Traitement inhumains dégradants et atteinte à la personne physique et psychologique des habitants de l’arrondissement de Touboro, localité située dans le département du Mayo-Rey situé à 120 km de Garoua , Cameroun. Le Réseau des Défenseurs des Droits Humains en Afrique Centrale est stupéfait du traitement subis par les habitants de Touboro et s’interrogent s’ils sont au Cameroun.
Les faits
Pour avoir écrit au Président de la République pour dénonçant les exactions dont ils sont victimes, 13 jeunes ont été arrêtés et incarcérés dans une case du lamida de Rey-Bouba.C’est dans un document de six pages, intitulé « Déclaration commune de Touboro » signé de 1.190 jeunes le 29 décembre 2011, que le « Collectif des jeunes indignés de l’arrondissement de Touboro, dénoncent l’accaparation de leur liberté par l’autorité religieuse et traditionnelle de Rey-Bouba. “Ici chez nous dans le Cameroun de ‘Baba’, non seulement on doit travailler dur pour manger à notre faim, mais en plus, nous sommes traités comme des esclaves à la recherche de la liberté”, relatent les signataires.
L’objet du document porte sur la “dénonciation des actes esclavagistes et autres pratiques inhumaines du Lamido sur les populations de de Touboro, sous le regard complice, passif, inerte et larxiste des autorités administratives locales”.
Treize des jeunes dénonciateurs sur ordre du Lamido avaient été arrêtés à Touboro, ligotés avant d’être déportés par les dogaris (milice du Lamido, Ndlr), “Mes compagnons de misère et moi avons été bastonnés, molestés, couverts de sang”, témoigne Célestin Yandal, un des jeunes arrêté. Ces derniers avaient ensuite été libérés le 7 janvier 2012, dix jours après leur arrestation, après avoir été torturés et obligés de jurer sur le Coran de ne plus jamais recommencer.
Dans la pétition qu’ils souhaitaient remettre aux autorités administratives, à l’attention du Président de la République avant d’être capturés, les jeunes de Touboro dénoncent les exactions des dogaris (les extorsions, racket à ciel ouvert, arnaques) sur ordre du Lamido .
“Nous savons que seule votre volonté suffirait à mettre un terme à cette pratique esclavagiste qui a provoqué un exode rural forcé de nos parents vers les arrondissements de Ngong dans la Bénoué, et vers la région de l’Adamaoua et vers le Tchad et la République Centrafricaine, freinant ainsi la production agricole qui est la force de notre pays et de notre arrondissement”, écrivent-ils à Paul Biya, avant d’ajouter que “nous dénonçons également le maintien délibéré des populations dans l’analphabétisme; l’ignorance et le sous-développement afin que celles-ci ne puissent s’autodéterminer”
Ils exigent ainsi l’application de l’arrêté N°128/CAB/PM signé le 4 juillet 2007 portant homologation de la désignation d’Aboubakary Abdoulaye comme chef de 1er degré de l’arrondissement de Rey-Bouba. “Nous demandons que cet arrêté soit appliqué dans toutes ses dispositions et avec pour conséquence le départ immédiat des Dogari installés dans tout l’arrondissement sans sa protection pour piller et torturer les populations villageoises”.
Dans leur mémorandum, les “jeunes indignés” accusent aussi le Lamido Aboubakary Abdoulaye de s’emparer du parti, le Rdpc, qu’il gère selon sa volonté, au détriment de la volonté du peuple. “Le Cameroun n’est-il plus un Etat unitaire et de droit ? Cette partie de la République est-elle devenue une propriété privée de ce monarque ? Ou bien, ne sommes-nous pas des Camerounais comme les autres, raisons pour lesquelles les lois votées ou prises à Yaoundé ne peuvent pas s’appliquer à nous et dans notre terroir ?”, se demandent les rédacteurs du pamphlet qui estiment que “ces problèmes ont atteint un point critique, et nous n’en pouvons plus, et c’est parce qu’animés d’un sens de patriotisme et d’un esprit républicain que nous ne sommes pas passés à l’acte”.
