La ville d’Edéa que nous avons visitée le week-end dernier présente un visage pathétique, malgré le fait qu’elle soit située sur l’axe qui relie les deux grandes capitales du Cameroun.
La ville d’Edéa connait un véritable délabrement. Une ville où presque tout se dégrade au jour le jour. Connue autrefois, sous l’appellation de capitale industrielle, la ville n’est plus qu’aujourd’hui que l’ombre d’elle-même. La cité lumière du Cameroun traverse depuis près de vingt ans, une vraie plongée dans une descente aux enfers, un retour pathétique au sous-développement, une condamnation à l’enclavement. La ville d’Edéa sombre dans une régression dangereuse sous le regard des élites, des populations et des pouvoirs publics. La ville lumière est devenue comme par enchantement la ville obscure. Il ne s’agit pas du phénomène auquel les Camerounais sont habitués depuis plus d’une décennie, maintenant connu sous l’appellation de délestage, c’est que même lorsque la cité est desservie en électricité, cela ne se ressent pas au niveau de la voie publique au vu des grandes zones d’obscurité que l’on traverse ici.
Conséquence, la plèbe s’est installée, les agressions sont croissantes. C’est le cas du tronçon qui mène de la poste centrale jusqu’au lieu dit, deuxième pont. Il en est de même du trajet qui va du lieu dit carrefour quartier d’amour jusqu’au quartier Mbanda en passant par le quartier Pongo. C’est la même situation que l’on observe sur le tronçon qui va du marché central jusqu’au quartier Besseke en passant par le camp fonctionnaire. Il règne partout ici un climat d’insécurité permanent, faisant passer la ville d’Edéa pour une ville criminogène. Les populations en parlent avec pincement au cœur : «nous qui habitons les quartiers où les rues sont obscures, nous avons l’obligation de rentrer dans nos maisons avant 22h. Nous enregistrons des agressions au quotidien, les conducteurs de moto constituent la plus grande cible».
Pourtant la cité lumière a connu trois transformations importantes. La première en 1996 qui faisait passer la Commune urbaine d’Edéa, en commune à régime spéciale, puis en Communauté urbaine. Les populations avaient vu dans cette érection un vent de développement qui devrait souffler sur la ville. Illusion, puisque c’est plutôt dès ce moment qu’on a observé dans cette ville son accélération du délabrement.
La deuxième transformation est intervenue en 2011, lorsque par un décret du Chef de l’Etat portant création de nouvelles unités administratives, la ville d’Edéa a vu la création d’un nouvel arrondissement : l’Arrondissement d’Edéa II. Ce découpage de la ville par ce décret a fait penser à plus d’un que la ville d’Edéa sortirait alors à l’occasion de son enclavement. Rien de tel, si ce n’est le pont sur la Sanaga bras mort que l’entreprise Razel vient de réfectionner. Et la pose des flotteurs à polémique de la coopération Allemande. Il faut rappeler que ce pont a été victime des actes de destructions de la part des populations qui avaient démonté complètement les garde-fous des deux côtés du pont.
Ces actes odieux et inciviques avaient des visées mercantiles. Puisque les morceaux de fers ainsi arrachés étaient revendus sous forme de «ferrailles» que l’on désigne encore ici «mposso». Pour l’instant, la ville d’Edéa sombre allégrement. C’est une plaie béante qui fait honte à tous, mais à laquelle personne n’arrive encore à apporter un pansement. Les élites que nous avons approchées disent être préoccupées par d’autres questions que de gloser sur cette épineuse affaire. Au moment où on y observe une grande agitation politique de la part du parti au pouvoir, comme ceux de l’opposition, dans la perspectives des échéances électorales capitales qui vont être organisées cette année 2013, il y lieu de se saisir de cette opportunité pour élire ne fussent-ce que des maires qui présenteront un programme d’aménagement de la ville ainsi qu’une vision de développement crédible.