Fichier électoral: Elecam inscrit dans les bars à Yaoundé

DOUALA - 22 OCT. 2012
© Souley ONOHIOLO | Le Messager

Dans sa course folle de battre le record de sept millions d’inscrits aux prochaines échéances électorales, Elecam ne lésine pas sur les moyens de se rapprocher des électeurs en leur faisant la cour aussi bien dans les bars que le jour du dimanche.

Quartier Mvog-Ada, le 21 octobre 2012. Il est un peu plus de 10 heures. Depuis quelques minutes, une ambiance particulière s’observe dans un bar qui partage sa proximité avec le collège Ndi Samba. Les mouvements de va-et-vient de la foule indiquent bien que tous ceux qui entrent dans ce « haut lieu » de beuverie ne sont pas forcément des personnes qui viennent étancher leur soif. Une fois devant le bar, l’on peut lire sur un tableau noir, des mentions à la craie blanche : « Elecam, inscriptions sur les listes électorales ; ici dans le bar ». A l’intérieur, trois jeunes gens dont deux dames, s’affairent derrière un kit à enregistrer les données liées à l’inscription des potentiels électeurs qui, tour à tour, se laissent guider. A la fin de chaque opération, un récépissé est délivré au nouvel inscrit. « Vous aurez votre carte d’électeur au mois de décembre. Après une inscription, un délai de quarante jours est prévu pour cela », martèle à chaque fois, l’un des membres du trio.

Pour satisfaire sa curiosité, le reporter du Messager qui se souvient ne s’être pas encore inscrit, est reçu à son tour. « Tous les habitants de l’arrondissement de Yaoundé 5 peuvent s’inscrire ici ; chacun en fonction de son quartier, il sera indiqué son bureau de vote. Mais le retrait des cartes d’électeurs se fera exclusivement à la base où est installée l’antenne communale », explique l’opératrice de saisie. Quant à savoir pourquoi des opérations d’inscription dans le bar et même le dimanche, les membres de l’équipe sont peu bavards ; surtout que Mme Meguini Ebanda Marie Claire, la présidente de l’antenne communale de Yaoundé 5, avait au cours d’un reportage réalisé par Le Messager, indiqué que les inscriptions sur les listes électorales avaient lieu, tous les jours ouvrables, de 8 heures à 17 heures et le samedi, de 8 heures à midi. « Quant à savoir pourquoi dans un bar, il s’agit des instructions du chef qui nous a installés ici. Nous inscrivons le dimanche, à la demande du chef du quartier, surtout pour satisfaire les gens qui n’ont pas le temps toute la semaine », affirme-t-on.

Souley ONOHIOLO


Focal: Quid de crédibilité et de la légalité !

Hier dimanche, il est certes vrai que l’ambiance n’était pas chaude ; il n’y avait pas assez des disciples de Bacchus ; le processus d’inscription semblait se dérouler normalement. Par conscience professionnelle, les trois membres n’avaient du temps que pour leur travail ; mieux, ils étaient peu diserts et dégageaient la ferme volonté d’inscrire ceux qui le souhaitaient. Il n’en demeure pas moins que l’on peut s’interroger sur la fiabilité et la crédibilité de cette opération d’inscription sur les listes lorsque l’ambiance est chaude et que dans le bar, grouillent des consommateurs ayant pris un verre de trop.


Quelle confidentialité peut-on concéder à ces inscriptions ?

Par ailleurs, le débat sur l’illégalité des inscriptions entre octobre et février bat son plein car la loi électorale stipule que ces opérations doivent se faire entre janvier et août 2012. Pour beaucoup, Elecam se présente donc comme une institution qui piétine allègrement les lois, au point de violer même les siennes. Puisque le directeur général des élections clame sur toutes les antennes de télévision et dans les colonnes de journaux que les inscriptions ne se font pas les jours fériés. Même si c’est pour glaner quelques électeurs, faut-il se positionner indéfiniment comme élément délictueux ?

S.O.


Refonte des listes électorales: Elecam promet des procès contre les inscrits multiples

Les indélicats risquent des peines privatives de liberté d’environ un an.

