Déballages: Pourquoi la République s'enrhume quand Marafa éternue
YAOUNDE - 06 JUILLET 2012
© Etienne PENDA | Correspondance
L'ex-secrétaire général à la Présidence de la République touche aux endroits où ça fait le plus mal. Et on comprend le désarroi qui s'est emparé du régime qui multiplie des erreurs.
Il est absolument difficile et mal aisé de se faire une religion sur l'affaire Marafa. L'ex-Sgpr n’est rien de plus que la victime d'une cabale politique qui se complique de mille erreurs judiciaires, ou alors n'est-il que le coupable malgré lui des faits graves mis à sa charge ? Les conditions drolatiques de son arrestation, les conditions théâtrales de son déferrement dans une cellule au Secrétariat d'Etat à la défense, les antécédents pendant sa collaboration avec Paul Biya, la lecture minutieuse des rapports de police ou des tribunaux sur la question, jettent le trouble dans l'opinion. L'observateur perd d'autant plus sa sérénité lorsqu'il doit évaluer la question sous le brouhaha des scandales d'homosexualité (qui nous retrempent dans la pratique détestable du «journalisme des listes»), des listes des membres du futur gouvernement de Marafa et des milices à la solde de l'ex-ministre d'Etat.
La ténébreuse affaire Albatros
Marafa Hamidou est officiellement aux arrêts à cause des 31 millions de dollars de l'affaire Albatros. D'entrée de jeu, tout est compliqué. Marafa n'a jamais personnellement eu la charge de la gestion des fonds en question. L'argent sorti des caisses de la SNH par Adolphe Moudiki a été viré, selon Michel Meva'a Meboutou alors ministre des Finances et du Budget, pour partir à GIA International (29 millions de dollars) et le reste, soit 2 millions de dollars, à la Commercial Bank of Cameroon. Jusque-là, on voit mal comment Marafa qui n'est ni gestionnaire de la Banque ni directeur de GIA International, pourrait être inculpé.
On est en revanche face à un Etat imprudent qui joue à se prévaloir de ses propres turpitudes. Un avion de type Boeing Business Jet Vip ne coûte pas 31 millions de dollars, il coûte au moins deux fois plus. L'Etat a commis une première erreur en prenant l'option d'acheter à crédit un avion pour les déplacements du chef de l'Etat. Le montage financier préconisé consistait donc à payer par traites, sur dix ans, l'avion officiel d'un Etat souverain. Personne ne s'expliquera une telle fumisterie. Avant l'avènement du Renouveau, le Cameroun avait toute une flottille d'avions en propriété. Un Boeing 747 et trois autres B 737 à la Cameroon Airlines, un «Hirondelle» et un «Pélican» pour la flotte présidentielle, sans compter la demi-dizaine d'avions de moindre gabarit pour les appoints.
Le scandale a éclaté, tous les arguments sont bons pour expliquer la bourde du gouvernement. Le Cameroun était sous surveillance par le Fmi et la Banque mondiale, il nous était interdit d'acheter un avion neuf. Et surtout, il fallait veiller à ne pas rater le coche du point d'achèvement de l'initiative Ppte. Le Cameroun va lui-même aménager la chausse-trappe dans laquelle une bonne dizaine de hauts fonctionnaires vont être piégés.
Atangana Mebara qui, jusqu'au moment de sa nomination, n'était pas au fait du dossier du BBJ, va décider de reprendre les choses en main. Pour lui, plus royaliste que le roi et soucieux de démanteler les réseaux installés par son prédécesseur au Secrétariat général de la Présidence, fait arrêter l'opération d'acquisition du BBJ. Pour lui, il est hors de question que le président de la République se retrouve à voyager à travers le monde avec un avion gagé. C'est lui qui va ordonner la commande d'un avion de remplacement, un Boeing 767-300 VIP. C'est encore lui ii va signer le contrat d'un avion de location, un vieil appareil de type 767-200 repeint et baptisé l'Albatros. Un avion dont une mission d'experts envoyés sur place aux Etats-Unis émet des doutes sur la navigabilité de l'appareil qui présentait des fuites de fluide à certains endroits. La suite quasi tragique de l'affaire est connue.
