Elections: Elecam et le Premier Ministre à couteaux tirés

Yaoundé, 05 Septembre 2013
© DORINE EKWÈ | Mutations

 

Philémon Yang milite pour l'association du Ministère de l'Administration territoriale au processus, alors que Samuel Fonkam Azu'u soupçonne une volonté de tripatouillage.

 

Mardi, au Ministère de l'Administration territoriale et de la Décentralisation (Minatd), on en était encore à des supputations quant au rôle que sera appelé à jouer ce département dans le déroulement des élections municipales et législatives dit 30 septembre prochain. En réalité, depuis près d'une semaine, des négociations, parfois houleuses, ont cours entre le Président de cette institution chargée de la gestion des scrutins et opérations référendaires, Samuel Fonkam Azu'u, et le Premier Ministre, Philémon Yang. 

Tout part en effet de la volonté du Premier Ministre d'associer le Minatd au processus électoral en cours. Des sources proches de ce dernier, il est établi qu'Elecam ne dispose pas de la logistique nécessaire permettant de supporter l'organisation simultanée de ces deux rendez-vous avec les urnes. Pour cette raison, explique-t-on dans les services du Premier Ministre, il serait judicieux que le Minatd se joigne, d'une façon ou d'une autre, notamment aux opérations de transport des urnes et du matériel électoral de façon générale. 

«Nous savons tous que, depuis la création d'Elecam, le Minatd n'a plus rien à voir dans l'organisation des élections. Seulement, nous sommes conscients des limites d'Elecam. Et c'est pour cette raison que le gouvernement camerounais, par la voix du Premier Ministre, Philémon Yang, propose d'associer le Minatd qui, il faut le reconnaître, a une certaine expérience en la matière et une logistique évidente pour ce type d'opérations. Pourquoi devrait-on s'en priver?» s'offusque notre source. 

Argent 

Ce courroux ne semble pas ébranler les responsables d'Elections Cameroon, dont le Président n'a pas manqué de préciser, au cours des différents échanges épistolaires de ces derniers jours, qu'il était prêt à assumer d'éventuels manquements à l'organisation des élections à venir. Il n'est nullement question, a-t-il précisé, de laisser l'Administration territoriale s'immiscer dans quelque domaine que ce soit. «Les risques de tripatouillages seraient en effet trop grands, et décrédibiliseraient totalement l'organisme», susurre-t-on au siège de la structure à Bastos. 

Des «insinuations» qui mettent hors d'eux les partisans d'un éventuel transfert, ne serait-ce que partiel, de compétences au Minatd. «C'est trop facile, de laisser croire que, parce qu'on va aider Elecam à transporter le matériel électoral, on va forcément s'arrêter dans un bosquet et faire des manipulations», éructe une source au Minatd alors qu'une autre, proche des services du Premier Ministre, préfère temporiser. Les vieux démons de la fraude électorale, mais également le souci de donner des gages de neutralité à l'opinion publique nationale et internationale, qui a accusé certains d'être d'anciens caciques du régime, semblent tarauder les dirigeants d'Elecam. 

Selon cette source en effet, «Elecam a beau jeu, aujourd'hui, de proclamer haut et fort qu'il veut être maître du jeu. Pourquoi, lorsque le gouvernement a fait acheminer le matériel électoral par avion militaire, ils n'ont pas protesté comme ils le font actuellement? Nous souhaitons tous avoir un scrutin juste et sans fautes, alors, au lieu de se plaindre sans cesse, comme c'est le cas actuellement, qu'ils soient [à Elecam] plus pragmatiques et acceptent la main qui leur est tendue. Ce d'autant que, dans certaines localités, Elecam n'a que des motocyclettes. Combien d'urnes peut transporter une moto? De plus, ils savent bien que le dépouillement se fait aussitôt après le vote. Il n'y aura alors aucune urne à manipuler». Des arguments qui ne semblent pas perturber Elecam, qui entend bien rester comptable de l'organisation et des retombées. 

Un entêtement qui exaspère plus d'un, tant, aussi bien dans les services du Premier Ministre qu'au Minatd, on affirme que, grâce à la présence des sous-préfets et préfets, disposer de relais efficaces dans la plupart des localités. Un brin perfides, ces adeptes du transfert - ou du partage - de compétences estiment que l'entêtement d'Elecam ne trouve de fondements que dans l'intention de cette structure de faire main basse sur l'argent dédié au financement, des opérations de transport, car céder cette rubrique au Minatd reviendrait également à y laisser une partie du budget y relatif. Le contrôle du budget des élections serait donc à l'origine de la brouille.



05/09/2013
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