PARIS (Reuters) - François Hollande a appelé de ses voeux vendredi à Dakar le thème de la fin de la "Françafrique", invitant les Africains à se prendre en main pour construire "le continent où se jouera l'avenir de la planète".
Cinq ans après les propos controversés de Nicolas Sarkozy sur "l'homme africain" qui, à ses yeux, n'était "pas assez entré dans l'Histoire", le président socialiste s'est exprimé à l'Assemblée nationale sénégalaise pour une forme de réponse implicite.
Ce "discours méprisant" de l'ancien président avait "heurté les mémoires anticolonialistes", résumait vendredi le journal sénégalais "Le Quotidien", qui titrait en un jeu de mots "Franc soit Hollande!".
Sans référence directe à cet épisode, le président français élu en mai s'est montré désireux de jeter les bases de nouveaux rapports entre Paris et ses anciennes colonies, thème récurrent des discours des présidents français sur le continent noir.
"Le temps de ce qu'on appelait autrefois 'la Françafrique' est révolu. Il y a la France et il y a l'Afrique. Il y a le partenariat entre la France et l'Afrique, avec des relations fondées sur le respect, sur la clarté et sur la solidarité", a-t-il dit sous les applaudissements des députés.
"Les émissaires, les intermédiaires et les officines trouvent désormais porte close à la présidence de la République française comme dans les ministères", a-t-il assuré, affirmant que Paris "ne fera pas obstacle" aux efforts menés par les Africains pour récupérer les "biens mal acquis" par certains de leurs anciens dirigeants.
La "Françafrique", appellation reprise de certains pamphlets, désigne un système d'influence de la France sur ses anciennes colonies reposant sur la corruption, la prééminence de grandes sociétés et l'appui à des régimes autoritaires.
Désireux de parler à l'Afrique "sans ingérence mais avec exigence", le président français a invité les Africains à être "fiers" de leur parcours.
"Si l'Afrique, berceau de l'humanité, parvient à faire vivre pleinement la démocratie, partout et pour tous, si elle réussit à vaincre ses divisions, alors l'Afrique sera le continent où se jouera l'avenir de la planète", a-t-il prédit.
Parmi ses priorités figurent la défense de la démocratie et des droits de l'homme, a-t-il assuré. "Il n'y a pas de développement ni de vrai progrès social sans démocratie", a-t-il dit, saluant sur ce point l'exemple sénégalais.
FRANCOPHONIE
Il compte reprendre ces thèmes samedi à Kinshasa, au XIVe sommet de la Francophonie. Il y rencontrera le président Joseph Kabila, à la tête d'un pays dont François Hollande a qualifié en début de semaine d'"insoutenable" la situation des libertés fondamentales.
"Parler une langue, la langue française qui est ici une langue africaine, c'est aussi transmettre des valeurs, porter des messages, inspirer des peuples", a-t-il dit dans son discours. "Faisons en sorte que ceux qui la parlent aient une chance de plus que les autres".
Fil rouge de sa première tournée en Afrique, la situation du Mali voisin est au coeur des discussions, à l'heure où le Conseil de sécurité de l'Onu examine une nouvelle résolution préparant le déploiement d'une force panafricaine dans ce pays dont la moitié nord est contrôlée par des islamistes radicaux.
"Ce sont les Africains, les pays concernés, les organisations régionales comme l'Union africaine qui vont décider ensemble de ce qu'il convient de faire, et nous les appuierons", a expliqué François Hollande lors d'une conférence de presse avec son hôte sénégalais, Macky Sall.
A Dakar comme sur l'île de Gorée, le président français a reçu un accueil chaleureux de la part des Sénégalais, qu'il a salués dans la matinée à bord d'une limousine décapotable aux côtés de Macky Sall, lui-même arrivé au pouvoir en mars.
"Je me souviendrai longtemps de votre accueil", a dit le président à l'Assemblée.
Accompagné de plusieurs ministres dont ceux des Affaires étrangères et de l'Outre-Mer, Laurent Fabius et Victorin Lurel, il s'est ensuite rendu à Gorée, lieu de mémoire de la traite négrière situé au large de Dakar.
Egalement présente, sa compagne Valérie Trierweiler est restée discrète en pleine polémique liée à la publication d'une biographie la concernant et pour laquelle elle a porté plainte pour diffamation et atteinte à la vie privée.
Edité par Thierry Lévêque