«Partout où je suis passé, le procureur de la République m’a dit qu’Elecam doit s’apprêter à venir témoigner devant la barre contre les personnes qui vont s’inscrire plus d’une fois sur les listes électorales ». Ces propos sont de Samuel Fonkam Azu’u, président du Conseil électoral d’Elecam. C’était le 17 octobre dernier dans la salle des actes de la mairie de Ndop, dans le département du Ngoketunja, région du Nord-Ouest, quatrième étape de la tournée qu’il y a entreprise le 9 octobre courant. Laquelle tournée vise essentiellement à sensibiliser les populations sur les modalités d’inscription sur les listes électorales. Le président du Conseil électoral a rappelé qu’il s’agit d’une refonte, et par conséquent, invite toutes les personnes sans exception ayant atteint la majorité électorale à s’inscrire sur les listes électorales. Traduction, aucun fichier n’existe plus, les anciens hérités du Minatd ne seront plus pris en compte.

D’où l’obligation pour toutes les personnes ayant atteint au moins 20 ans à s’inscrire. Toutefois, ceux qui ont moins de 20 ans et qui pourront atteindre la majorité d’ici les prochaines consultations peuvent s’inscrire par anticipation. Le personnel en charge des inscriptions appréciera ces cas sur le terrain. Il a précisé à chacune des étapes de sa tournée, qu’il s’agit de l’inscription biométrique, bien différente des précédentes. Car les empreintes digitales et la photo des inscrits sont prises en considération. Les récépissés sont remis instantanément. Même si un toilettage permettra d’éliminer les doublons, Dr Samuel Fonkam Azu’u, met en garde tous ceux qui vont s’inscrire plus d’une fois.
Ceux-ci, a-t-il précisé, vont faire face à la justice. Ils encourent des peines privatives de liberté allant de 3 mois à un an, selon les dispositions des articles 122 et 123 du code pénal. « Les gens vont aller en prison car le procureur de la République nous a dit de venir témoigner au tribunal », au cas où ils s’inscrivent plus d’une fois. Il ajoute « au Nigeria où j’étais, il y a quelques temps pour m’imprégner de leur système d’inscription biométrique, ceux qui s’inscrivaient plusieurs fois, allaient directement au tribunal s’expliquer ». Les cartes d’électeurs seront distribuées 40 jours après l’inscription. Si le débat ne porte plus sur la périodicité prévue par la loi pour les inscriptions sur les listes électorales, certains responsables de la société civile et des partis politiques dont l’ancien député Emmanuel Yoyo ont décrié l’inscription à double vitesse : actuellement dans les chefs-lieux de régions et à une date non encore indiquée dans l’arrière pays. Ce qui à leurs yeux est une injustice.

A ce sujet, le président du Conseil électoral est d’avis que dans l’arrière-pays, les gens sont plus organisés qu’en ville où le processus semble complexe aussi bien à l’inscription qu’à la distribution, voire, le jour du vote. C’est pour cette raison, et du fait qu’il y avait moins de kits au départ, et que le contrat avec la firme allemande courait à son terme, qu’Elecam a préféré commencer dans les chefs-lieux de régions où la densité de la population est importante. Interpellé sur une possibilité de moratoire pour l’arrière-pays comme principe d’équité afin de rattraper les faveurs de délais accordées aux chefs-lieux de régions, Samuel Fonkam Azu’u est formel. « Pas de moratoire pour les zones rurales. Les problèmes d’inscription et de distribution des cartes électorales se posent avec beaucoup plus d’acuité dans les grands centres : Douala, Yaoundé et les autres chefs-lieux de régions. Donc, en commençant dans ces grands centres, nous apportons une solution à un vécu presque quotidien. Les zones rurales de notre pays ne posent presque pas ce genre de problème parce qu’elles sont mieux organisées. Donc, il n’y aura pas de moratoire pour elles et je crois que le président de la République convoquera le corps électoral en tenant compte de tous ces paramètres ». Malgré les explications apportées par le président du Conseil électoral, Emmanuel Yoyo attend de voir les opérations débuter dans le Ngoketunja : « C’est à ce moment-là que je pourrais tirer ma conclusion. Mais déjà, je ne suis pas satisfait du fait qu’on ait commencé les inscriptions ailleurs et dans d’autres endroits (comme ici à Ndop) dans le même pays, les inscriptions n’ont pas démarré », conclut l’ancien député.

Donat SUFFO à Ndop


22/10/2012
0 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 299 autres membres