui a bâti son régime sur le massacre de ceux qui luttaient pour l’indépendance réelle de notre pays le Cameroun. C’est également le souvenir de quelqu’un qui était aliéné. Si on enlève l’intermède de la guerre de Biafra et l’affaire de Air Afrique où il décide de créer la Camair, on relève que Ahidjo s’est aligné autour de la conception française des intérêts de l’Afrique et du Cameroun. Ainsi, Ahidjo n’a pas travaillé pour l’émancipation du peuple camerounais. Il a travaillé pour la France, pour la consolidation de son pouvoir personnel, pour les fonctionnaires et quelques affairistes qui gravitaient autour de son régime. Je crois que sa fin est assez révélatrice de ce que l’histoire sait rendre justice. Lui qui a contraint des milliers de Camerounais à l’exil forcé, lui qui a estimé que nos héros qui sont morts ne devaient pas être enterrés dignement sur leur terre natale ; a après sa mort son corps toujours à l’extérieur. Alors que nous fêtons les 20 ans de la mort d’Ahidjo, il est bon de rappeler que les contentieux historiques qui opposent le Cameroun à la France sont loin d’être réglés. Dans le cadre du règlement de ces contentieux, il faudra envisager une véritable politique de réconciliation nationale au Cameroun. Cela dit, à sa décharge on doit reconnaître qu’il a dirigé l’Etat d’une main ferme et que les hauts fonctionnaires savaient à quoi s’en tenir. Vivement que nous tournons cette page de notre histoire qui ne fait pas grandir le Cameroun.
Hilaire Ham Ekoué, chargé de la communication et de la Presse à L’UpcMis à part le fait que Ahidjo était le premier président du Cameroun, je n’ai pas d’autre souvenirs de lui. Sinon, je crois que son successeur, M. Paul Biya, le lui a très bien rendu, puisqu’il a passé toute sa vie à faire de la dictature. Durant tout son règne, il n’a jamais eu de la considération pour les morts. Il a passé sa vie à maltraiter les siens, en particulier les héros et martyrs de ce pays qui ont lutté pour l’indépendance du Cameroun. Il a d’ailleurs délibérément passé la main à son successeur qui continue de marginaliser le peuple camerounais. D’ailleurs, on a le résultat que l’on a aujourd’hui. Un pays sans mémoire historique. Robert Wafo, chargé de la Communication au SdfAhidjo était le premier président du Cameroun et à ce titre, j’estime pour ma part qu’au delà de ce que l’on peut dresser comme bilan économique politique ou social, il est bon qu’on organise les obsèques nationales en sa mémoire. Il ne faut pas oublier qu’il a été le premier président de ce pays. En outre, en tant qu’Africain, en tant que Bantou il ne serait pas juste de faire comme s’il n’avait jamais existé. Toutefois, on peut lui reprocher le musellement de la liberté d’expression et de la liberté politique. Mais, en même temps, on peut lui reconnaître le mérite d’avoir posé les jalons économiques. A titre d’illustration, aucun Camerounais ne peut oublier les fameux plans quinquennaux. Propos recueillis par Christelle Kouétcha |