Pourtant, relève la lettre, le 10 décembre 2009, jour anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, au cours d’une rencontre inter-religieuse qui s’ést tenue en présence de Mgr Antoine Ntalou, Archevêque métropolitain de Garoua, le Révérend pasteur Alphonse Teyabe, Secrétaire général du Conseil des Eglises protestantes (Cepga) et le Lamido de Rey-Bouba, Aboubakary Abdoulaye et des autorités administratives, le lamido a signé la “déclaration commune de Touboro” et pris l’engagement de “promouvoir le dialogue entre les religions dans le Mayo-Rey pour rechercher la justice et la paix dans un esprit de confiance mutuelle et de soutien réciproque, en évitant toute forme d’intolérance et de violence inspirée sous des motifs religieux ou autres”. Ils ont d’ailleurs joint cette déclaration en plus des noms de tous les signataires et leurs numéros d'identité dans la correspondance adressée au Président de la République.
Le Réseau des Défenseurs des Droits Humains en Afrique Centrale (REDHAC) condamne ces Traitement inhumains et dégradants sur les habitants de Touboro ;
s’inquiète de la situation des habitants de Touboro
Aux Autorités Camerounaises, le REDHAC demande instamment de :
1. Mener sans délai une enquête exhaustive, indépendante, effective, rigoureuse et impartiale sur ces exactions en rendant les résultats publics, identifier les responsables, les traduire devant un tribunal indépendant, compétent et impartial conformément aux instruments internationaux et régionaux de protection des droits de l’Homme et du droit international humanitaire, et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi ;
2. Garantir en toute circonstance l’intégrité physique et psychologique des populations de Touboro ;
3. Mettre fin à toute forme de Traitement inhumain et dégradant à l’endroit des habitants de Touboro ;
4. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à ses articles 3,4 et 5 « tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne ; Nul ne sera tenu en esclavage ni en servitude, l’esclavage et la traite des esclaves sont interdits sous toutes leurs formes ; Nul ne sera soumis à la torture , ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants »
Ainsi que son article 12.2, qui dispose que “l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination, de pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration” ;
5. Se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par la République du Cameroun.
Aussi
le REDHAC demande a La Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples et au Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies de prendre acte de cette situation afin de recommander aux autorités Camerounaises de :
Respecter tous les traités ratifiés par elles, en particulier la Charte Africaine des Droits Humains et la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la bonne gouvernance.
Se conformer aux dispositions relatives au Pacte International pour les Droits civils et politiques des Nations Unies et tous les instruments ratifiés par les autorités camerounaises en matière du respect de la Sécurité ;
Pour toute action urgente écrire á
Premier Ministre : Philémon YANG :
Tél. : (+237) 22 23 92 54 / 22 23 57 60 / 22 23 57 50 / 22 21 00 42
Fax : (+237) 22 23 57 65
Ministre Délégué à la Présidence de la République, chargé de la Défense : Edgar Alain MEBE NGO’O
Tél. : + 237 22 22 15 24.
Fax + 237 22 23 59 71
Vice-premier Ministre, Ministre de la Justice, Garde des Sceaux : Laurent ESSO
Tél. : (+237) 22 23 55 56
Fax : (+237) 22 23 55 59
Secrétaire Général de la Présidence de la République : Ferdinand NGOH NGOH
Tél. (+237) 22 20 04 55.
Fax : (+237) 22 22 08 70
Ministre de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation : SADI René Emmanuel
Tél. : (+237) 22 23 10 56
Fax : (+237) 22 22 63 32
Délégué Général à la Sûreté Nationale : Martin MBARGA NGUELE
Tél. : (+237) 22 20 30 93 / 22 20 22 80
Fax : (+237) 22 21 00 69