Dénouement - Les dessous de la libération des otages français: Le Cameroun s’est appuyé sur les chefs traditionnels - Le film des négociations

Douala, 22 avril 2013
© Rodrigue N. TONGUE | Le Messager

La famille Moulin-Fournier a été libérée en partie grâce à l’appui des autorités traditionnelles locales.

Il y a à la base de l’heureux dénouement de 60 jours de captivité de la famille de 7 Français enlevés le 19 février 2013 et emmenés au Nigeria, un homme mystère. Celui-là dont tous les services de sécurité parlent depuis la date de la libération de Tanguy Moulin-Fournier, de son frère, de sa femme et de leurs quatre enfants. Si aucun officiel contacté par Le Messager ne donne son nom, presque toutes les sources renseignent que c’est lui qui aurait établi les premiers contacts entre les ravisseurs et les services spéciaux camerounais notamment des éléments du Bataillon d’intervention rapides (Bir) et de la Direction générale de la recherche extérieure (Dgre) qui ont mené l’opération de bout en bout jusqu’à l’heureux dénouement. Le même homme mystère avait pu même avoir un échange de mails avec le chef de famille enlevé.

Mais d’après d’autres sources généralement crédibles, cet homme mystère serait un apparatchik du régime de Yaoundé fin connaisseur du département du Mayo Sava dans la région de l’Extrême-nord, frontalière au Nigeria et ayant la mainmise sur les chefs traditionnels locaux. C’est à travers ses « précieux contacts » que Yaoundé aura pu efficacement mené l’opération de libération des otages. Celles qui avaient débuté d’après des sources crédibles au ministère camerounais des Relations extérieures longtemps avant la première visite de Fabius à Yaoundé, le 15 mars 2013, avec la libération par le Cameroun d’une demi-dizaine de membres de Boko Haram détenus au Cameroun. Le ministre français des Affaires étrangères heureux de ce grand pas du Cameroun était alors venu à Yaoundé féliciter au nom de François Hollande, le président camerounais. Paul Biya venait ainsi de donner une suite aux premières exigences de Boko Haram en remettant autour du 10 mars, à la secte, ses membres emprisonnés au Cameroun.

Après cette libération des membres de la nébuleuse religieuse par les autorités camerounaises, on aura d’ailleurs observé dans les milieux diplomatiques et sécuritaires camerounais, une frénésie causée par le fait que la famille Moulin-Fournier n’aura pas été libérée. Ceci aura poussé le régime de Yaoundé à penser que les revendications de Boko Haram allaient bien au-delà des membres au demeurant déjà libres.


Rançon

Le Cameroun qui est passé à la vitesse supérieure en début de semaine dernière aura alors convaincu (par d’autres moyens) les ravisseurs de libérer les otages. Ainsi les Moulin-Fournier ont été remis au matin de jeudi aux chefs traditionnels de Kalabade au Nigeria (contrairement à l’information officielle) qui à leur tour, les ont remis à ceux de l’Extrême-nord dans le village Kolofata dans le Mayo-Sava. Directement, ils ont été confiés à une équipe du Bir qui a conduit ce qui sont devenus ex-otages jusqu’à Maroua. Yaoundé suivant les évènements de près, a alors dépêché Ferdinand Ngoh Ngoh, secrétaire général à la Présidence sur les lieux dans l’après-midi de jeudi 18 avril 2013 recevoir le « coli ». C’est alors seulement que le vol spécial affrété par la Camair-co était près à quitter la région de l’Extrême-nord que le patron administratif de la Présidence a signé un communiqué annonçant la libération des otages, lequel a été lu pour la première fois par les médias nationaux juste après 7 heures vendredi dernier.

Le dénouement de cette affaire a permis d’établir que les ravisseurs originels de la famille Moulin-Fournier n’appartenaient pas à la secte Boko Haram. C’est au vu de l’intérêt porté par l’opinion sur leur enlèvement que leurs premiers bourreaux - une « bande de coupeurs de route » les ayant enlevés le 19 février 2013- les auraient vendus à une branche de Boko Haram. D’où le long moment passé entre l’enlèvement et les premières revendications.

S’agissant de la rançon, aucune source militaire n’est formelle sur un quelconque versement. Mais quelques agents de la sécurité nationale contactés par Le Messager estiment que vu le mode opératoire de la libération des otages qui laisse bien croire qu’il y a pas eu de contrainte chez les ravisseurs… mieux qu’il y aurait même eu consentement, les ravisseurs ont été certainement «mouillés ». Dans ces cas, précise nos sources, la rançon peut s’élever à des milliards de FCfa au regard de la médiatisation de l’enlèvement et la présence des enfants parmi les otages.

Rodrigue N. TONGUE



22/04/2013
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