Depuis les émeutes de 2008: Pierre Essobo Andjama croupit en prison

Depuis les émeutes de 2008: Pierre Essobo Andjama croupit en prison

Prison:Camer.bePas de grâce présidentielle pour lui. Arrêté et condamné pour avoir participé aux émeutes de la faim de février 2008, Essobo Andjama purge dix ans de prison.Pierre Essobo Andjama est encore incarcéré à la prison de Douala pour sa participation aux manifestations d’il y a quatre ans, qualifiées d’"émeutes de la faim". Il avait alors été condamné à dix ans de prison pour pillage en bande, destructions de biens d’autrui.

Entre le 25 et le 28 février 2008, des manifestations contre la vie chère avaient éclaté au Cameroun et s’étaient vite transformées en émeutes. Sortis pour crier leur ras le bol, de nombreux jeunes avaient saccagé, pillé, brûlé des commerces et des entreprises, vandalisé des édifices publics. L'armée était intervenue farouchement Des milliers de jeunes, dont de nombreux innocents, avaient été interpellés. Une centaine, selon la société civile, était tombée sous les balles.

Seule une amnistie…

Interpellé près de trois mois après les émeutes, Simon-Pierre Essobo Andjama avait été condamné, le 19 janvier 2009, par le tribunal de Grande instance du Moungo à dix ans de prison, et écroué à la prison de Nkongsamba. Le 16 décembre 2009, la cour d’Appel du Littoral rejetait son appel au motif que son mémoire n’avait pas été déposé dans les délais prescrits par la loi.

"Il n’existe pas d’alternative pour le cas Essobo, en dehors d’une amnistie du chef de l’Etat. Autrement dit, celui-ci doit blanchir toutes les personnes poursuivies et condamnées dans le cadre de ces événements qui ne doivent plus être considérés comme des infractions punissables par la loi", plaide, aujourd’hui, Maître René Manfo, avocat des coaccusés de Essobo qui ont déjà tous purgé leurs peines dans cette affaire. L’avocat s’étonne cependant de ce que des Camerounais soient encore écroués pour leur implication dans ces émeutes de février 2008, alors "qu’elles ont été publiquement qualifiées de grève de la faim".

Le président Paul Biya avait même gracié, le 20 mai 2008, les personnes interpellées. Pour la plupart, elles avaient été condamnées à des peines allant de trois mois à un an de prison. Cependant, la justice avait eu la main lourde pour Essobo qui était par ailleurs coaccusé de Paul Eric Kingue, ancien maire de Njombe Penja dont le procès a toujours été considéré comme "politique". En effet, après avoir été condamné à trois ans de prison pour sa supposé participation aux émeutes de 2008, Paul Eric Kingue a été condamné une seconde fois à dix ans de prison pour le détournement de 1.400 000 Fcfa à la mairie dont il était le maire. La victime a toujours soutenu avec des preuves à l'appui qu'il est victime d'une cabale de la multinationale française PHP, spécialisé dans la production de la banane qui depuis des décennies ne reversait pas à cette mairie les impôts dus. Le maire avait osé les réclamer et porté l'affaire à la connaissance du premier ministère. Ses adversaires avaient alors juré vengeance.

Loin de sa famille

Dans son rapport de 2009 sur le Cameroun, Amnesty International avait été étonné par la célérité des procès. "Bien qu’il faille habituellement des années à l’appareil judiciaire camerounais pour traduire les suspects en justice, au mépris du Code de procédure pénale du pays, des centaines de personnes accusées d’avoir participé aux émeutes de février 2008 ont été jugées dans les quatre semaines qui ont suivi leur interpellation pour avoir troublé l’ordre public et détruit des biens appartenant à des particuliers et à l’État."

Le calvaire de Essobo Andjama, 28 ans et ancien ouvrier dans les Plantations du Haut Penja (Php), continue à la prison de Douala. Il est logé à la cellule 15 où s'entassent plusieurs dizaines de détenus. Amaigri, il se remet peu à peu d'une tuberculose mais demeure beaucoup moins serein. "Les conditions de détention sont très difficiles. Ma famille réside à Penja. Elle me rend visite environ une fois par trimestre", affirme-t-il. Ce célibataire souhaite son transfèrement à la prison de Mbanga pour y purger le reste de sa peine. Il sera alors plus proche de sa famille.

© JADE : Théodore Tchopa


14/02/2012
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