Dossier : Opération épervier, aux premières loges.
Dossier:Opération épervier, aux premières loges.
Par le journal Meteo
Les partisans de la Rose-croix et de la Franc maçonnerie se regardent en chiens de faïence au sommet de l’Etat. Les officines occidentales à la manœuvre.
Le ministre d'Etat secrétaire général de la présidence de la République Laurent Esso est souvent présenté comme nouvelle tête de file de la Rose Croix. Il s'y emploie discrètement, fort de sa position institutionnelle. Ses contacts réguliers avec le secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant, alimentent la chronique sur son repositionnement stratégique auprès des "maîtres français". Depuis que ce dernier l’a relevé de son poste de magistrat pour le nommer chancelier de l’université de Yaoundé, le très prudent et très discret Laurent Esso n’a jamais connu de disgrâce. Après avoir été nommé secrétaire général adjoint de la présidence, en 1988, puis directeur du cabinet civil en 1989, il occupera, à partir de 1996, les ministères de la Justice, de la Santé, de la Défense et des Affaires étrangères. En septembre 2006, il devient secrétaire général de la présidence. Chiraquien affirmé Laurent Esso entend devenir la nouvelle interface entre le président Paul Biya et le président Nicolas Sarkozy. Un rôle que croit déjà jouer Marafa Hamidou Yaya, sarkozyste dans l'âme depuis quelques années. La relation particulière qu'aurait entretenu le ministre d’Etat Marafa Hamidou Yaya avec le général français Raymond Germanos (en charge de certains aspects de la sécurité présidentielle) fait dire à d’aucuns qu'il serait l'homme de la situation. Le 9 octobre Raymond Germanos était présenté devant le tribunal correctionnel de Paris pour "détention d'images pédo-pornographiques". Il encourt deux ans d'emprisonnement et 30.000 euros d'amende. Cette affaire peut avoir une incidence sur l’avenir politique de son poulain au Cameroun.
En effet, le nom de Marafa Hamidou Yaya est souvent cité à tort dans l’affaire Albatros. S'il est constant que, Amadou Ali, vice-Premier ministre en charge de la Justice et Garde des Sceaux n'est pas indifférent à son avenir dans cet appareillage, le récent séjour du secrétaire d'Etat français Jean-Marie Bockel dans son Kolofata natal laisse prospérer des questionnements. Réservé par nécessité plus que par nature, Amadou Ali est sans doute l’un de ceux qui fascinent et qui intriguent le plus. Après avoir occupé plusieurs postes ministériels depuis 1985, notamment la Défense, il hérite de la Justice en 2001 et est, depuis 2004, vice-Premier ministre. À ce titre, il pilote l’opération de lutte contre la corruption baptisée ‘’Épervier’’. Il peut se targuer d’une réelle popularité, en particulier dans sa région d’origine. Personne ne semble avoir oublié qu’il est l’un des initiateurs du rouleau compresseur contre Titus Edzoa. Dans le landerneau politique, en tout cas, les uns et les autres s’activent auprès des ‘’sorciers blancs’’.
Intime. Dans ces jeux d'influence, les officines de conseil en stratégie et d'image sont sollicitées pour assurer la facilitation des contacts. C'est ainsi que le cabinet Euro Rscg Woldwide de Jacques Séguéla est actuellement dirigé par Stéphane Fouks. Les initiés sont légions au sein de la tribu des ‘’sorciers blancs’’, ces conseillers en communication familiers des palais africains. Témoin, Patricia Balme. A l'en croire, la fondatrice de PB Com International n'a jamais évoqué son engagement maçonnique avec ses clients, tels le président camerounais Paul Biya, le chef d'Etat centrafricain François Bozizé, l'opposant ivoirien Alassane Ouattara ou l'ex-ministre français Renaud Dutreil. Etrange coïncidence : tous, à l'exception de Biya, qui serait affilié à la mouvance Rose-Croix, sont des ‘’triponctués’’. Patricia Balme du cabinet de communication espère aussi jouer un rôle dans cet attelage, en synergie avec René Emmanuel Sadi, secrétaire général adjoint de la présidence de la République et secrétaire général du Comité central du Rdpc. L’animation est désormais grande autour de René Sadi, jusqu’à présent peu connu du grand public, depuis qu’il a pris les commandes du parti au pouvoir, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc). Jadis familier de l’ex-président Ahmadou Ahidjo, dont il fut le conseiller diplomatique, il est devenu un intime de Paul Biya. Au point que l’actuel chef de l’État, qui l’emmène systématiquement avec lui lors de ses déplacements à l’étranger, lui a confié, en avril 2007, le secrétariat général du parti, en plus du poste de secrétaire général adjoint de la présidence, occupé depuis 2004. Psychologiquement proche de Dominique de Villepin et compagnon fidèle du président Paul Biya, le positionnement de René Sadi donne des insomnies à Laurent Esso et Marafa Hamidou Yaya. La guéguerre que mène Nicolas Sarkosy à Dominique de Villepin aura-t-elle une incidence sur l’avenir politique de René Sadi ?
