Dans son récent ouvrage « Au Cameroun de Paul Biya », la journaliste française a consacré quelques pages à la presse Camerounaise. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’elle lui accorde peu d’estime.
« Si sous Ahidjo la pensée dissidente a été réprimée, il ne semble plus y avoir de pensée du tout, après trente années de régime Biya », écrit Fanny Pigeaud dans le chapitre 7, « La mise à l’écart de la pensée », de son récent livre, « Au Cameroun de Paul Biya », qui continue d’alimenter le débat dans les chaumières. Et selon l’ancienne correspondante de l’Agence France-presse et du quotidien Libération au Cameroun, la faute en partie aux médias, accusés de ne pas entretenir « de réelle pensée critique », malade qu’ils sont tout à la fois d’un « manque d’indépendance, d’une absence de compétence, de problème financier chronique et d’un déficit d’éthique. »
Pour arriver à cette conclusion, Fanny Pigeaud s’est attardée sur les contenues des journaux, des radios et télévisions camerounaises. Et c’est aux médias d’Etat qu’elle a porté les premiers coups. Ainsi de son point de vue, « le quotidien Cameroon Tribune et la Cameroon Radio-Television (CRTV) existe essentiellement pour assurer la propagande du Rdpc et de son président, Paul Biya ». Une propagande constate Pigeaud, qui se fait dans des papiers souvent « totalement incompréhensibles et sans information».
Les médias privés de leur côté, « ne s’en sortent pas vraiment mieux ». La journaliste française indique par exemple que la presse écrite sans exception est truffée de « fautes d’orthographes, de grammaires, y compris dans les titres de Une, l’expression (y) est souvent approximative, la hiérarchisation de l’information aléatoire, les illustrations hasardeuses», comme cette Une de Mutations qui s’est appuyée le 12 avril 2011 sur un photomontage circulant depuis sur le Net, pour illustrer l’arrestation de Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire.
Précarité
En outre assène la journaliste française, ces patrons de presse qui accordent très peu de moyens pour la réalisation des enquêtes et des reportages, ne rechignent pas par contre a accepter des financements douteux. Ils ont par exemple été achetés en 2007 par l’homme d’affaire français, Vincent Bolloré, alors que son entreprise était citée dans une vaste affaire de corruption au Port autonome de Douala, croit savoir Pigeaud. « Maltraités par leurs employeurs, beaucoup de bons journalistes ont quitté la profession ou le pays. Les autres se prêtent pour la plupart à de nombreuses compromissions pour survivre. ». D’où la généralisation de la pratique du « gombo ».
Des écrits qui ont visiblement courroucé Alain Blaise Batongué qui n’a pu s’empêcher de réagir. Dans une note de lecture, le directeur de publication de Mutations qualifie l’ouvrage de Pigeaud de « ragots de bistrots ». « On comprend difficilement par exemple, qu’elle évoque la situation de la presse camerounaise, qu’elle en donne des informations sans citer ses sources et sans avoir approché les concernés, finissant par donner des informations inexactes. », estime Batongué.