Eduardos Dos Santos (Angola) : "Choi a induit la Communauté internationale en erreur"
M. Eduardo Dos Santos, président de la République d’Angola, a présidé la cérémonie de présentation des vœux de nouvel an de tous les corps constitués de la République d’Angola, avant-hier jeudi, au Palais présidentiel angolais. Devant tous les ambassadeurs accrédités en Angola, le président Dos Santos a dénoncé ouvertement le coup d’Etat électoral perpétré par Young Jin Choï, Représentant spécial du Secrétaire général de l’Onu en Côte d’Ivoire. Mais, en même temps, il fait des propositions pour une sortie de crise pacifique dans notre pays. Voici le texte intégral de son discours.
«Excellence Monsieur le Doyen du Corps diplomatique,
Excellences Messieurs les Ambassadeurs et Chefs de missions,
Mesdames et Messieurs,
C'est avec beaucoup de satisfaction que je reçois ici au Palais
présidentiel les illustres membres du Corps diplomatique et leurs
conjoints respectifs pour notre traditionnelle rencontre de début
d´année. Ces rencontres sont toujours l’occasion d´une agréable
convivialité et nous permettent d´échanger des impressions et des
informations utiles concernant les liens d´amitié et de coopération qui
unissent nos pays. Je vous souhaite à tous une heureuse année 2011.
J’espère qu’elle sera remplie de réalisations sur le plan professionnel
et également sur le plan individuel. Puissent tous vos vœux et
aspirations personnelles être exaucés !
L'année qui vient de
terminer, nous avons dû, hélas, faire encore face à certains soucis
découlant de la crise économique et financière internationale. Nous
avons dû nous confronter également à des crises politiques et des foyers
de tension ou de conflit existant en plusieurs parties du monde, ainsi
qu’à des calamités naturelles qui ont provoqué d´énormes dégâts et
pertes en vies humaines. Malgré cela, nous avons remarqué quelques
progrès, résultats des efforts fournis par plusieurs pays dont
l´objectif est de contribuer à créer une atmosphère plus harmonieuse
entre les nations et améliorer les conditions de vie des pays
respectifs.
En Angola, avec l’approbation de la Constitution de
la République, nous avons adopté un nouveau système de gouvernement plus
adapté à l’actuelle phase de développement politique, économique,
social et culturel du pays, dans un cadre démocratique et de respect des
droits, libertés et garanties du citoyen.
Dans ce processus de
reconstruction matérielle, institutionnelle et spirituelle pour
l’avènement d´un nouvel Angola, plus stable, prospère et heureux, nous
souhaitons pouvoir continuer à compter sur la coopération multiforme et
mutuellement avantageuse de nos partenaires internationaux. Dans ce
sens, nous pensons que le respect et le renforcement des institutions de
l’Etat et de son autorité sont aussi importants pour les pays africains
que la paix et la stabilité le sont pour leur développement économique
et social.
Dans cette perspective, nous devons considérer comme
des priorités stratégiques la prévention des crises politiques et
militaires et la recherche, quand la situation se présente, de solutions
pacifiques négociées, afin d´éviter l’ajournement du développement
économique et social et l’aggravation des conditions de vie des
populations.
Nous nous réjouissons des procédures de
stabilisation qui sont en cours dans certains pays ayant auparavant
connu la guerre comme l´Ethiopie, le Mozambique, le Congo-Brazzaville,
l’Angola, parmi tant d’autres, car elles représentent l’espoir de
millions de personnes dans un avenir meilleur. Néanmoins, nous
manifestons notre appréhension quand des solutions militaires sont
proposées pour résoudre des crises comme celle qui prévaut en Côte
d´Ivoire, en ignorant les normes du Droit interne et international et,
quelquefois, l’évidence même des faits. Or, les faits nous disent
concrètement ce qui suit :
Le Président de la Commission
électorale a diffusé les résultats du deuxième tour de l´élection
présidentielle quand il n´était plus compétent : le délai prévu par la
loi pour le faire était déjà dépassé et le dossier avait été transmis,
pour le traitement nécessaire, au Conseil constitutionnel ;
Le
représentant des Nations unies en Côte d’Ivoire, dans une attitude
précipitée, a certifié et annoncé ces résultats, alors que la résolution
ad hoc des Nations unies dit que la certification doit s’appliquer aux
résultats électoraux validés par le Conseil constitutionnel, lequel ne
s´était pas encore prononcé ;
Cette déclaration
du représentant des Nations unies a induit en erreur toute la communauté
internationale, car le Conseil constitutionnel n´a pas validé les
résultats provisoires diffusés par le Président de la Commission
électorale, ayant accepté les réclamations et plaintes d´irrégularités
et fraudes graves qui mettaient en cause lesdits résultats ;
Le
Conseil constitutionnel est, en vérité, le seul organe compétent légal
pour valider et publier les résultats finaux des élections ;
Aux
termes de la loi, Le Conseil constitutionnel devrait recommander la
réalisation de nouvelles élections dans un délai de 45 jours, mais il
n´a pas agi ainsi et a proclamé les résultats donnant la victoire à
l´autre candidat.
Compte tenu de ces faits, il est difficile à
l’Angola d’accepter qu'il y ait un Président élu en Côte d’Ivoire. Nous
considérons, néanmoins, qu’il y a un Président constitutionnel, qui est
l´actuel Président de la République, lequel doit être maintenu jusqu´à
la tenue de nouvelles élections, comme l´établit la loi électorale de ce
pays. Actuellement, la plus grande difficulté réside dans le fait que
les 45 jours ne sont plus suffisants pour créer un climat propice et
l’actuelle situation de crise complique davantage ce cadre.
Nous
sommes donc d’avis que toute intervention militaire, en particulier dans
le cas de la Côte d'Ivoire, aura un effet pervers, avec de graves
conséquences au-délà de ses frontières.
Le gouvernement angolais
soutient et encourage le dialogue et la négociation pour la sortie de la
crise dans ce pays frère et croit qu’en faisant preuve de volonté
politique, réalisme et sagesse, il est possible de trouver une solution
qui mette au-dessus de tout les intérêts légitimes de tout le peuple de
Côte d’Ivoire. L’Afrique, ici, par l’intermédiaire des institutions
compétentes de l’Union africaine, doit faire preuve de sa maturité, de
son expérience et de son habileté, pour résoudre les problèmes de notre
continent, même les plus complexes et délicats, sans attendre des
solutions inappropriées imposées de l´extérieur.
Messieurs les ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs,
Dans
le monde actuel, des solutions imposées par la force, par
l´intimidation ou par la terreur ne sont plus acceptables, car elles se
heurtent aux valeurs et principes universaux qui constituent la base de
l´action des peuples vers la paix, le progrès et le bien-être. Tous
ensemble, nous devons ériger une barrière au terrorisme, au narco
trafique, à l´immigration illégale et à d´autres maux qui touchent nos
sociétés, comme une contribution pour un monde plus libre et plus sûr.
Je
remercie les mots agréables prononcés par Monsieur le Doyen du Corps
diplomatique, surtout quand il salue la performance de notre économie et
manifeste de la sympathie et de la solidarité envers le Peuple
angolais. Je vous souhaite à tous une Heureuse et Prospère Année 2011…».
Luanda, le 13 janvier 2011
Eduardo Dos Santos
Président de la République d’Angola