Etats Generaux de l'Opposition camerounaise ou l'appel a une prise de conscience de la Diaspora ?

20 AVRIL 2013
© Paul Ayi | Correspondance

ETATS GENERAUX DE L’OPPOSITION CAMEROUNAISE
OU
L’APPEL À UNE PRISE DE CONSCIENCE DE LA DIASPORA



Il est devenu courant d’entendre les Camerounais dire que « l’opposition n’existe pas au Cameroun ». Ce ressentiment est la manifestation d’une expression du dépit qu’ils ressentent depuis 1992, lorsque convaincus d’avoir tout donné pour voir leur pays aboutir à une transition politique, ils observent en ces jours un retour au le parti unique et son régime totalitaire qui ne se donnent même plus la peine de dissimuler quoi que ce soit.

Loin d’être apathique comme disent certains frères africains, la jeunesse camerounaise, qui est la principale et unique victime du régime actuel, cautionne sans le savoir et sans le vouloir, le système en place qui ne se soucie que de l’avenir de ses éternels apparatchiks.

C’est ainsi que forcé par la Communauté Internationale de mettre enfin en place les Institutions prévues par la Constitution de 1996, notre pays vient de vivre les premières élections en vue de la création d’un Sénat.

Pour ce à quoi cette institution servira le pays, il se profile à l’horizon qu’au moins c’est un bon garage pour tous ces anciens retraités du régime qui sont demeurés fidèles au RDPC et ceux des nombreux hommes d’affaires, richissimes en herbes, en situation permanente d’un réceptacle immunitaire.

Il est de notoriété nationale que la longévité au pouvoir de M. Biya et de son régime n’est ni le résultat d’une prétendue dictature musclée, ni celui d’une stratégie politique. On pourrait, sans risque de se tromper, l’attribuer, à phénomène hérité du régime d’Ahmadou Ahidjo qui a été revu et renforcé : l’usage du profond attachement à l’identité communautaire qui divise le peuple camerounais et l’empêche de devenir une véritable nation.

L’un des grands artisans de ce régime, feu Jean Fochivé, affirmait dans ses révélations publiées post-mortem : « Le processus de la conservation du pouvoir au Cameroun fut savamment étudié et instauré pour permettre au détenteur du pouvoir de la conserver aussi longtemps qu’il voudra… Ceci n’est pas l’œuvre du président Paul Biya qui s’est tout simplement exercé à en profiter. C’est un peu comme le Bunker dans lequel il s’est réfugié avec sa famille lors du coup d’État du 06 avril 1984 ; ce refuge, il en ignorait même l’existence jusqu’à mon coup de téléphone… ».

Ce qui, en d’autres termes, voudrait dire que le principal critère pouvant conduire à assujettissement d’un peuple est la bonne connaissance de son point faible qui, dans le cas du Cameroun, est la division tribale.

Plus loin, dans le même document, il déclare : « Le multipartisme ne sera jamais la garantit d’une avancée démocratique dans notre pays où tous les citoyens s’empresseront à adhérer à ceux des partis politiques dans lesquels ils reconnaitront leur identité régionale. Le phénomène John Fru Ndi et le SDF s’estompera progressivement lorsqu’arrivera le moment où la nouvelle génération des Camerounais comprendra que l’aptitude et le courage qu’à un homme à s’opposer au pouvoir en place, n’en font pas un homme politique pouvant conduire le pays vers le destin auquel elle aspire… ».

Si après deux décennies de multipartisme, le Président Paul Biya et le RDPC demeurent encore accrochés à ce pouvoir que rien ne semble pouvoir ébranler, c’est une performance qui découle plus de la parfaite connaissance des mentalités camerounaises que de la force politique du régime.

