Gabegie a la CRTV: Vamoulké croque plus de 15 milliards de FCFA en un an
YAOUNDE - 05 JUILLET 2010
© Labaran Mamouda | La Météo
Le rapport annuel 2009 de la commission financière de l'entreprise met à nu la gestion du directeur général. Malgré tout, il a reçu le quitus de bonne gestion du conseil d'administration
L'affaire donne le tournis à plusieurs membres du Conseil d'administration (Ca) de la Cameroon radio and télévision (Crtv). Alors qu'un rapport accablant produit par un collège constitué de Valentin Bayiha, Isidore Toudou et Chantal Nzié, tous membres d'une commission financière permanente prévue par la réglementation en vigueur et commise par le gouvernement pour passer au crible les comptes de la Crtv, un quitus a étrangement été donné au Directeur général (Dg) Ahmadou Vamoulké au cours d'un Ca tenu la semaine dernière. Dans ledit rapport, il est relevé un trou budgétaire total de 15 450 000 000 FCFA pour la seule année 2009. Le mode opératoire de ces détournements repose sur des surfacturations, des largesses envers les prestataires de service et autres trafics d'influence. Ces multiples fautes de gestion sont toutes tracées dans le cadre d'un travail qui consistait à la revue des comptes 2009, le contrôle de la conformité des actes de gestion, l'état des lieux de la Crtv et un contrôle de la gestion de la Cmca (Crtv marketing commercial agency).
L'une des premières fautes soulignées par les contrôleurs est que l'examen des comptes des tiers dans le chapitre des sommes dues par le personnel est 108 578 179 FCFA. Cet argent déchargé par les cadres de la maison a été fait sans aucun justificatif. Malgré l'instruction du Ca de la mise en débet des personnels qui n'avaient pas sacrifié à ce rituel, Amadou Vamoulké ne s'est pas exécuté. De même, l'analyse des comptes Fournisseurs fait ressortir entre autres le paiement des avances de ? consenties par le Dg à des prestataires de services. Ces avances sont évaluées à 1 602 194 667 FCFA alors même que l'entreprise est souvent confrontée aux tensions de trésorerie. Ce même chapitre présente les dettes de la boîte qui s'élèvent à près de 15 milliards de FCFA repartis comme suit: dettes fiscales, 2 117 348 647 ; dettes sociales, 6 121 055 88 ; fournisseurs, 6 121 055. 088 FCFA et autres dettes 56 615 230 FCFA. Ces pertes sont assorties d'un déficit de dotations aux amortissements. Toute chose qui justifie la désuétude du matériel de production.
La deuxième partie du rapport est consacrée au contrôle de conformité des actes de gestion. Là on y note la diminution du budget de l'office de 3 238 375 000 de FCFA. En cause, le reversement insuffisant par la Cmca des 60% de ses recettes comme le prévoit la réglementation. L'utilisation de subventions spéciales pour les évènements pour renforcer les performances budgétaires. La grande curiosité de ces subventions spéciales est qu'un évènement comme le match Maroc Cameroun à Fès en octobre 2009 a été financé par l'Etat à hauteur de 264 000 000 FCFA alors qu'il n'a pas pu être diffusé par la Crtv. De même, pour la Can 2010 en Angola, l'office a perçu de l'Etat un milliard de FCFA en plus des recettes publicitaires. En effet, cet argent a été reversé dans les lignes courantes de la Crtv pour booster les performances budgétaires qui s'élèvent à 92%. Sans cet argent le taux de réalisation du budget serait réduit à 62%, soulignent les enquêteurs.
Dans la pléthore de sommes indûment touchées par le Dg, une des plus flagrantes est la dotation irrégulière à laquelle il a droit, en même temps que les membres de la Commission de passation des marchés, alors qu'il n'en fait pas partie. A cela, s'ajoute le fait qu'Amadou Vamoulké signe lui-même ses ordres de mission en violation de la réglementation qui prévoie que c'est le Pca qui le fasse. Les contrôleurs notent que cette manœuvre vise peut-être a éviter qu'une autorité au-dessus ne réduise les charges liées à la mission.
La Commission financière fait en gros 32 observations (gestion Crtv et Cmca) sur la gestion financière de la société d'Etat. Plus de 21 parmi elles épinglent le management par Vamoulké. Les plus dures portent sur la signature des marchés après leur démarrage, la passation du marché de gardiennage avec une entreprise qui n'a pas d'agrément réglementaire, la rédaction des appels d'offres de marchés sans tenir compte du Code des Marchés, l'absence d'études préalables à tout appel à concurrence, les doubles emplois et des avantages excessifs des dirigeants de l'office. Tenez ! Plus de 16 000 000 FCFA de FCFA par an, pour le téléphone du dg et près de 5 000 000 FCFA par mois de carburant (cabinet et voitures personnelles). La commission déplore également une tenue irrégulière de la comptabilité. Tous des faits curieusement jugés insuffisants par le conseil d'administration pour refuser le quitus de bonne gestion au Dg de la Crtv. A ce rythme la Crtv ressemblera à l'Imprimerie nationale, la Sitabac et à un certain temps à la Sopecam qui ont eu pour manager à un moment de leur histoire, un certain Ahmadou Vamoulké.