Gouvernance - Dépenses folles au MINCULT: Un car podium pour flatter et vénérer Paul Biya
DOUALA - 07 DEC. 2010
© Souley ONOHIOLO | Le Messager
La dernière «gâterie» de la ministre de la Culture Ama Tutu Muna est l'achat à coût de trois centaines de millions de Fcfa, d'un véhicule à multiples usages alors même que son département ministériel croule sous une masse de difficultés financières...
Quelques heures avant le lancement des festivités marquant la célébration du cinquantenaire des armées dans la ville de Bamenda, l'une des plus grandes attractions qui suscite déjà de multiples commentaires et qui va certainement faire l'objet de nombreuses curiosités est sans doute le car podium, nouvellement acquis par la ministre de la Culture Ama Tutu Muna. Après un bref séjour dans ce qui tient lieu de musée national à Yaoundé, le véhicule à plusieurs visages a mis le cap sur Bamenda où il nargue tous ceux (les artistes surtout) dont les demandes de sponsoring, les dossiers de soutien et autres sollicitations adressés au ministre de la Culture ne sont jamais sortis des tiroirs. La semaine dernière, face à des journalistes (tirés sur le volet) que la ministre a invités à la présentation de sa nouvelle trouvaille, Ama Tutu Muna a déclaré sans avoir froid aux yeux que l'objet du délire a coûté une faramineuse somme de 300 millions de Fcfa. Et d'ajouter que les financements sont ceux du budget d'investissement public.
Acheté en Chine, le car podium qui est long de 30 mètres, pèse près de 40 tonnes. Il dispose d'un espace de scène de 100 mètres carrés et peut se subdiviser en trois plateaux amovibles pour les besoins de concerts de musiques, les représentations théâtrales et les projections cinématographiques. Il comprend aussi deux loges et une cabine technique pour les différentes modulations des lumières, sons et fréquences.
Réagissant pour expliquer les motivations l'ayant conduit à opter pour l'achat dudit véhicule, la ministre de la Culture parle du souci de créer une proximité entre les publics et les spectacles; de régler les problèmes de location des équipements pour l'organisation des grands évènements culturels et la formation des artistes à l'utilisation du matériel de pointe.
Si on est d'accord avec le ministre de la Culture sur certaines possibilités en termes de déploiements qu'offre ce véhicule parce que disposant d'un groupe électrogène et un équipement permettant de recevoir une ligne Télécom, un émetteur Fm radio, une provision en écran géant, l'acquisition du car podium appelle plusieurs interrogations. Quelles en sont la pertinence et les motivations dans l'ordre des priorités et les interpellations auxquelles est confronté le ministère de la Culture ? Fallait-il privilégier l'achat d'un véhicule qui expose le public à diverses intempéries parce que ne pouvant offrir que des prestations scéniques en plein air, avec tout ce que cela comporte comme insuffisances en terme de sécurité. La nouvelle trouvaille d'Ama Tutu Muna, arrive dans un contexte de fin d'une année qui a été particulièrement dure, blanche et sèche pour les artistes. La plupart des festivals ont été sevrés des financements, malgré l'abondante sollicitude en direction du ministre. Les sociétés du droit d'auteur rasent toujours les murs attendant des financements pour l'organisation et le renouvellement des équipes dirigeantes arrivées en fin de mandat. Le festival national des arts et de la culture (Fenac), annoncé en grandes pompes pour se tenir cette année est renvoyé sine die. Comme si cela ne suffisait pas, une grosse partie des dettes (y compris les cachets des artistes) contractées dans le cadre de la dernière édition du Fenac de Maroua n'ont jamais été apurées.
La peau de chagrin des archives nationales et le musée national
Depuis des années, le Cameroun est mal loti en matière d'infrastructures et des lieux d'expression artistique. La maison de la culture qui tient lieu de centre culturel camerounais est l'ombre d'elle-même ; dans un état de désagrégation affligeant. Il n'existe au Cameroun, ni palais de la culture, ni salles de spectacles (musique, théâtre et cinéma). Les archives nationales sont dans un état de désintégration affligeant. Situé à proximité de l'ancien Palais présidentiel (rebaptisé Musée national), le vieux bâtiment colonial abritant les archives nationales du Cameroun, croule sous le poids de l'âge. Le Musée national quant à lui, déraille et broie du noir, dans une sorte de mélancolie qui doit fâcher le président Ahmadou Ahidjo dans sa tombe. Faute d'avoir une bibliothèque nationale, la Centrale de lecture publique est dans un état de délabrement. Tout en fermant les yeux sur ces préoccupations, la ministre Ama Tutu Muna a fait le choix d'un car podium qui va essorer le budget d'une somme de 30 millions de Fcfa, représentant les frais annuels d'assurance. De quoi aider les artistes ou les organisateurs de festivals ou autres évènements culturels. Grâce à une bonne planification, cette somme qui va être déboursée pour l'assurance, pourrait permettre la construction des salles de spectacles dans les dix prochaines années, on aura au moins un espace d'expression culturelle dans chacune des dix régions. Hélas.
