Douala: Des Centrafricains se prononcent sur le putsch de Bangui

DOUALA - 28 MARS 2013
© Valgadine TONGA | Le Messager

Après le coup d’Etat qui a renversé François Bozize, les avis divergent.

Indifférence est bien le mot qu’on peut utiliser pour qualifier l’attitude de certains ressortissants centrafricains résidant au Cameroun. Mercredi 27 mars 2013. Assis dans un restaurant de fortune (appartenant à une centrafricaine) au quartier Bonadibong à Douala, ils sont plus d’une dizaine à déguster une spécialité de leur pays, le couscous à la sauce d’arachide. Ici on parle en langue locale. C’est le «Sango», déclare l’un d’eux. Quand le reporter évoque la raison de sa présence-la situation en Centrafrique-, les premières réactions sont surprenantes. «On ne veut pas en parler. Ça ne nous concerne pas.»

On sait pourtant que l’ancien locataire du Palais de la Renaissance à Bangui, François Bozizé a été chassé du pouvoir dimanche 24 mars 2013 à la suite d’un coup d’Etat dirigé par Michel Djotodia. Ce dernier, leader des rebelles centrafricains de la coalition Séléka s’est autoproclamé président de la République. «C’est une bonne chose. On n’en avait marre de Bozize. Il n’a rien fait pour notre pays. Comment être contente quand je sais que j’étais dans un pays où il m’était impossible de me soigner ? C’est justement pour des raisons de santé que je suis venue au Cameroun», tempête une centrafricaine sous anonymat. L’un de ses frères qui dit vivre également en terre camerounaise depuis des années est «content de ce qui arrive à Bozizé.» Des avis qui ne sont pas partagés par la quasi majorité des clients du restaurant.


«Vendre le pétrole»

Isnet Ndozou vient de s’installer au Cameroun. Non pas qu’il n’en a pas l’habitude. Son métier de convoyeur le pousse à faire régulièrement la ligne Douala-Bangui. Cette fois pourtant, il n’est pas venu de gaîté de cœur. «Je suis arrivé cette année (2013). J’ai fui mon pays parce que je voyais déjà ce qui va arriver. J’ai vu et assisté au putsch qui a renversé Ange-Félix Patassé. Je connais ce qui se passe quand un pays est dans l’instabilité politique, quand les rebelles débarquent. Je ne voulais plus vivre cela», explique ce Centrafricain. Isnet regrette ce qui se passe dans son pays. Pour lui, François Bozizé n’a rien fait pour mériter une fin pareille. «Bozizé travaillait bien. Je sais que la France est derrière tout ça, sinon comment expliquer que les rebelles aient été si lourdement armés. Elle (la France, ndlr) a fait sauter Bozizé simplement parce qu’il a refusé de lui vendre le pétrole, mais plutôt aux chinois. Ce coup d’Etat ne nous fait pas de bien. Le pays va devoir tout recommencer à zéro.» Isnet n’est pas seul à voir un rôle du pays de Hollande dans le putsch en Centrafrique.

Oscar Weya affirme que «ce coup d’Etat est déplorable car Bozizé n’a rien fait de mal. Avec lui, chaque fonctionnaire avait son salaire à la fin du mois, on ne parlait jamais d’arriéré. Voilà que les Français sont venus tout gâter parce qu’on leur a refusé le pétrole. Les dirigeants africains devraient faire preuve de plus de solidarité et de vigilance. » Si Aladi Yaya fait sien les propos d’Oscar, il ajoute que «les Français ont réussi leur coup avec la complicité de l’Etat tchadien.» Aladi lui avoue vivre déjà les conséquences de la crise dans son pays. Lui qui est venu au Cameroun pour des affaires, il était question qu’il retrouve sa famille mardi 26 mars courant. «Ce n’est plus possible maintenant. L’avion ne peut pas encore atterrir au pays. De plus, mon épouse m’a appelé ce matin pour me dire que les rebelles pillent, vandalisent les propriétés de Bozizé. C’est terrible.»

Valgadine TONGA (Stagiaire)


Le consulat centrafricain fermé

Rendu aux environs de 14h au consulat centrafricain à Akwa, pour savoir en gros comment on vit le coup d’Etat, le portail était fermé. Après plusieurs coups sur la porte, aucun signe. Pas de bruit ni l’ombre d’une personne à l’intérieur de la modeste villa. «Ils ne sont plus là. Ils ont fermé très tôt. C’est à cause de tout ce qui se passe dans leur pays», lance le tenancier d’une brocante située juste en face du consulat. Et d’ajouter : «ils ont tenu une réunion ce matin avant de partir.»

V.T. (Stg)


28/03/2013
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