En temps de guerre: Paul Biya dépense plutôt pour ses petits plaisirs

DOUALA - 20 MARS 2015
© Alain NOAH AWANA | Le Messager

 

Le président camerounais est en train de casquer plus d'un milliard Fcfa dans un luxueux hôtel en Europe au moment où le pays a besoin du moindre petit kopeck pour financer la riposte face à l'ennemi Boko Haram.

 

 

Geneve: Hotel Intercontinental
Photo: (c) Archives


L'information a presque été diluée dans un article de notre confrère Mutations. Dans son édition du 18 mars 2015, une enquête de son correspondant en Europe révèle, entre autres, que le président camerounais Paul Biya dépense des sommes faramineuses pour son «court séjour privé» qu'il a entamé depuis le 1er mars 2015. Le journal écrit que dans un document qui circule dans les hauts salons camerounais en Europe, on peut lire:

«Accompagné d'une délégation d'une quarantaine de personnes, il occupe une suite présidentielle à 50 000 francs suisses par jour (soit 30 millions Fcfa), ses collaborateurs se «contentant» des chambres à 500 francs suisses (300 000 Fcfa). Si l'on ajoute la nourriture et les boissons (classiquement: 50% des frais du séjour), on aboutit à un chiffre intéressant de 100 000 francs suisses. Soit pour la totalité du séjour présidentiel du ter au 20 mars : 2 millions de francs suisses. Soit 1,250 milliard Fcfa». Même si au départ de Yaoundé le cabinet civil a rendu public les noms des personnalités qui constituent la suite officielle du couple présidentiel.

Ce n'est pas la première fois que des révélations sont faites sur les coûts engendrés par les «séjours privés» du président de la République en Europe, notamment dans le luxueux  hôtel Intercontinental de Genève où il a ses habitudes. En 2012, cette fois-là par Le Jour, une autre délégation du président de la République avait dépensé plus de 800 millions Fcfa lors d'un séjour entre le 31 janvier et le 4 mars. Toujours à l'Intercontinental. Les calculs avaient même porté à plus d'un milliard Fcfa le coût de ce séjour lorsqu'on comptait les frais de la réquisition d'un avion spécial. En juillet 2009, après avoir rencontré le président français Nicolas Sarkozy au cours d'une visite officielle, Paul Biya et sa suite entament une petite villégiature et prennent leurs quartiers dans deux palaces : L'Hermitage et Le Royal. Coût total : 585 millions Fcfa, selon Antony Torzec, journaliste français, auteur d'une enquête sur le séjour présidentiel à La Baule. Evidemment, ces révélations ont le don de soulever le courroux du sérail qui estime souvent qu'il s'agit ni plus ni moins d'une manipulation afin de «déstabiliser le pays».

La rhétorique habituelle lorsque des informations sont révélées sur les vacances présidentielles. Et de fait, on ne saurait à priori reprocher au président de la république de prendre de temps en temps des vacances, «au regard des dossiers sensibles qu'il doit gérer au quotidien», soutient un haut commis de l'Etat.


Choquante indécence

Soit. Mais, cette fois, il y a quelque chose d'assez choquant selon certains observateurs et acteurs de la scène politique camerounaise. «Il est tout de même curieux qu'en temps de guerre, comme c'est le cas en ce moment, non seulement le président sort du pays, mais en plus il se permet de dépenser beaucoup d'argent dans un hôtel alors que cet argent aurait pu aider un peu à financer la guerre contre Boko Haram», soutient étrangement un président de sous-section Ojrdpc de la région du Centre. D'abord quelque peu vexée par ce court séjour privé décidé par Paul Biya au momet.t même où les combats au front contre Boko Haram s'étaient intensifiés, l'opinion publique camerounaise commence à trouver inconcevable, et même indécent de dépenser en si peu de temps (une vingtaine de jours seulement) autant d'argent pour quelques moments de détente avec ses proches.

La frustration du Camerounais lambda est d'autant plus grande que depuis plusieurs semaines, on lui demande de participer à «l'effort de guerre». La récente augmentation des prix des boissons alcoolisées, qui, dans un premier temps a failli être mal gérée, a finalement eu lieu sans ambages parce que les Camerounais se sont dits que l'Etat ayant besoin d'argent pour financer la lutte contre la secte islamique, les droits d'accise qui ont provoqué l'augmentation de 100 Fcfa par bouteille de bière pourraient aider. A travers le pays, des chaînes de solidarité se multiplient. Dans les supermarchés de certaines grandes villes, des clients volontaires laissent des denrées qui sont par la suite acheminées dans le septentrion pour alimenter les soldats.

En février dernier, ce sont les grands producteurs de denrées alimentaires (riz, huile, sucre, savon, eau minérale, etc.) qui s'étaient mobilisés et avaient gracieusement offert des centaines de tonnes d'aliments pour soutenir l'armée camerounaise. De plus, des communautés locales saisissent l'occasion des marches patriotiques pour collecter des fonds qu'elles reversent ensuite comme soutien aux soldats. Des partis politiques aussi mettent la main à la pâte: L'Undp et l'Udc ont collecté des fonds; et le Sdf annonce qu'il va lancer son opération dans les prochains jours. En fait, tous les Camerounais sont aujourd'hui bien conscients de la menace. Et chacun à sa manière contribue à cet effort de guerre». En dehors de Paul Biya qui, pendant ce temps, se la coule douce aux frais de l'Etat à l'étranger.

 



21/03/2015
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