En dix mots comme en cent, Marafa n’a donc jamais été mêlé à l'affaire de l'avion baptisé l'Albatros. Par contre, son nom apparaîtra dans un rapport d'enquête de la justice suisse. Il aurait été, selon les enquêteurs suisses, le destinataire d'une somme de un million de dollars que Michel Fotso (selon la même enquête) aurait tenté de transférer à partir d'un compte en Suisse dans lequel l'argent viré à GIA International s'était retrouvé. On a fait échec à l'opération, conséquence l'argent n'est jamais arrivé. On se demande donc de quoi Marafa pourrait ben être coupable. Peut-être de tentative de coaction de détournement de deniers publics... alors qu'il est établi qu'il n'a jamais eu à mouvementer les comptes qui avaient reçu les virements servis par la Snh et le ministre camerounais des Finances.
Qui sème la tempête récolte un cyclone
Quelques mois avant la présidentielle, dans les confidences reprises par Wikileaks peu avant la présidentielle de 2011, Marafa Hamidou Yaya s'était ouvert de ses craintes à des diplomates américains à Yaoundé : «Je pourrai bien finir en prison». Il y eut ces manœuvres à répétition du patron de la police visant à lui retirer son passeport. Il aurait donc pu en conclure que l'étau se resserrait autour de lui, d'autant plus que ses antécédents étaient connus, y compris au moment de la convocation du dernier congrès ordinaire du Rdpc. Alors que le secrétaire général du parti, René Emmanuel Sadi, se battait pour un congrès ordinaire, Marafa tenait des arguments contraires, pour un congrès extraordinaire. Il était désigné au sein du bureau politique comme celui qui pensait que Paul Biya ne se représenterait pas. Erreur ...
Au fond, il y a quatre ans au moins que l'ex-ministre d'Etat chargé de l'Administration du Territoire aurait dû être en prison. En fait, il était dans la même charrette que son successeur Atangana Mebara, l'ex-ministre de l'Economie et des Finances Polycarpe Abah Abah et l'ex-ministre de la Santé, Urbain Olanguena. Tous les quatre étaient accablés d'avoir, cinq ans plus tôt, pris langue avec Nicolas Sarkozy qui jurait pendant sa campagne de libérer l'Afrique de ces dictateurs qui jouaient à s'éterniser au pouvoir en Afrique. Selon Omar Bongo qui aurait vendu la mèche à son voisin, les quatre ministres auraient même grassement financé la campagne de leur mentor de l'Elysée. Contrairement aux trois autres, Marafa bénéficiera d'un petit sursis: Paul Biya avait besoin d'un peu de temps pour régler la redistribution des cartes politiques dans le Nord. Par exemple en ralliant le fils d'Ahmadou Ahidjo. La messe était donc dite, surtout que l'ex-SGPR avait eu l'outrecuidance suicidaire de «conseiller» à Paul Biya de ne pas se représenter.
La curiosité est que Marafa l'ait su avant tout le monde et qu'il n'ait pris aucune précauti6n pour se mettre à l'abri. A l'exemple de l'ancien ministre des Travaux publics, Ambassa Zang. Presque certain qu'il bénéficierait d'une mesure d'impunité, Marafa a accepté d'affronter son destin. Un destin dont il ne peut rien garantir. Dans sa première lettre à Paul Biya, il indique qu'il sait qu'on pourrait le retrouver mort un beau matin. Un détail qui ne trompe guère. Les conclusions sont vite tirées : l'ex-secrétaire général de la Présidence a mis tout son temps à profit pour préparer la contre-attaque au cas où il lui arrivait une mésaventure. Dans ce cas, le déballage est l'arme secrète des fonctionnaires en disgrâce ou en déchéance qui savent qu'ils n'ont plus rien à perdre une fois qu'ils sont rattrapés par une justice riche et déroutante de ses inconnues juridiques. Selon les indiscrétions de ses partisans, ce n'est pas seulement cinq lettres quel l'ex-SGPR va servir à l'opinion au tribunal duquel il a tenu de s'adresser. Il y en aura au moins 300, comme dans une version tropicale de Wikileaks. Peu importe qu'il soit embastillé dans une cellule haute sécurité au Sed, l'opinion continuera à être servie, n'est pas l'avis de la justice camerounaise. Surtout avec les histoires sans fin autour des avions camerounais. La logique de Marafa est toute simple: puisqu'il est inculpé pour une histoire d'avion alors qu'il n'a pas pris un centime, il va nous révéler deux autres histoires d'avions, plus scabreuses que la sienne, et pour lesquelles les coupables sont connus et nommément désignés. Mais ces coupables-là n'ont jamais été inquiétés. Et là, les révélations de l'ex-ministre d'Etat font mal. Si le Président camerounais veut paraître sérieux aux yeux de la communauté internationale, il devrait ordonner l'instruction d'un procès contre Foumane Akame, son conseiller très spécial des affaires juridiques et secrétaire permanent du conseil de la Magistrature. Et d'un second contre Issa Tchiroma, le ministre de la Communication qui doit avoir perdu le sommeil depuis les révélations de Marafa.
