Dr Manassé Aboya Endong : Le Sdf dispose toujours d’un groupe parlementaire
Dr Manassé Aboya Endong : Le Sdf dispose toujours d’un groupe parlementaire
Politologue, Directeur exécutif du GREPDA (Groupe de recherches sur le parlementarisme et la démocratie en Afrique).
Au
regard de sa configuration actuelle à l’Assemblée nationale, 14 députés
depuis le début de la session, le Sdf a-t-il encore un groupe
parlementaire?
De fait, ce constat est établi en cours de
législature et ne rend pas suffisamment compte des conditions de formes
exigibles avant le début de toute législature, notamment allant dans le
sens de la formation d’un groupe parlementaire. Du moins, selon l’esprit
de l’article15 (1) du règlement intérieur de l’Assemblée nationale qui
subordonne la constitution d’un groupe parlementaire à un minimum de 15
députés par parti politique. Le Sdf avait respecté cette formalité en
début de législature. Il dispose donc toujours d’un groupe
parlementaire. Les exigences de renouvellement du bureau de l’Assemblée
nationale intervenant au cours de la session ordinaire en ouverture de
chaque année législative ne vont pas de pair avec la formation du groupe
parlementaire qui intervient, quant à lui, au début de chaque
législature. Mieux, la législature intervient à l’issue des législatives
alors que la session ordinaire qui ouvre l’année législative est la
continuation de la législature qui dure cinq ans, sauf en cas de
dissolution de l’Assemblée nationale par le président de la république.
Quelles
sont à votre avis les dimensions que peut avoir le problème de la
présence du Sdf dans ses proportions actuelles à l’Assemblée nationale ?
Pour l’instant, le Sdf n’a aucun problème majeur. Du moins en
ce qui concerne le partage du pouvoir. Il est représenté dans le bureau
de l’Assemblée nationale, conformément à la loi qui indique que le
bureau de l’assemblée nationale doit refléter la configuration politique
de la Chambre. Il dispose d’un vice-président et d’un questeur, en
l’occurrence les honorables Joseph Mbah Ndam et Cyprian Awudu Mbaya.
Cette situation est différente de l’époque antérieure à la reprise des
élections dans la circonscription de Douala Ve en 2008 où le Sdf n’avait
que le poste de vice-président attribué à Joseph Mbah Ndam.
On
remarque que le parti a tout de même gardé les attributs d’un groupe
parlementaire : des bureaux à l’Assemblée nationale, des membres élus au
sein de ce bureau …
Justement, le Sdf n’au aucun problème au
niveau du bureau de l’Assemblée nationale où il est à juste titre
représenté conformément à la loi. Mieux, l’honorable Banadzem Joseph
Lukong demeure toujours le président du groupe parlementaire de ce
parti. Mais le vrai problème du SDF est interne, avec l’exclusion
manifeste des francophones, aussi bien dans les délégations accompagnant
le Chairman aux différentes rencontres avec le Président Paul Biya que
dans le partage des postes dans cette représentativité au sein du bureau
de l’Assemblée nationale. Avoir le courage de continuer à le faire,
même au cours d’une année électorale comme celle-ci est très
remarquable.
Que peut faire le Sdf si jamais il lui était
opposé le problème du caractère incomplet de son groupe, conformément
aux dispositions de l’article 15 du règlement intérieur de l’Assemblée
nationale en son alinéa 1 qui indique clairement que «…Aucun groupe ne
peut comprendre moins de quinze membres, non compris les Députés
apparentés …» ?
On ne devrait pas aller jusqu’à ce niveau. Le
contexte politique de l’heure ne milite pas en faveur de l’exacerbation
des divergences entre le Sdf et le Rdpc. Surtout à quelques encablures
de la campagne présidentielle, notamment après les rencontres apaisantes
de Bamenda, Yaoundé et Ebolowa entre Fru Ndi et Paul Biya d’il y a
quelques mois. Le débat autour d’Elecam est déjà très délicat à gérer
entre les deux partis. Si on ajoute un problème d’interprétation a
posteriori de la loi, visant manifestement à priver le Sdf d’un groupe
parlementaire, on n’est pas loin de crier à l’antijeu, voire à la
persécution. Toutefois, si malgré tout ce problème était invoqué, le Sdf
ne peut que solliciter l’organisation des partielles.
Si
l’on s’en tient aux dispositions de la loi organisant l’élection des
députés, dans quatre mois, il ne sera plus possible d’organiser des
élections partielles pour remplacer les députés décédés. Que peut dans
ce cas le Sdf?
Sur le plan opérationnel, le Sdf peut
difficilement manœuvrer au profit des partielles. Simplement parce
qu’avant lui, près de cinq députés du Rdpc décédés depuis le début de
cette législature restent jusque-là sans remplaçants à l’Assemblée
nationale. Au grand dam des plaintes des populations concernées. Surtout
que leurs suppléants ne peuvent pas les remplacer. Tant la loi
régissant les élections législatives en son article 9 dispose que :
«pour chaque siège à pourvoir, il est prévu un candidat titulaire et un
suppléant. Le candidat titulaire et le candidat suppléant se présentent
en même temps devant les électeurs, et dans tous les cas de vacances
autres que le décès du titulaire, le suppléant est appelé à siéger à
l’Assemblée nationale, à la place du député, jusqu’à la fin de mandat de
celui-ci, …» L’article 10 quant à lui précise que lorsqu’il se produit
une ou plusieurs vacances définitives par suite de décès, démission du
titulaire ou du suppléant ou par toute autre cause dans une
circonscription électorale, il est procédé à des élections partielles
dans tous les douze mois qui suivent la vacance. L’alinéa 2 de cet
article rapporte que les élections partielles se déroulent à l’échelon
de la circonscription électorale. Avec une présidentielle prévue
probablement en octobre prochain, il est quasiment difficile pour le Sdf
d’envisager cette possibilité dans un tel chevauchement. Surtout que
c’est Elecam qui devra organiser ces partielles. Or le Sdf ne veut pas
d’Elecam…
Propos recueillis par Jean Francis Belibi