Editorial: Leçon africaine en Côte d’Ivoire

Editorial: Leçon africaine en Côte d’Ivoire
(Le Temps.ch 27/12/2010)


Le tyran d’Abidjan a sous-estimé la mobilisation des chefs d’Etat africains. Unis pour que la démocratie soit respectée en Côte d’Ivoire, ceux-ci ne dessèrent pas leur étau

Triste Noël en Côte d’Ivoire. Les messes de minuit ont été célébrées à la va-vite, avant la nuit, ou alors annulées comme celle de la cathédrale Saint-Paul à Abidjan habituellement suivie par 10 000 fidèles. La peur est omniprésente alors qu’un bilan avoisinant les 200 morts est évoqué par les Nations unies dont les Casques bleus sur place ont été impuissants à empêcher les atrocités post-électorales. L’heure est grave. Les prochains jours seront cruciaux.

Chaque jour qui passe semble renforcer Laurent Gbagbo dans son délire de rester au pouvoir. Mais le président vaincu dans les urnes est en retard sur la compréhension des événements et de leur dynamique. Il a beau dire qu’il «ne veut pas la guerre», il se trompe en s’entêtant à ne pas reconnaître la victoire de son adversaire, Alassane Ouattara. Le fait accompli ne fonctionnera pas. Ni les Etats africains, ni la communauté internationale ne sont prêts à desserrer leur étau. Le tyran africain s’est mis au ban des nations. Les sanctions le visant commencent à produire des effets. Et la menace d’un recours à «la force légitime» pour le déloger du pouvoir n’est plus un tabou.

D’ailleurs, le bras de fer d’Abidjan délivre une belle leçon, plutôt inattendue: par son ampleur, la mobilisation africaine pour que la démocratie soit respectée n’a pas de précédent. L’Union africaine ne s’est pas dérobée à ses responsabilités. Elle a définitivement lâché Laurent Gbagbo, ce qui n’allait pas de soi sur un continent où les exemples d’enracinement au pouvoir sont légion.

La communauté économique d’Afrique de l’Ouest, la Cédéao, avait montré la voie en rendant un verdict défavorable au mauvais perdant. Et quand la Cédéao a suspendu la Côte d’Ivoire de ses institutions, l’Union africaine lui a aussitôt emboîté le pas.

Cet engagement des dirigeants africains contre un des leurs peut être compris comme une démonstration de la capacité de l’Afrique à se prendre en main, avec la bénédiction de la communauté internationale. A un moment où le continent noir connaît une progression soutenue de son PIB, les chefs d’Etat redoutent par-dessus tout l’instabilité qui pourrait contaminer une vaste région. Tous voudraient éviter que l’obstination de Laurent Gbagbo ne fasse replonger la Côte d’Ivoire dans le chaos. C’est dans cette unité africaine, qu’a sous-estimée Gbagbo, que réside l’ultime espoir, certes ténu, d’une solution non militaire.

Par François Modoux lundi27 décembre 2010

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27/12/2010
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