Deniers publics: L’Epervier à l’épreuve des preuves
Deniers publics: L’Epervier à l’épreuve des preuves |
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YAOUNDE - 15 MARS 2010 © La Météo |
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Les procès initiés dans le cadre de la traque des voleurs à col blanc traînent énormément. |
Les procédures prennent désormais beaucoup de temps parce que le parquet peine à produire des preuves. Il devient de plus en plus difficile d'inculper les mis en cause. Et pour éviter tout aveu d'échec, toutes sortes de subterfuges sont utilisées pour maintenir ces anciens barrons du régime en place derrière les barreaux. Ce en violation de l'article 221 du Code de procédure pénale qui précise « La durée de la détention provisoire est fixée par le juge d'instruction dans le mandat. Elle ne peut excéder six (6) mois. Toutefois, elle peut être prorogée par l'ordonnance motivée, au plus douze (12) mois en cas de crime et six (6) en cas de délit ». Or, Urbain Olanguena Awono, Polycarpe Abah Abah et Paulin Abono Moampamb ont déjà tous passé plus de 12 mois dans l'univers carcéral sans être condamnés.
Lancée depuis 2006, la terrible opération épervier n'est pas encore parvenue à faire ses preuves avec seulement 8 emprisonnements et aucun montant rapatrié jusqu'à ce jour, malgré les énormes moyens affectés pour que cette opération d'assainissement soit un succès. Sur le plan institutionnel, plusieurs administrations sont mises à contribution. La présidence de la République, le ministère de la Justice, le Consupe, l'ANIF, la Police et la gendarmerie ont tous le pied à l'étrier. Et financièrement, on parle de plus de 9 milliards de francs CFA dépensés par l’Etat du Cameroun pour retrouver et ramener l'argent détourné par les pontes du régime. Cette somme est le cumul des contrats signes entre la République du Cameroun et les différentes structures chargées de « conduire une enquête d'expertise et d’investigations financières internationales contre la corruption et le détournement des fonds de l’Etat du Cameroun, auprès des établissements financiers et des organismes financiers internationaux ( ... ) et d'établir des profils détaillés avec indication des comptes bancaires et avoirs détenus directement ou indirectement par certains pontes du régime », comme le précise la lettre de mission accompagnée des contrats et adressée à Dooh Collins Francis, directeur du très discret cabinet Strageco, chargé également de l'enquête par le Vice-premier ministre, ministre de la Justice. Ainsi Friendship Worldwide Inc., société chargée d'établir les comptes détaillés de 12 profils et de bloquer les actifs soustraits à la République du Cameroun afin de les récupérer pour le compte camerounais, serait rémunérée à 148 584 000 francs CFA par profil. Cette société devrait ainsi encaisser au total 1 783 008 000 francs CFA et devrait toucher une fois le travail terminé 2.952.000.000 de francs CFA par profil, ce qui fixe sa rémunération à 4 735 008 000 francs CFA. En plus de tous ces versements, Friendship Worldwide Inc. devrait toucher 5% des montants qui seront recouvrés par le Cameroun. Hors mis Friendship Worldwide Inc., l'Etat du Cameroun a également fait intervenir Qatar Suisse Services pour fouiller les comptes et avoirs de 37 autres personnes tenues en anonymat. Pour cette opération, ladite société devrait toucher 110.500.000 francs CFA par profil. Fixant l'enquête sur 37 personnes à traquer, le Cameroun déboursera pour cette opération 4.309.500.000 francs CFA. Et, des informations puisées à bonnes sources indiquent que Jacques Verges a touché d'énormes royalties. Mais au final, la montagne va accoucher d'une souris. Il n'y a pas de preuves et les dossiers sont vides. En attendant, ils sont en prison.