Les nouvelles alliances en construction entre les réseaux français et camerounais vont s'appuyer sur les gages de chaque partie à pouvoir satisfaire les besoins de ses interlocuteurs. Les français, eux, veulent des parts de marché. Les Camerounais, eux, le maintien ou l'accession au pouvoir suprême. Paul Biya qui suit de près ces tractations affiche une certaine sérénité, tant il est au courant que Nicolas Sarkozy n'est membre ni de la Rose-Croix, ni de la Franc-maçonnerie. Quoique proche d’Alain Bauer (Grand maître de la franc-maçonnerie), Nicolas Sarkozy semble ne pas partager les démarches de conquête de pouvoir des "mystiques".
De la lumière aux ténèbres
Les frères lumières semblent ne pas se remettre de l’incarcération de Jean Marie Atangana Mebara.
Réseau des réseaux, la maçonnerie n'en finit plus de fasciner, au risque du fantasme. En Afrique plus qu'ailleurs, la saga des ‘’frères trois points’’ s'est trouvé un terreau fertile, tant ses codes et ses usages y font écho à la magie des rites initiatiques ou du bois sacré et à la force ancestrale du clan. Le désir d'accéder à ce sanctuaire laïc de l'élite blanche, puis le souci d'instaurer avec l'ex-métropole coloniale des canaux inconnus des profanes, discrets vecteurs d'influences, ont fait le reste. Le nombre de francs-maçons camerounais est estimé à 500. Le Cameroun, malgré semble-t-il la discrétion de son président, cité régulièrement comme franc-maçon, est du point de vue de l’élite une Grande loge en lui-même, comptant environ une cinq centaine de frères. “Dans le gouvernement, je ne vois pas un seul ministre Rdpc qui ne soit pas maçon”, confiait un homme politique camerounais au journal français l’Express [12/04/2004]. Africaine ou européenne, la franc- maçonnerie inquiète les non-initiés. Un ministre camerounais l'associe aux réseaux corses ou à l'affaire Elf, ‘’qui incarnent l'aspect le plus rétrograde de la «Françafrique».’’ La création d'une loge nationale nécessite le parrainage d'une loge à l'étranger. Sur ce terrain, le Grand Orient de tradition française, plutôt à gauche, et la Grande Loge nationale française (Gnlf) de tradition anglo-saxonne, marquée à droite, de réputation plus affairiste, se concurrencent. Mais les loges africaines se sont émancipées pour entrer à leur tour dans les luttes d'influence.
Jean Marie Atangana Mebara serait, selon certaines sources Franc maçon et particulièrement, adepte de l’Eboka au centre de la stratégie de conquête du pouvoir. Pendant plusieurs mois il avait été étiqueté comme appartenant à la génération 2011 qui planifiait ainsi prendre le pouvoir en 2011, d’où la dénomination de G11. Il s’agit de cette génération de jeunes cadres de l’administration qui se présentent comme étant des "quadra" à leur arrivée aux affaires, notamment au gouvernement, il y a quelques années. Ce sont donc des ministres de la République, des hauts cadres de l’administration, des hommes d’affaires qui estimaient, en toute légitimité prendre les rênes du pouvoir en 2011, pouvoir autour duquel ils gravitaient déjà. Parmi les têtes de file de cette génération 2011, figurerait en bonne place Polycarpe Abah Abah et Jean Marie Atangana Mebara. Sa position de secrétaire général de la présidence de la République le prédestinait certainement à jouer le beau rôle. En mai 2008, l’ancien ministre d’Etat secrétaire de la présidence de la République est arrêté à Yaoundé par la Police suite à l’enquête sur l’affaire ‘’The Albatros’’, l’aéronef présidentiel en mauvais état de fonctionnement qui faillit coûter la vie au chef de l’Etat Paul Biya et à sa famille entre Yaoundé et Paris-Orly en avril 2004. Les relations entre Paul Biya et les Francs maçons se sont dégradés au fil du temps.
En avril 2009, les Francs-maçons de la diaspora nord américaine, adressent une lettre au président Paul Biya afin de lui faire part de leur ‘’profonde préoccupation sur les problèmes de l’heure au Cameroun.’’ Les frères lumière écrivent : ’’ Il nous semble utile de vous dire qu’il faudrait préparer au mieux notre pays pour le futur proche qui pourrait être assez chahuté et chaotique avec à la fois, la fin programmée des énergies fossiles, les problèmes d’environnement, de pauvreté et d’inégalité sociale, qui se poseront avec acuité.’’ Le divorce semble être assurée. Ils précipitent même Paul Biya à la retraite : ‘’Ayez Excellence Monsieur le président de la République, la conscience qu’un jour, une fois votre mission terminée à la tête de la Nation, une fois rentré dans notre belle et grande forêt du Sud, là-bas dans votre Mvomeka’a natal, vous aurez de belles histoires à raconter à vos enfants et petits - enfants. Ce sera le plus grand moment de votre existence, un repos bien mérité parmi les siens, comme dans nos traditions bantous.‘’ Paul Biya n’est visiblement pas de cet avis. Entre temps, d’autres Francs-maçons reconnus comme Pierre Moukoko Mbonjo ont perdu leur poste au gouvernement. En 2003, Pierre Moukoko Mbonjo conduit une délégation de 11 personnes à un convent de la Loge équatoriale où le président Bongo sera investi Grand Maître. Pierre Moukoko Mbonjo est Maître de la Grande loge nationale française (Glnf, section Cameroun, 1999). Pendant ce temps des rosicruciens comme Agbor Tabi, un proche de Titus Edzoa, reviennent au devant de la scène.