© Souley ONOHIOLO | Le Messager
La dernière «gâterie» de la ministre de la Culture Ama Tutu Muna est l'achat à coût de trois centaines de millions de Fcfa, d'un véhicule à multiples usages alors même que son département ministériel croule sous une masse de difficultés financières...
Quelques heures avant le lancement des festivités marquant la célébration du cinquantenaire des armées dans la ville de Bamenda, l'une des plus grandes attractions qui suscite déjà de multiples commentaires et qui va certainement faire l'objet de nombreuses curiosités est sans doute le car podium, nouvellement acquis par la ministre de la Culture Ama Tutu Muna. Après un bref séjour dans ce qui tient lieu de musée national à Yaoundé, le véhicule à plusieurs visages a mis le cap sur Bamenda où il nargue tous ceux (les artistes surtout) dont les demandes de sponsoring, les dossiers de soutien et autres sollicitations adressés au ministre de la Culture ne sont jamais sortis des tiroirs. La semaine dernière, face à des journalistes (tirés sur le volet) que la ministre a invités à la présentation de sa nouvelle trouvaille, Ama Tutu Muna a déclaré sans avoir froid aux yeux que l'objet du délire a coûté une faramineuse somme de 300 millions de Fcfa. Et d'ajouter que les financements sont ceux du budget d'investissement public.
Acheté en Chine, le car podium qui est long de 30 mètres, pèse près de 40 tonnes. Il dispose d'un espace de scène de 100 mètres carrés et peut se subdiviser en trois plateaux amovibles pour les besoins de concerts de musiques, les représentations théâtrales et les projections cinématographiques. Il comprend aussi deux loges et une cabine technique pour les différentes modulations des lumières, sons et fréquences.
Réagissant pour expliquer les motivations l'ayant conduit à opter pour l'achat dudit véhicule, la ministre de la Culture parle du souci de créer une proximité entre les publics et les spectacles; de régler les problèmes de location des équipements pour l'organisation des grands évènements culturels et la formation des artistes à l'utilisation du matériel de pointe.
Si on est d'accord avec le ministre de la Culture sur certaines possibilités en termes de déploiements qu'offre ce véhicule parce que disposant d'un groupe électrogène et un équipement permettant de recevoir une ligne Télécom, un émetteur Fm radio, une provision en écran géant, l'acquisition du car podium appelle plusieurs interrogations. Quelles en sont la pertinence et les motivations dans l'ordre des priorités et les interpellations auxquelles est confronté le ministère de la Culture ? Fallait-il privilégier l'achat d'un véhicule qui expose le public à diverses intempéries parce que ne pouvant offrir que des prestations scéniques en plein air, avec tout ce que cela comporte comme insuffisances en terme de sécurité. La nouvelle trouvaille d'Ama Tutu Muna, arrive dans un contexte de fin d'une année qui a été particulièrement dure, blanche et sèche pour les artistes. La plupart des festivals ont été sevrés des financements, malgré l'abondante sollicitude en direction du ministre. Les sociétés du droit d'auteur rasent toujours les murs attendant des financements pour l'organisation et le renouvellement des équipes dirigeantes arrivées en fin de mandat. Le festival national des arts et de la culture (Fenac), annoncé en grandes pompes pour se tenir cette année est renvoyé sine die. Comme si cela ne suffisait pas, une grosse partie des dettes (y compris les cachets des artistes) contractées dans le cadre de la dernière édition du Fenac de Maroua n'ont jamais été apurées.
La peau de chagrin des archives nationales et le musée national
Depuis des années, le Cameroun est mal loti en matière d'infrastructures et des lieux d'expression artistique. La maison de la culture qui tient lieu de centre culturel camerounais est l'ombre d'elle-même ; dans un état de désagrégation affligeant. Il n'existe au Cameroun, ni palais de la culture, ni salles de spectacles (musique, théâtre et cinéma). Les archives nationales sont dans un état de désintégration affligeant. Situé à proximité de l'ancien Palais présidentiel (rebaptisé Musée national), le vieux bâtiment colonial abritant les archives nationales du Cameroun, croule sous le poids de l'âge. Le Musée national quant à lui, déraille et broie du noir, dans une sorte de mélancolie qui doit fâcher le président Ahmadou Ahidjo dans sa tombe. Faute d'avoir une bibliothèque nationale, la Centrale de lecture publique est dans un état de délabrement. Tout en fermant les yeux sur ces préoccupations, la ministre Ama Tutu Muna a fait le choix d'un car podium qui va essorer le budget d'une somme de 30 millions de Fcfa, représentant les frais annuels d'assurance. De quoi aider les artistes ou les organisateurs de festivals ou autres évènements culturels. Grâce à une bonne planification, cette somme qui va être déboursée pour l'assurance, pourrait permettre la construction des salles de spectacles dans les dix prochaines années, on aura au moins un espace d'expression culturelle dans chacune des dix régions. Hélas.