FECAFOOT : TOMBI À ROKO, PROGRAMMÉ POUR GAGNER

 

Cameroun,Cameroon - FECAFOOT : Tombi à Roko, programmé pour gagnerGrâce au soutien de Blatter, de Joseph Owona et des faucons du système Iya, l’actuel secrétaire de la Fédération camerounaise de football est promis à la présidence. Mais des voix s’élèvent dans le milieu du football pour dénoncer son inconsistance.

 

L’Assemblée générale extraordinaire de la Fédération camerounaise de football (Fecafoot) du 23 août 2014 a fini de convaincre les derniers sceptiques sur le destin présidentiel de l’actuel secrétaire général. Les nouveaux statuts et code électoral de la Fecafoot, proposés par le Comité de normalisation et adoptés au cours de ce conclave, ménagent à Tombi à Roko un couloir de velours vers la présidence. Cheville ouvrière, disque dur depuis 2009, héritier du système Iya au sein de l’instance faîtière du football, le secrétaire général en poste de la Fecafoot n’est pas interdit de candidature à la tête du comité exécutif, et rien ne l’oblige à démissionner de ses fonctions avant d’être candidat.

 

Ironie du sort :

le code électoral prévoit que les candidatures à la présidence de la Fecafoot soient déposés auprès du … secrétaire général. Tombi à Roko dirigera donc le prochain processus électoral d’un bout à l’autre, comme il dirige la Fecafoot depuis plus de 5 ans. Juge et partie, donc. Un avantage que ce fils du Mbam met jalousement à profit, sûr de son futur destin, comme s’il était gravé dans le marbre de l’inéluctable. C’est que Tombi à Roko est d’abord le choix de Joseph Sepp Blatter. Envoyé à Zurich pour dénouer la crise brûlante à la Fecafoot à la mi-2013 après l’interpellation du président Iya Mohammed, René Sadi, le Minatd et émissaire du chef de l’Etat, s’entend dire par le président de la Fifa des paroles sans équivoque, qu’il mentionnera dans son rapport à Paul Biya : « Proposez qui vous voulez, mais il faut maintenir Tombi à Roko ».

 

René Sadi sera d’ailleurs soupçonné par les collaborateurs du Président commis à l’exploitation de son rapport de vouloir protéger son « frère du Mbam » en attribuant à Sepp Blatter des propos aussi favorables au secrétaire général de la Fecafoot. Mais il n’y avait rien de plus vrai, comme les recoupements permettront de s’en rendre compte. C’est avec le Comité de normalisation que Tombi à Roko assoit son emprise sur une Fecafoot qu’il croit avoir reçu en héritage. Son mentor Iya Mohammed mis aux arrêts, son SG a le devoir de protéger le système, d’en assurer la survivance.

L’arrivée de Joseph Owona ne sera pas une menace de longue durée. Malgré les mots durs qu’il prononce dès sa prise de fonctions à la tête du comité de normalisation le 22 juillet 2013 – « la Fecafoot vaudou, c’est fini » –, l’ancien ministre des Sports se plie rapidement aux arguments de Tombi à Roko, qui continue à tenir les rênes de la Fecafoot. Quelques mois plus tard, Joseph Owona devient l’avocat le plus irréductible du secrétaire général de la Fecafoot, à qui il trouve beaucoup de vertus et de mérite. Il le considère dorénavant comme indispensable au bon fonctionnement de la fédé.

 

« Pourquoi vous êtes-vous associé à Tombi à Roko », demandera un responsable de la Primature à l’ancien SGPR. « On me l’a imposé », répondra-til. Il n’en dira pas plus, mais on devine aisément que la Fifa a pesé une fois de plus de son poids. En effet, quand Joseph Owona prononce ses premiers mots de président du comité de normalisation, le 22 juillet 2013, il reste à Tombi à Roko six jours seulement de mandat de SG. Son contrat de quatre ans a été signé le 28 juillet 2009 et s’achève le 28 juillet 2013. Dans ce contexte de désactivation du système Iya, la rupture du contrat de Tombi à Roko, qui peut se prolonger par tacite reconduction, semble actée.

 

Mais c’est l’inverse qui se produit. Choisi pour nettoyer les écuries d’Augias, Joseph Owona en conserve le rouage central. Celui qui en quatre ans a activé toutes les sorties de fonds de la Fecafoot et inspiré toutes les décisions, dont la suspension de Samuel Eto’o Fils et la défiance du chef de l’Etat.