Le dossier Foumane Akame
Le conseiller juridique de Paul Biya, qui se prend pour le véritable Garde des Sceaux a des soucis à se faire. Il est impliqué dans deux dossiers, celui des indemnisations du crash du Boeing 737 en 1995, et celui de l'argent rétrocédé par la SAA après la dénonciation du contrat de maintenance passé avec la Camair. L'histoire n'a au fond rien d'un scoop. Chief Milla Assoute, exilé politique et candidat interdit à une élection présidentielle au Cameroun dénonce depuis plusieurs années déjà le hold-up de Foumane Akame. Avec les révélations de Marafa, Paul Biya aurait envoyé le dossier à Laurent Esso, qui ne risque pas d'en inquiéter quelques-uns et en laisser quelques autres en liberté. Ils risquent tous d'y passer, lui et Issa Tchiroma qu'on crédite de quelques beaux investissements dans l'hôtellerie en Afrique du Sud.
Restera pour Foumane, le dossier des milliards de Chanas et Privat versés après le crash de Youpwè. L'argent n'a pas servi à dédommager les victimes du crash ou leurs ayants droit, il a fini dans un compte «personnel» de Foumane.
Qui souffle la tempête récolte un cyclone. Tant pis si Issa Tchiroma pense que les révélations de Marafa ne sont rien de plus que du pain rassis, et que le scandale du crash de 1995 est la responsabilité de l'Etat. Paul Biya a toujours eu un grille-pain dans ses bagages, et un Etat qui se sent menacé sait trouver des crétins à qui on fera porter le chapeau.
Source: Les Nouvelles du pays N°178 DU 06 Juillet 2012
© Etienne PENDA | Correspondance
L'ex-secrétaire général à la Présidence de la République touche aux endroits où ça fait le plus mal. Et on comprend le désarroi qui s'est emparé du régime qui multiplie des erreurs.
Il est absolument difficile et mal aisé de se faire une religion sur l'affaire Marafa. L'ex-Sgpr n’est rien de plus que la victime d'une cabale politique qui se complique de mille erreurs judiciaires, ou alors n'est-il que le coupable malgré lui des faits graves mis à sa charge ? Les conditions drolatiques de son arrestation, les conditions théâtrales de son déferrement dans une cellule au Secrétariat d'Etat à la défense, les antécédents pendant sa collaboration avec Paul Biya, la lecture minutieuse des rapports de police ou des tribunaux sur la question, jettent le trouble dans l'opinion. L'observateur perd d'autant plus sa sérénité lorsqu'il doit évaluer la question sous le brouhaha des scandales d'homosexualité (qui nous retrempent dans la pratique détestable du «journalisme des listes»), des listes des membres du futur gouvernement de Marafa et des milices à la solde de l'ex-ministre d'Etat.
La ténébreuse affaire Albatros
Marafa Hamidou est officiellement aux arrêts à cause des 31 millions de dollars de l'affaire Albatros. D'entrée de jeu, tout est compliqué. Marafa n'a jamais personnellement eu la charge de la gestion des fonds en question. L'argent sorti des caisses de la SNH par Adolphe Moudiki a été viré, selon Michel Meva'a Meboutou alors ministre des Finances et du Budget, pour partir à GIA International (29 millions de dollars) et le reste, soit 2 millions de dollars, à la Commercial Bank of Cameroon. Jusque-là, on voit mal comment Marafa qui n'est ni gestionnaire de la Banque ni directeur de GIA International, pourrait être inculpé.