L’étrange phénomène de retour au parti unique que certaines personnes affirment être le résultat d’un processus de paupérisation des populations n’aurait pas pris une telle dimension s’il s’était avéré que l’adhésion au RDPC est devenu la seule voie de survie pour tout citoyen camerounais désireux d’améliorer sa condition de vie. En réalité, à l’heure qu’il est, le navire RDPC tangue si dangereusement qu’il affiche le trop plein et les divers résultats aux consultations populaires sont devenus tellement irréalistes que le président de la République lui-même en ressent un tel malaise qu’il s’abstient de se retrouver avec ses pairs à certaines occasions.

L’ère des 80 à 90 % des Pères-fondateurs de la Nation est révolue. De tels résultats suscitent de la suspicion, même si au bout du compte, les observateurs internationaux, plus soucieux du déroulement pacifique d’une opération électorale dans les pays du tiers-monde, préfèrent fermer les yeux de peur de mettre le feu à une poudrière dont nul ne doute de l’existence.


À trop tirer sur la corde, elle a fini par se casser

Le très regretté Bob Marley chantait : “You can fool some people some time, but you can never fool all the people all the time”.

Dans sa profondeur, cette affirmation signifie que les plus sempiternelles des mensonges sont périssables”.

Les récentes sénatoriales nous auront au moins confirmés une chose dont nul ne pourra plus refuser l’évidence : il existe bel et bien un copinage entre le RDPC et le SDF, ou au moins, entre M. Paul Biya et M. Ni John Fru Ndi.
Depuis combien de temps dure-t-il ?

Si nous nous en référons aux multiples déboires de l’opposition camerounaise qui ont quelque fois frisé le ridicule, le flirt ne date pas d’hier. Et comme les Camerounais, malgré les apparences, ne sont pas tous des imbéciles, bon nombre en avait la certitude, surtout parmi ceux qui avait soutenu le chairman sans réserve depuis les débuts des années 90. Ce qui est déplorable dans leur attitude est le fait de l’avoir quitté sur la pointe des pieds pour aller s’enfermer dans des structures associatives, d’où, enclins à l’activisme et aux critiques acerbes, ils ont contribué à « diaboliser » l’ensemble de l’opposition camerounaise. Ces flèches qu’ils n’ont pas cessé de lancer aux partis d’opposition ont profondément contribué à la fragiliser pour laisser le terrain libre au RDPC.

Dans ces conditions, les autres leaders politiques, mêmes les plus aguerris, désireux d’émerger, étaient tous, par simple assimilation, taxés de corrompus au service du pouvoir. Une certaine presse, jadis dite de l’opposition, n’étant pas en reste, les Camerounais ont dû déserter les partis politiques à l’entière satisfaction du régime au pouvoir.

Ce qui est le résultat logique d’avoir voulu remplacer le parti unique par l’opinion unique incarnée par le seul SDF.


Aujourd’hui que les masques sont tombés, que va-t-il se passer ?

Il se passe déjà que le RDPC et le SDF tentent de convaincre les Camerounais que leur unité qu’ils disent occasionnelle est circonstancielle et ne relève que des dispositions de la real politique.

Depuis le temps que les Camerounais dénoncent les pratiques du tribalismes et du népotisme devenues systématiques au Cameroun, fallait-il, en cherchant le prétexte pour donner des sénateurs au SDF pour reconnaître enfin que le tribalisme existe bel et bien dans notre pays et que Adamou Ndam Njoya et l’UDC en sont les instigateurs pour n’avoir pas « coopté » assez de Bamiléké sur leur unique liste ?

Heureux sont qui s’efforceront à croire à un aussi grossier mensonge. La vérité sur cette mise en scène est que l’atmosphère d’incertitude qui se profile dans les prochains jours est en train de pousser MM Biya et Ni Fru Ndi à penser chacun à sa survie, si ce n’est politique, c’est la survie tout court.

Dans le climat qui s’annonce, si rien n’est fait, nous assisterons dans les jours à venir à un remake de la transition pacifique que le pays a connu en 1982 et qui n’a pas tarder à faire voir son inefficacité. Au pire, le Cameroun pourrait connaitre le sort de la Côte d’Ivoire après Félix Houphouët Boigny, ce qui est plus probable.


