« Djangsang » pour tous !
Source: Camer.be 06 04 2022
Les produits décapants ont le vent en poupe et inondent le marché camerounais sous diverses formes et sans contrôles de conformité à la norme.
Ces derniers jours sur les réseaux sociaux, circule une publicité qui fait la promotion d’une méthode « très efficace » de blanchiment de la peau. Il s’agit de l’injection du glutathion, un antioxydant produit par le foie. Une campagne d’ailleurs très relayée. Sauf que toutes les personnes qui rêvent de devenir métisses par un coup de baguette magique ne pourront se procurer cette injection, car les prix ne sont à la portée de tous : 900 000 Fcfa, 1 100 000 Fcfa, 1 400 000 Fcfa, 1 500 000 Fcfa et 1 800 000 Fcfa. Un scandale pour certains internautes qui n’hésitent pas à exprimer leur indignation à l’endroit de cette promotion : « N’importe quoi ! 1 million pour avoir le cancer de la peau ?
Non vous êtes fous ! Donc Dieu a été bête de vous donner une peau noire ! Vous faites honte à notre race », décrit un internaute. Malgré les réactions désobligeantes sur le post, les adeptes de l’éclaircissement volontaire de la peau manifestent un grand intérêt pour l’innovation. Les Camerounais appellent cette pratique le « djansang », en référence à une épice en cuisine.
Publicité
Bien que la pratique du blanchiment de la peau soit un phénomène ancien, elle a pris une grande ampleur auprès des populations ces dernières années, avec la prolifération des formations dans la fabrication des laits, huiles de cheveux etc. Un formateur confie que lorsqu’il lance des ateliers de formation sur la teinture, la fabrication des gâteaux, jus naturel et autres, les Camerounais n’accordent pas un grand intérêt. Mais il suffit juste qu’il annonce en statut WhatsApp et sur Facebook qu’il organise une formation liée à la fabrication des laits, pour que les gens accourent. C’est ainsi que, de plus en plus, les fabricants locaux des laits se font de plus en plus nombreux et tous s’érigent en commerçants.
Ils s’intéressent plus à la fabrication des produits décapants. Et les réseaux sociaux, à leur tour, se positionnent comme canaux d’accompagnement pour la promotion de leurs produits. C’est ainsi que des promoteurs se mettent à vendre un rêve aux internautes. La technique consiste à afficher l’image d’une femme, au teint uniforme de la tête aux pieds, sans cicatrice, ni imperfection visible sur son corps. Tout à côté d’elle, une gamme de produits, pour dire à la communauté que c’est grâce à ces produits que cette dame a cette peau jugée sublime. Les réactions des femmes ne se font pas attendre : « Intéressée » ; « Où êtes-vous situés ? » Le nombre élevé d’abonnés observé sur les pages de ces marchands et la clientèle qui défilent dans les boutiques, montrent à suffisance la forte adhésion des populations au décapage, particulièrement des femmes.
Autres produits
Outre les produits injectables, d’autres produits blanchissants, plus courants, abondent le marché du cosmétique. Pour la plupart du temps, la gamme est composée d’un lait de toilette qui s’applique du cou aux orteils, un gel que l’utilisateur devra appliquer sur une peau sèche, rincer au bout de quelques minutes avant d’utiliser le savon de toilette, un savon de toilette, une crème de visage, un anti tâches, pour appliquer sur les parties rebelles (articulations). Selon que le client veut juste de l’éclat, éclaircir sa peau ou alors devenir métisse une fois, chacun fait son choix au rayon ou alors passe sa commande. Dans certains instituts, ils disent souvent diagnostiquer la peau, avant de conseiller un lait précis. Sauf que quand le client part de chez lui, il a déjà en tête ce qu’il veut.
C’est pourquoi du jour lendemain, une personne au teint foncé devient soudainement claire. Même dans les parfumeries, les propriétaires composent des laits. Cette fois, il s’agit des laits importés, à l’intérieur desquels ils introduisent des produits tels des sérums et vitamines. Peu importe la méthode, chaque secteur a sa clientèle et l’objectif est de devenir « un taxi jaune », comme cela se dit couramment dans la rue. Il arrive souvent que la pratique arrange certaines personnes. Tout comme elle peut rendre d’autres « fanta coca », comme on aime à le dire lorsque l’application a échoué, laissant des parties du corps qui résistent au décapage autrement appelées « parties d’opposition ». Et ces gammes de laits ne sont pas aussi à la portée du premier venu : 30 000 Fcfa, 50 000 Fcfa, 80 000 Fcfa etc. Et chaque jour, les clients se comptent par centaines dans certaines boutiques parcourues à Yaoundé.
Laits
Dans le marché des laits, tous ceux qui les vendent n’en sont pas les fabricants. Certains fabriquent leurs laits d’eux-mêmes, tandis que d’autres confient qu’ils les importent de la Thaïlande. Mais, au vu du rêve qui est vendu sur les réseaux sociaux et sur certaines chaînes de télévision, ceux qui les vendent s’expriment avec beaucoup d’aisance, on dirait qu’ils savent comment ce lait a été conçu, ainsi que ses effets sur la peau. Plus étonnant encore, il y a des gens dans ce secteur dont le travail est de fabriquer des laits en tant que grossistes et de les vendre.
« Il y a des personnes qui ne savent pas fabriquer les laits. Je peux alors leur fournir le lait, le sérum, la lotion. Le demandeur me dit s’il a déjà un nom de marque, achète les bouteilles et me les remet. Ou alors je lui livre les laits dans des bidons ou des seaux et il les charge dans des bouteilles. Il conçoit les étiquettes et les colle, puis il commence à commercialiser en ouvrant par exemple une page Facebook », révèle une fabricante des laits. C’est ainsi que le phénomène prend de l’ampleur, sous le regard des autorités. ¨