On est en revanche face à un Etat imprudent qui joue à se prévaloir de ses propres turpitudes. Un avion de type Boeing Business Jet Vip ne coûte pas 31 millions de dollars, il coûte au moins deux fois plus. L'Etat a commis une première erreur en prenant l'option d'acheter à crédit un avion pour les déplacements du chef de l'Etat. Le montage financier préconisé consistait donc à payer par traites, sur dix ans, l'avion officiel d'un Etat souverain. Personne ne s'expliquera une telle fumisterie. Avant l'avènement du Renouveau, le Cameroun avait toute une flottille d'avions en propriété. Un Boeing 747 et trois autres B 737 à la Cameroon Airlines, un «Hirondelle» et un «Pélican» pour la flotte présidentielle, sans compter la demi-dizaine d'avions de moindre gabarit pour les appoints.
Le scandale a éclaté, tous les arguments sont bons pour expliquer la bourde du gouvernement. Le Cameroun était sous surveillance par le Fmi et la Banque mondiale, il nous était interdit d'acheter un avion neuf. Et surtout, il fallait veiller à ne pas rater le coche du point d'achèvement de l'initiative Ppte. Le Cameroun va lui-même aménager la chausse-trappe dans laquelle une bonne dizaine de hauts fonctionnaires vont être piégés.
Atangana Mebara qui, jusqu'au moment de sa nomination, n'était pas au fait du dossier du BBJ, va décider de reprendre les choses en main. Pour lui, plus royaliste que le roi et soucieux de démanteler les réseaux installés par son prédécesseur au Secrétariat général de la Présidence, fait arrêter l'opération d'acquisition du BBJ. Pour lui, il est hors de question que le président de la République se retrouve à voyager à travers le monde avec un avion gagé. C'est lui qui va ordonner la commande d'un avion de remplacement, un Boeing 767-300 VIP. C'est encore lui ii va signer le contrat d'un avion de location, un vieil appareil de type 767-200 repeint et baptisé l'Albatros. Un avion dont une mission d'experts envoyés sur place aux Etats-Unis émet des doutes sur la navigabilité de l'appareil qui présentait des fuites de fluide à certains endroits. La suite quasi tragique de l'affaire est connue.
En dix mots comme en cent, Marafa n’a donc jamais été mêlé à l'affaire de l'avion baptisé l'Albatros. Par contre, son nom apparaîtra dans un rapport d'enquête de la justice suisse. Il aurait été, selon les enquêteurs suisses, le destinataire d'une somme de un million de dollars que Michel Fotso (selon la même enquête) aurait tenté de transférer à partir d'un compte en Suisse dans lequel l'argent viré à GIA International s'était retrouvé. On a fait échec à l'opération, conséquence l'argent n'est jamais arrivé. On se demande donc de quoi Marafa pourrait ben être coupable. Peut-être de tentative de coaction de détournement de deniers publics... alors qu'il est établi qu'il n'a jamais eu à mouvementer les comptes qui avaient reçu les virements servis par la Snh et le ministre camerounais des Finances.
Qui sème la tempête récolte un cyclone
Quelques mois avant la présidentielle, dans les confidences reprises par Wikileaks peu avant la présidentielle de 2011, Marafa Hamidou Yaya s'était ouvert de ses craintes à des diplomates américains à Yaoundé : «Je pourrai bien finir en prison». Il y eut ces manœuvres à répétition du patron de la police visant à lui retirer son passeport. Il aurait donc pu en conclure que l'étau se resserrait autour de lui, d'autant plus que ses antécédents étaient connus, y compris au moment de la convocation du dernier congrès ordinaire du Rdpc. Alors que le secrétaire général du parti, René Emmanuel Sadi, se battait pour un congrès ordinaire, Marafa tenait des arguments contraires, pour un congrès extraordinaire. Il était désigné au sein du bureau politique comme celui qui pensait que Paul Biya ne se représenterait pas. Erreur ...
Au fond, il y a quatre ans au moins que l'ex-ministre d'Etat chargé de l'Administration du Territoire aurait dû être en prison. En fait, il était dans la même charrette que son successeur Atangana Mebara, l'ex-ministre de l'Economie et des Finances Polycarpe Abah Abah et l'ex-ministre de la Santé, Urbain Olanguena. Tous les quatre étaient accablés d'avoir, cinq ans plus tôt, pris langue avec Nicolas Sarkozy qui jurait pendant sa campagne de libérer l'Afrique de ces dictateurs qui jouaient à s'éterniser au pouvoir en Afrique. Selon Omar Bongo qui aurait vendu la mèche à son voisin, les quatre ministres auraient même grassement financé la campagne de leur mentor de l'Elysée. Contrairement aux trois autres, Marafa bénéficiera d'un petit sursis: Paul Biya avait besoin d'un peu de temps pour régler la redistribution des cartes politiques dans le Nord. Par exemple en ralliant le fils d'Ahmadou Ahidjo. La messe était donc dite, surtout que l'ex-SGPR avait eu l'outrecuidance suicidaire de «conseiller» à Paul Biya de ne pas se représenter.
