France - Guinée équatoriale : Vers la rupture des relations diplomatiques

France - Guinée équatoriale : Vers la rupture des relations diplomatiques

France - Guinée équatoriale : Vers la rupture des relations diplomatiques  Le mandat d'arrêt international contre le fils du président de Guinée équatoriale, Teodorin Nguema Obiang Mangue est à l’origine d’une menace de rupture des relations diplomatiques et de représailles sur les entreprises françaises implantées en Guinée équatoriale.

Les Autorités de Malabo se disent «surprises» et «profondément préoccupées» par le fait que deux juges français, René Grouman et Roger Le Loire, aient sollicité un mandat d'arrêt international contre Teodoro Nguema Obiang Mangue, ministre d'État de l'Agriculture et des Forêts, pour un délit présumé de blanchiment et de «biens mal acquis» sur le territoire français. Dans un communiqué officiel qualifié de «très important», le gouvernement équato-guinéen a laissé entendre que jusqu'à présent  et depuis 1968, la Guinée équatoriale maintenait «avec la République française d'excellentes relations d'amitié et de coopération», et que «les deux pays ont souscrit d'importants accords en matière de coopération, d'investissements réciproques et de protection mutuelle des biens et des personnes.»

Provocation et Droit d’agir en réciprocité

Dans ce communiqué, le gouvernement équato-guinéen évoque «le faible sens professionnel des juges» et de la police française lors de la perquisition de l'immeuble parisien, situé sur la très chic avenue Foch, dans le 16e arrondissement de Paris. Les magistrats français avaient relancé l'enquête pénale sur ce dossier en diligentant le 14 février dernier une perquisition dans l'appartement de Teodoro Nguema Obiang Mangue. Le gouvernement équato-guinéen a qualifié de «traitement brutal» et d'«action illégale» cette perquisition réalisée «en violation flagrante de la Convention de Vienne sur la protection des missions diplomatiques».

Dans une lettre transmise à la chancellerie française, le ministre de la justice équato-guinéen, Francisco Javier Ngomo Mbengono, avait  qualifié cette opération d'«intrusion illégale dans des locaux diplomatiques ». Au terme de cette perquisition longue de dix jours, des oeuvres d'art et des vins fins avaient été extraits pour plusieurs millions d'euros. L'immeuble avait été évalué à 150 millions d'euros. Le gouvernement équato-guinéen se dit «conscient du fait que la seule action des juges, des autorités et des agents français est de provoquer une déstabilisation interne en Guinée équatoriale». Dans la mesure où «aucune représentation de la société équato-guinéenne n'a entrepris aucune action revendicative contre la violation des droits du peuple...».

Les avocats de Transparency International et de Sherpa sont accusés d'être «liés et de maintenir des liens étroits avec les mercenaires d'Elil Kalil, entre autres, qui voulaient envahir la Guinée équatoriale pour accéder à ses ressources pétrolières...». Le communiqué officiel ressemble à une  menace à peine voilée : «Si la France souhaite rompre ses relations avec l'État équato-guinéen, de manière unilatérale, elle doit le déclarer ouvertement...». Les propos utilisés dans le communiqué équato-guinéen  révèlent le degré de mécontentement de Malabo: «Face à cette provocation ouverte contre l'État équato-guinéen», le gouvernement équato- guinéen affirme qu'il «se réserve le droit d'agir en réciprocité». Ce qui est prévu par la Convention de Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques. La réciprocité constitue  un moyen efficace qui incite les États à respecter les règles de la Convention.

Les entreprises françaises dans le collimateur

En ce qui et concerne les entreprises françaises établies en Guinée équatoriale, le communiqué gouvernemental de Malabo les contraint presque à «condamner cette action, ainsi que réparer et partager les conséquences négatives dérivées de cette situation...»  Une véritable épée de Damoclès sur  des entreprises telles que Bouygues, Orange ou la Société générale. Les magistrats français sont persuadés  qu'il existe des soupçons de fraude dans l'acquisition d'un très important patrimoine, notamment immobilier, en France par Teodorin Obiang. Saisis depuis 2010 d'une information judiciaire  pour «recel de détournement de fonds publics», validée par la Cour de cassation en 2010, ces magistrats soupçonnent que les biens ont été achetés avec des fonds publics équato-guinéens pour un profit privé.

Controverse : immeuble privé ou  bien diplomatique ?

Me  Olivier Pardo avait  convaincu le ministre de la justice équato-guinéen, Francisco-Javier Ngomo Mbengono, d’écrire à son homologue français pour qu'il saisisse la chambre d’instruction de la Cour d’appel de Paris. Dans l’optique d’annuler l'action des deux juges français. En plus d’une plainte en diffamation contre Daniel Lebègue, président de Transparency International France, les conseils de la Guinée équatoriale avaient  déposé un recours en annulation concernant les 16 berlines de luxe du fils Obiang, saisies en septembre 2011.

Le Quai d'Orsay avait assuré que l'immeuble ciblé par les juges «relevait du droit commun», mais dans son courrier, M. Ngomo Mbengono affirmait  que son pays avait déclaré l'immeuble comme étant affecté à sa mission diplomatique en octobre 2011. Pour les autorités équato-guinéennes, le fils du président Obiang Nguema avait  bien acquis cet hôtel en 2004, mais  il l'avait revendu à l’Etat équato-guinéen en octobre 2011. Malabo avait  déclaré ce bien auprès de la France comme mission diplomatique. Ce que conteste le ministère français des Affaires étrangères.

Le président Obiang Nguema Mbasogo avait  par ailleurs annoncé en septembre 2011 la nomination de son fils comme délégué permanent adjoint de Guinée équatoriale auprès de l'Unesco, fonction qui devrait lui conférer l'immunité diplomatique et lui permettre d’échapper  aux actions déclenchées en ce moment contre sa personne. Le but des privilèges et immunités n’est pas de donner avantage à certains individus, mais d'assurer l'accomplissement efficace des fonctions des missions diplomatiques.

© La Nouvelle Expression : Edmond Kamguia K.


16/04/2012
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