D'après wikileaks, le chef de l'Etat veut ainsi contrôler l'influence du grand Nord et des grandes villes sur le jeu politique.
Il y a trois ans, le gouvernement de la République du Cameroun rendait publics les résultats du dernier recensement effectuée en 2005. soit cinq ans plus tard. a l’époque des faits, à la question de savoir pourquoi avoir attendu aussi longtemps, le Bureau central des recensements et des études de population (Bucrep), qui a coordonné l’opération en déployant 17 000 agents sur le terrain, soulignait que «les résultats du 3ème recensement sont publiés en 2010 en raison de la complexité d’un certain nombre de tâches à exécuter après le dénombrement (acheminement des questionnaires à Yaoundé, by Savings Wave">archivage, enquête post-censitaire, collationnement, vérification et codage, traitement des données, etc.) et des difficultés financières rencontrées, qui ont entrainé un retard dans la mise en oeuvre des activités».
Mais un câble de wikileaks indique que Louis Paul motaze, qui occupait le poste de ministre de l’economie et de la Planification a confié à l’ambassadeur des etats-Unis au Cameroun, Janet garvey, que les résultats attendaient l’approbation de la présidence de la République. L’actuel secrétaire général des services du Premier ministre avait, par ailleurs, ajouté qu’il craignait que les résultats aient été manipulés par «les élites». Si l’on s’en tient aux chiffres révélés par le câble de wikileaks, cette manipulation a effectivement eu lieu.
En effet, les américains soulignent qu’un de leurs contacts au Fonds des Nations Unies pour la population (Fnuap), Bureau de Yaoundé, qui a participé a l’opération de dénombrement leur a remis un document de synthèse confidentiel qui n’a jamais été publié du fait de sa «sensibilité politique». D’après le responsable du Fnuap, dont l’organisation a financé l’opération, «le recensement projetait une population totale de 18 millions en janvier 2008 et 21,2 millions en 2015».
D’après le recensement de 2005, la plus peuplée des 10 régions du Cameroun est l'extrême-nord (3,1 millions de personnes). Cette région est suivie du Centre (2,9 millions, dont 56% étaient à Yaoundé), le Littoral (2,3 millions, dont 74% étaient à Douala), suivi par l'Ouest (1,8 millions ), le nord-Ouest (1,7 million), du nord (1,6 million) et le sud-Ouest (1,3 millions). Les régions les moins peuplées sont l'adamaoua (environ 887.000), l'est (797,000) et le sud (555.000). Dans le document transmis au département d’etat, à Washington, les américains précisent que, selon le résumé du recensement et les projections qui découlent des modèles de croissance de 2005 à 2008, les régions les plus peuplées du Cameroun seraient l'extrême-nord (18,2% du total), l'Ouest (10,3%), du nord (10,1%) et Douala (10,1%), qui enregistrent les plus forts taux de croissance démographique.
Or en 2010, d’après le gouvernement, le Centre vient en première position avec 3.525.664 personnes, contre 3.480.141 dans l’extrême nord classé au 2ème rang. On compte 2.865.795 dans le Littoral, 2.050.229 dans le nord, 1.804.695 dans le nord-Ouest, 1.585.285 à l’Ouest. 801.968 à l’est, l’adamaoua 884.289, le sud a 692.642 habitants. Le sud-Ouest héberge 1.384.286 habitants. Question : Pourquoi les chiffres des américains et du Fnuap de 2005 et 2008 ne coïncident-ils pas avec ceux du gouvernement camerounais ?
La présidence peut essayer de truquer la version finale ou libérer assez tard les résultats pour freiner ses implications politiques (tels que les changements possibles au registre des électeurs et/ou redécoupage électoral pour les élections présidentielle et législatives à venir). Des révélations sur les grands mouvements de population pourraient également avoir un impact sur les circonscriptions électorales, et partant sur l'état des listes électorales. Lesquelles suggèreraient que le grand Nord et les grandes villes puissent obtenir plus de ressources et d'attention», soulignent les américains.
Du reste, les diplomates du pays de l’oncle sam prédisaient que les résultats du recensement de 2005 ne correspondraient pas «à l'urbanisation rapide du pays [le Cameroun, ndlr], à la pauvreté grandissante ambiante et à l'importance démographique croissante du Nord». au vu de ce qui précède, faut-il encore être surpris que Paul Biya ignore les résultats du recensement de 2005 dans le décret portant découpage électoral signé le 3 juillet dernier, en vue des élections du 30 septembre prochain ?