 

SOUTIEN

Cette bienveillance accompagne le secrétaire général de la Fecafoot tout le long du mandat du comité de normalisation. Quand Joseph Owona procède à une chasse aux faux diplômes dans la maison, il épargne bizarrement Tombi à Roko. Pourtant dans son dossier ne figure aucune pièce officielle, même pas une photocopie de sa carte nationale d’identité. Seul est présent son contrat de SG de la Fecafoot. On peut y lire que son salaire mensuel est de 1,7 million, assorti de 200 000 francs de frais de carburant et 170 000 de frais de communication.

 

Soit un revenu mensuel de près de deux millions de francs CFA. Quand en début août Joseph Owona décide de rendre publique la liste de quelques débiteurs de la Fecafoot, le nom de Tombi à Roko échappe miraculeusement. Mais seront jetés à l’opinion publique les noms de quelques futurs candidats présomptifs à la présidence de la Fecafoot comme Abdourhamane, ancien chef de cabinet d’Iya Mohammed en rupture de ban. Pourquoi avoir ressorti les conclusions d’un rapport rendu par Bekolo and Partners à l’époque d’Iya Mohammed ? La manoeuvre était manifestement de construire l’inéligibilité de certains adversaires en les impliquant dans de supposées malversations financières, répondent en choeur les habitués de l’association de Tsinga.

 

La volonté de Joseph Owona de baliser la voie à son pupille est encore plus évidente au regard de la constitution du corps électoral dans la perspective des élections du 29 novembre. L’objectif est celui de la construction d’une majorité des 92 délégués à l’Assemblée générale qui seront choisis dès le 10 novembre. L’arme des clubs amateurs est fatale. Sur les 92 délégués à l’AG, 50 sont issus des dix Régions du pays. Si un candidat s’adjuge ces voix, sa victoire est assurée. Voilà pourquoi le camp Tombi à Roko s’est échiné à éliminer les forces contraires, c’est-à-dire les présidents de clubs amateurs soupçonnés de ne pas jouer le jeu.

 

Le cas le plus emblématique est celui de l’ancien Lion indomptable Eugène Ekeke, dont le club a été suspendu puis réhabilité sous la pression du Comité olympique et sportif, mais qui reste lui-même suspendu jusqu’à nouvel ordre. Quatre autres dirigeants de clubs sont frappés de la même déchéance. En revanche, les partisans de Tombi à Roko ont créé de nombreux clubs amateurs, à tel point que certains observateurs prévoient déjà une mainmise du secrétaire général de la Fecafoot sur les 4/5ème du corps électoral. Dans cette optique, les élections du comité exécutif du 29 novembre, quelle que soit leur transparence, auront donc déjà été jouées à l’avance.

 

Même si Tombi à Roko n’a pas annoncé sa candidature, le partage des postes a déjà eu lieu. En marge du match comptant pour la coupe de la CAF joué et lourdement perdu, le 9 août, à Garoua par Coton Sports devant AC Leopards de Dolisie, le camp du SG de la Fécafoot a tenu une réunion pour déterminer le ticket de campagne électorale. Ce sera Tombi à Roko et Alim Konaté, frère de Iya Mohammed, tout puissant président de la commission de marketing et actuel président de la régionale du Nord. L’autre variante du ticket gagnant est Tombi à Roko et Boubakary Bello, ancien inspecteur de police, ancien putschiste devenu prospère homme d’affaires et président de la ligue régionale de l’Extrême-Nord.

 

CONTESTATIONS

Si la victoire prochaine de Tombi à Roko semble pour lui inscrite dans l’ordre normal des choses, plusieurs voix s’élèvent contre ce qu’elles considèrent comme un hold-up. Beaucoup se souviennent que Tombi à Roko, jeune pompiste dans une station-service Shell à Douala, est arrivé dans les bagages de David Mayebi de l’Association des footballeurs professionnels (AFC). Le SG a depuis tué le père et construit une trajectoire qui l’a conduit à la tête de la commission des arbitres. En juillet 2009, après les expériences Jean Lambert Nang et Patrick Prêcheur comme DG, Iya Mohammed supplie les membres du comité exécutif d’accepter la candidature de Tombi à Roko comme SG.

 

Devenu homme lige de l’ancien président de la Fecafoot, Tombi à Roko en assume le bilan. C’est donc à lui que ses contempteurs demandent des comptes sur le contrat avec Puma dont les termes ne sont pas connus, sur la construction du siège de la Fecafoot – chantier en arrêt – et plus généralement sur les retombées de la Coupe du monde 2010. Ses pourfendeurs voient aussi sa main derrière le staff actuel des Lions indomptables. Le nouveau médecin de l’équipe nationale, Philémon Tamo, est notoirement son ami et son partenaire d’affaires. Et font remarquer que son ami Maxime Nana est agent de 11 des joueurs convoqués par Volker Finke pour les matches contre la RDC et la Côte d’Ivoire.

 

© Repères : Parfait N. Siki


04/09/2014
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