Hilaire Kamga « Owona Nguini n’est pas le candidat de la société civile »
Hilaire Kamga
« Owona Nguini n’est pas le candidat de la société civile » Le porte-parole de la Plate-Forme de la société civile remet les pendules à l’heure.
La société civile est-elle opposée à une candidature de M. Mathias Owona Nguini ?
Tout d’abord merci de me donner cette opportunité de donner le point de
vue de la Plate-Forme de la société civile pour la démocratie dont je
suis le porte-parole, sur la question d’une éventuelle candidature de
M. Mathias Eric Owona Guini. D’emblée, je tiens à faire une
clarification indispensable pour la suite du débat. La Plate-Forme de
la société civile pour la démocratie (la plate-forme) n’a aucunement la
prétention de parler au nom de toute la société civile qu’elle ne
représente pas. Nous ne pouvons par exemple pas représenter ces
associations et Ong créées de toutes pièces par le Régime de Yaoundé
pour distraire et polluer l’environnement de la société civile
militante. Il ne faut pas oublier que des centaines d’associations se
réclamant de la société civile ont été créées, entre 1994 et 2009, par
des fonctionnaires et autres responsables du parti au pouvoir,
essentiellement dans le but de faire le contre poids aux actions que
nous menions sur le terrain. En tout état de cause, pour l’instant la
Plate-Forme de la société civile pour la démocratie, peut au moins
revendiquer le fait qu’elle est le seul regroupement de la Société
Civile camerounaise créée en 2004 essentiellement pour accompagner le
peuple camerounais vers une alternance dans la paix et par les urnes en
2011.
Cela dit, parlant de la candidature du Dr Mathias Eric Owona Nguini, je
suis embêté de parler d’un non-lieu voir d’un non évènement. A ce que
je sache, il n’a déclaré nulle part qu’il avait une ambition de briguer
la magistrature suprême. M. Nguini est certainement, l’un des meilleurs
analystes politiques que notre pays peut être fier d’avoir. C’est un
brillant universitaire qui depuis plus de 4 ans est très présent dans
les médias, et dont les analyses et conclusions font de plus en plus
autorité au sein de l’opinion qui s’abreuve à ces médias. Il ne me
souvient pas, avoir suivi dans aucune de ces analyses, une idée même
voilée, allant dans le sens de la réflexion sur le leadership
alternatif post-Biya, encore moins d’un leadership dans lequel il
entendrait jouer un quelconque rôle. Bien entendu la manifestation de
l’ambition au leadership n’a pas de moment : elle peut se révéler à
tout moment. En tant que citoyen camerounais, il est libre de se porter
candidat à la présidence de la République. Je ne vois pas pourquoi
j’aurai un problème particulier à cette initiative. Mais, j’observe
qu’une démarche d’infantilisation de ce potentiel candidat, relativise
la portée d’une telle ambition quand bien même elle tenterait ce
politologue.
Que reproche la société civile que vous représentez à ceux qui ont initié cette démarche ?
Personnellement, je ne crois pas avoir de reproche particulier à faire
sur des initiatives privées qui ne me concernent pas. Toutefois, je me
permets deux observations :
La première concerne la tentative de faire croire à l’opinion que cette
démarche est une initiative de la société civile pris comme un tout. Le
problème aurait été présenté en ces termes : « l’association X propose
la candidature de Mathias Owona Nguini » que nous n’aurions rien trouvé
à redire. Mais vouloir faire croire qu’il s’agit du candidat de la
société civile procède d’une mauvaise foi manifeste qui fort
heureusement, ne peut tromper que très peu de Camerounais non avertis.
La deuxième observation est le fait que cette démarche est de nature à
altérer la compréhension réelle du problème camerounais de l’heure en
terme d’alternance politique. Il faudrait que cela soit clair pour tout
le monde, et surtout pour ceux qui prennent le train de la lutte pour
le changement à l’approche de la gare d’arrivée (ce qui n’est pas un
défaut), que le problème du Cameroun est moins celui de l’homme
providentiel qui va remplacer M. Biya en 2011, que celui de l’offre
politique qui traduira réellement ce désir d’alternance auquel des
millions de camerounais aspirent. Les Camerounais ne peuvent pas donner
un chèque en blanc à un citoyen, qui qu’il soit, sans savoir ce qu’il
entend faire du pouvoir et surtout quelles sont les garanties qu’il ne
se détournera pas des missions qui auront déterminé son élection. Cette
démarche de construction des mécanismes d’alternance est préalable à
l’enjeu de la recherche de l’alternative à Biya en terme d’homme.
La mémoire des Camerounais a d’ailleurs été rafraichie ces derniers
temps par le revirement à 180° d’un autre personnage qui, retourné au
gouvernement Biya, nous sert aujourd’hui des incongruités du genre « la
Constitution du Cameroun est accessoire, M. Biya a ses priorités…. ».
Tout ceci nous amène à être désormais très vigilants.
En définitive, si le Dr Owona Nguini, veut être candidat, c’est son
droit le plus absolu. Et il est évident que si c’est le cas, il se
déclarerait. Si d’autres Camerounais, président d’associations veulent
proposer un candidat, c’est aussi leur droit. Mais il serait un peu
exagéré de prétendre que l’initiative d’une unique association, peut
être assimilée à celle de la Société Civile Camerounaise. C’est cela
qui pourrait poser problème en terme de compréhension.
Permettez-moi de rappeler que de milliers de camerounais ont perdu
leurs vies pour la libération de ce pays. Depuis 1990, des centaines de
jeunes ont été contraints à l’exil pour cette cause. D’autres ont
consacré toutes leurs vies pour permettre que cette alternance puisse
avoir lieu à la fin du Règne de Biya en 2011. Ce n’est donc pas un jeu,
encore moins une aventure. C’est pour nous autre une question de survie
générationnelle. Nous veillerons à ce que le peuple voit ses
désidératas réalisés.
Comment doit se structurer le processus pour l’obtention d’une candidature de la société civile ?
Pour ce qui est de la Plate-Forme de la société civile pour la
démocratie (qui compte aujourd’hui 173 associations), une dynamique
participative est en cours depuis 2007. Dans le cadre de cette
dynamique, plusieurs autres réseaux d’associations, au Cameroun comme
en diaspora, y travaillent avec pour unique but : Oeuvrer ensemble pour
une alternance par les urnes et dans la paix au Cameroun à l’horizon
2011. Nous n’avons aucun doute sur le fait que cette dynamique
démocratique conduira à la désignation d’un citoyen qui incarnera les
désidératas des citoyens pour cette prochaine élection présidentielle
et qui conduira la transition citoyenne que prône la Plate-Forme. Ce
potentiel candidat doit personnellement ressentir en lui un désir et
une volonté de conduire ce leadership. Il serait très exécrable
d’envisager de faire comme au Rdpc où les gens sensés doivent
s’humilier dans des cirques surannés, en suppliant en pleurs et souvent
à genou M. Biya de se porter candidat. Ces méthodes correspondent bien
au type de système que nous devons absolument changer parce qu’il a mis
le Cameroun dans le gouffre où il se trouve aujourd’hui. Pour conclure,
permettez-moi de vous annoncer en exclusivité que la société civile
engagée que nous pilotons, rendra public dès le 23 octobre 2009 les
mécanismes opérationnels de construction d’une alternance dans la paix
en 2011 au Cameroun. Pour l’instant, nous ne sommes pas concernés par
l’appel isolé à la candidature du citoyen Mathias Owona Nguini,
démarche qui est en déphasage avec notre chronogramme. De même qu’elle
contredit la démarche à suivre pour y parvenir.