La curiosité est que Marafa l'ait su avant tout le monde et qu'il n'ait pris aucune précauti6n pour se mettre à l'abri. A l'exemple de l'ancien ministre des Travaux publics, Ambassa Zang. Presque certain qu'il bénéficierait d'une mesure d'impunité, Marafa a accepté d'affronter son destin. Un destin dont il ne peut rien garantir. Dans sa première lettre à Paul Biya, il indique qu'il sait qu'on pourrait le retrouver mort un beau matin. Un détail qui ne trompe guère. Les conclusions sont vite tirées : l'ex-secrétaire général de la Présidence a mis tout son temps à profit pour préparer la contre-attaque au cas où il lui arrivait une mésaventure. Dans ce cas, le déballage est l'arme secrète des fonctionnaires en disgrâce ou en déchéance qui savent qu'ils n'ont plus rien à perdre une fois qu'ils sont rattrapés par une justice riche et déroutante de ses inconnues juridiques. Selon les indiscrétions de ses partisans, ce n'est pas seulement cinq lettres quel l'ex-SGPR va servir à l'opinion au tribunal duquel il a tenu de s'adresser. Il y en aura au moins 300, comme dans une version tropicale de Wikileaks. Peu importe qu'il soit embastillé dans une cellule haute sécurité au Sed, l'opinion continuera à être servie, n'est pas l'avis de la justice camerounaise. Surtout avec les histoires sans fin autour des avions camerounais. La logique de Marafa est toute simple: puisqu'il est inculpé pour une histoire d'avion alors qu'il n'a pas pris un centime, il va nous révéler deux autres histoires d'avions, plus scabreuses que la sienne, et pour lesquelles les coupables sont connus et nommément désignés. Mais ces coupables-là n'ont jamais été inquiétés. Et là, les révélations de l'ex-ministre d'Etat font mal. Si le Président camerounais veut paraître sérieux aux yeux de la communauté internationale, il devrait ordonner l'instruction d'un procès contre Foumane Akame, son conseiller très spécial des affaires juridiques et secrétaire permanent du conseil de la Magistrature. Et d'un second contre Issa Tchiroma, le ministre de la Communication qui doit avoir perdu le sommeil depuis les révélations de Marafa.
Le dossier Foumane Akame
Le conseiller juridique de Paul Biya, qui se prend pour le véritable Garde des Sceaux a des soucis à se faire. Il est impliqué dans deux dossiers, celui des indemnisations du crash du Boeing 737 en 1995, et celui de l'argent rétrocédé par la SAA après la dénonciation du contrat de maintenance passé avec la Camair. L'histoire n'a au fond rien d'un scoop. Chief Milla Assoute, exilé politique et candidat interdit à une élection présidentielle au Cameroun dénonce depuis plusieurs années déjà le hold-up de Foumane Akame. Avec les révélations de Marafa, Paul Biya aurait envoyé le dossier à Laurent Esso, qui ne risque pas d'en inquiéter quelques-uns et en laisser quelques autres en liberté. Ils risquent tous d'y passer, lui et Issa Tchiroma qu'on crédite de quelques beaux investissements dans l'hôtellerie en Afrique du Sud.
Restera pour Foumane, le dossier des milliards de Chanas et Privat versés après le crash de Youpwè. L'argent n'a pas servi à dédommager les victimes du crash ou leurs ayants droit, il a fini dans un compte «personnel» de Foumane.
Qui souffle la tempête récolte un cyclone. Tant pis si Issa Tchiroma pense que les révélations de Marafa ne sont rien de plus que du pain rassis, et que le scandale du crash de 1995 est la responsabilité de l'Etat. Paul Biya a toujours eu un grille-pain dans ses bagages, et un Etat qui se sent menacé sait trouver des crétins à qui on fera porter le chapeau.
Source: Les Nouvelles du pays N°178 DU 06 Juillet 2012