France-Cameroun: Georges Clément Meka " Les manifestants contre Biya sont les ennemis des camerounais établis à l’étrangers"
Monsieur Georges Clément Meka, président sortant du conseil social des camerounais de l’Extérieur (Cosce, Ndlr) et président en exercice du Haut conseil des ressortissants d’Afrique centrale (Hcrac), s’est confié à Tam-tam Média pour évoquer la visite de travail en France de Monsieur Paul Biya le président camerounais et les manifestations prévues contre cette arrivée.Lisez plutôt
Tam-tam Média (TTM) : Paul Biya est invité par son homologue français, François Hollande. Que pensez-vous de cette rencontre à l’heure où la politique française déclare vouloir en finir avec les réseaux France-Afrique ?
Georges Clément Meka (GCM) : Je vous remercie de l’opportunité que vous me faites. Il est important de préciser que le Cameroun est un Etat souverain au même titre que la France. Ces deux pays ont une longue histoire d’amitié, empreinte de péripéties comme toute relation humaine. Cette visite est nécessaire pour les deux pays au regard des relations bilatérales qu’ils ont toujours entretenues. A mon sens, je n’y vois aucune connotation « France-Afrique ». Il s’agit simplement de deux pays qui ont des intérêts communs.
TTM : Nous avons appris que la diaspora camerounaise s’organise pour manifester contre cette arrivée. Pourquoi ce mécontentement ?
GCM : En qualité de président du Cosce, j’ai souvent dénoncé ce genre de manifestations, qui pour moi, donnent une piètre image des camerounais établis à l’étranger. Nous attendons mieux de notre diaspora. Je tiens toutefois à informer que ces rassemblements sont l’œuvre d’une minorité de personnes. Ils ne sont donc pas représentatifs de notre communauté à l’étranger.
TTM : Parallèlement à ces manifestations, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), le parti au pouvoir, aurait lancé un appel pour organiser l’arrivée du président Biya. Qu’en est-il réellement ?
GCM : c’est exact. Je vous rappelle que le RDPC est au pouvoir et c’est le premier parti politique du Cameroun. C’est donc notre devoir d’organiser l’arrivée de notre grand camarade.
TTM : Face aux opposants, le RDPC, le parti au pouvoir, aurait prévu lancer une contre-manifestation...
GCM : Je ne suis pas informé. Comme la plupart des camerounais, j’ai lu que la section RDPC France-Nord appelait à accueillir le président de la République. C’est un appel civique, mais je m’interroge toutefois sur la légitimité du parti,- fut-il au pouvoir-, à adresser un tel message aux camerounais établis à l’extérieur, non membres du parti. Il ne serait pas superfétatoire de rappeler que Paul Biya a été, dès son élection et sa prestation de serment, le président de tous les camerounais et il n’est pas reçu en France en qualité de président d’un parti. A mon avis, il serait plus constitutionnel que l’information soit délivrée par les missions diplomatiques, chargés de convoquer la communauté camerounaise. Cette mission ne relève pas du président de section d’un parti. Toutefois, ce point de vue ne dénigre en rien le président de la section dont j’apprécie les qualités humaines.
TTM : Vous dénoncez l’appel de la section RDPC France-Nord alors que vous en êtes vous-même membre. Cela parait paradoxal !
GCM : Non, je ne dénonce pas l’appel. Mais je garde néanmoins mes convictions. Ma critique se dirige plutôt vers le fonctionnement général de nos institutions et le comportement de certains qui en ont la charge. Comment expliquez-vous que ce soit le président de section d’un parti qui annonce à la communauté l’arrivée de leur président et sollicite leur présence à l’ambassade? Comment expliquez-vous que les organisations indépendantes qui échappent à une main mise n’ont pas souvent été conviées pour aborder des questions essentielles concernant la diaspora ? Comment expliquez-vous, qu’au lieu d’anticiper et régler les problèmes de communication avec la petite franche de la diaspora qui manifeste à chaque arrivée du Président, on opte toujours pour l’improvisation et l’agitation, avec son coût exponentiel.
TTM : Que voulez-vous dire ?
CGM : Je veux dire que le Cosce, sous ma présidence, a fait des propositions en faveur de nos compatriotes qui se sentent exclus et incompris, et qui profitent de chaque sortie du président pour manifester ce mécontentement. Ces propositions sont restées lettres mortes. Je constate tristement que cette situation, qui n’arrange pas le Président Paul Biya - car il est la cible des agitateurs - arrange d’autres qui profitent de ce climat.
TTM : Quelle solution avez-vous préconisé dans ce rapport adressé aux responsables ?
GCM : Le rapport attire l’attention sur le fait que les personnes qui manifestent pour ou contre, aussi bien celles qui sont neutres, sont toutes Camerounaises. Par conséquent elles méritent qu’on prête attention à leurs revendications. Nous avons pour cela préconisé une conférence des présidents des organisations leaders, proposé la mise en place de la maison du Cameroun et le règlement des problèmes subjacents à toutes ces manifestations, qui ne sont pas le fait du Chef de l’Etat Paul Biya, mais de certaines cadres du gouvernement ou anciennes personnes de son entourage, mais que le Président peut régler de manière définitive.
TTM : Pourquoi ces propositions n’ont-elles pas été entendues ?
GCM : Vous savez, il y a toujours eu des pêcheurs en eaux trouble. Le Cameroun reste le Cameroun. Malheureusement certains sont encore préoccupés par leurs propres intérêts au détriment de ceux de la collectivité nationale. Une relation pacifiée entre le Président Paul Biya et toute sa diaspora, c’est la fin de certains avantages pour eux.
TTM : A vous entendre, les manifestants feraient le jeu de ces personnes ?
Qui sont au contact régulier des camerounais à l’extérieur ou à
l’intérieur du pays et qui causent la souffrance des usagers? « Les
autres ».
Qui est susceptible d’accorder aux Camerounais de l’extérieur ce qu’ils souhaitent ? Paul Biya.
TTM : Que conseillez-vous donc à cette partie de la diaspora qui manifeste ?
GCM : Je reste fidèle à mes convictions et à mon
engagement républicain. Le Cameroun est une jeune démocratie qui se
construit. Il est impératif pour le Président Paul Biya et le
gouvernement de tenir compte des mutations en cours et des qualités de
sa jeunesse. Les manifestants, pro ou contre, ainsi que la majorité
silencieuse attendent des actes. Ils veulent participer à la
construction du Cameroun, à travers la gestion du pouvoir. Il n’est plus
envisageable que les mêmes personnes, choisies dans la même tranche
d’âge et dans les mêmes cercles, tiennent tous les leviers du pouvoir au
Cameroun, dans un monde où on voit les jeunes de quarante, voire de
trente ans, ministres ou chef d’Etat. La politique reste une affaire de
conviction. Elle n’est pas une affaire de diplômes. Nos villes, nos
villages, nos marchés,…. regorgent d’hommes et de femmes capables
d’occuper ces postes au même titre que certains agrégées et docteurs. Le
président de la République et les membres du gouvernement doivent leur
faire confiance.
Pour mes sœurs et frères qui manifestent ou qui envisagent de le faire,
je leur propose de vaquer à leurs occupations. Manifester ne sert
aucunement nos intérêts. Qu’avons-nous récolté depuis ? Les années à
venir vont être déterminantes pour nous et pour le Cameroun. Nous devons
nous préparer. Cela passe par une meilleure organisation de la
diaspora et une synergie d’actions. Je dénonce avec la plus grande
fermeté les comportements des politiques ou citoyens qui visent à ternir
l’image de notre pays et à retarder le progrès collectif.