La balle pourrait enfin être du côté de la diaspora camerounaise.

Longtemps disparate, elle s’est agitée sans jamais pouvoir coordonner ses forces pour s’impliquer efficacement dans la lutte pour la démocratie au Cameroun. Finalement, elle a apparu comme de minuscules groupes d’activistes désireux de pousser le Cameroun dans le tourbillon des guerres civiles qui ensanglantent bon nombres de pays d’Afrique subsaharienne. C’est incontestablement l’image que le pouvoir en place s’évertue à donner d’eux.

Peut-être à raison, puisqu’au Cameroun, la règlementation en vigueur n’ouvre la porte aux pratiques politiques qu’aux politiciens reconnus comme tels. Seuls les partis politiques légalisés et ses membres sont éligibles.

Même si une telle disposition pénalisent d’aucuns, elle s’explique simplement qu’il faut être affilié à une fédération nationale pour espérer pouvoir participer à une compétition sportive de haut niveau.

Ici apparaît donc la stérilité de ces actions qu’entreprennent ces groupuscules des personnes qui s’enferment au sein des associations en Occident et qui espèrent pouvoir changer les choses au Cameroun, alors qu’en réalité ceux qui les animent sont secrètement à la recherche de quelques strapontins dans le cercle devenu fermé des privilégiés d’aujourd’hui.

La diaspora camerounaise, si elle avait la volonté, en a les moyens.

Certaines personnes issues de la diaspora camerounaise clament avoir les moyens pour mener à bout le combat pour l’alternance au Cameroun. Nantis de supers diplômes, ils prétendent, chacun, pouvoir devenir le messie du pays.
Pour commencer, si le développement du Cameroun ne dépendait que de ces gros diplômes, ce sera déjà un acquis, puisqu’au sein du RDPC foisonnent des grands diplômés sortis des meilleurs institutions occidentales.

Pour ce qui est de l’argent que l’on dit être le nerf de toutes les guerres, il ne saurait être l’essentiel pour la victoire. Si oui, le Paris-Saint- Germain n’aurait pas perdu le championnat de la ligue 1, saison 2011-2012 au bénéfice de Montpellier ou se faire éliminer en 2013 aux quart des finales de la Coupe de France par Évian Thonon Gaillard FC. L’argent est certes là, mais seules manquent l’expérience et la volonté malgré la pléiade des stars du football achetés à prix d’or.

De bonne guerre, le RDPC préfère façonner un adversaire à sa mesure. Un adversaire capable d’entraver toutes les velléités d’entente ses opposants. Un prétendu-parti-adversaire, chef de file de l’opposition, dont le leader fit preuve d’extrême en 2004 lors de l’opération en vue de la recherche d’un candidat unique pouvant aller contre M. Paul Biya.

La diaspora, si elle tient vraiment à promouvoir une opération pouvant aboutir à une vraie alternance au Cameroun, doit se départir de tous les préjugés concernant les leaders d’opposition aguerris qui se battent désespérément au Cameroun contre un régime qui n’a d’autre projet que de s’éterniser au pouvoir.
Ni John Fru Ndi a fait son temps et ne pense même plus pouvoir jamais gouverner le Cameroun.

Il est donc temps que les Camerounais arrêtent de se bercer d’illusions et lui retirent ce chèque un blanc que le peuple lui avait remis depuis 1992 et qu’il utilise à sa guise sans jamais rendre de compte à qui que ce soit, ou au moins faire preuve d’humilité en expliquant la raison de ses multiples et éternels échecs.

Ceci est un appel à tous ceux qui aiment le Cameroun. Un appel à la réflexion individuelle qui, sans être un forum, pourrait se définir comme des États généraux de l’opposition Camerounaise.


Par Paul Ayi



22/04/2013
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