CURIOSITÉ : Les devises dans la rue à Yaoundé

Cameroun - CURIOSITÉ : Les devises dans la rue à YaoundéDe l’argent, beaucoup d’argent vendu et acheté à la sauvette. L’activité fait partie du quotidien des camerounais et donne à voir un pan entier de l’économie informelle.

Aéroport International de Yaoundé Nsimalen. Un étrange ballet saisit le visiteur. Dans le hall de cet édifice hautement stratégique, il est 20 heures ce dimanche. Le « pidgin english » hante l’ambiance, créant une grande effervescence. Pas la peine d’en chercher les responsables, car dès l’entrée, ils sont là, en tenue décontractée, moyenne d’âge 30 ans. Un homme orchestre censé jouer le chef de bande fait de grands gestes, le tout saupoudré d’éclats de rires. Lucky Luke, il s’appelle.

C’est osé, mais le parallèle semble inévitable, à écouter les agents de sécurité qui le connaissent ici à l’aéroport de Yaoundé - Nsimalen : « il est très rapide, estime l’un d’eux ; il est comme un homme du Far West », poursuit l’autre. L’homme peut paraître enfantin dans ses gestes, sauf que derrière tout cela, se profile une activité qui ne souffre pas des regards de la police, et qui régit le quotidien du hall de l’aéroport comme une loi inexorable: l’achat et la vente des devises étrangères.

Il pleut des cordes, les passagers d’un gros porteur arrivé une trentaine de minutes plutôt sont coincés. Lucky Luke accroche les clients d’un bon mot ou d’un bonsoir chantant. « Change, change », le mot est une ritournelle ici. Puis, il tombe sur une jeune femme en provenance de France. Pas de propos oiseux, mal fabriqués et sans imagination. Dans ce business, on ne fait pas dans la dentelle. Il s’agit de capter le client dès la première seconde, créer la sympathie et tout expliquer même si c’est dans un français boiteux. Tout se passe en un tour de bras. L’opération est terminée. Lucky Luke vient de changer les euros en CFA.

Autre lieu

Au Boulevard du 20 mai, la pratique n’est pas totalement différente. On change et on change même le traveller’s chèque. Le système, pas facilement maitrisable, prolifère sur le terreau de l’informel avec, bien sûr, quelques notes salées : fausse monnaie, blanchiment d’argent et ignorance du fisc. Mais, le créneau est porteur. « Je vis avec çà », confesse Lucky Luke. Mais cela n’efface pas les réserves des détracteurs d’une spécialité qui fait toujours débat. Pour Pierre ASSAMBA, chargé des opérations dans une banque de la place, « le délabrement des opérations de change est un délit.

Mais, c’est une situation somme toute compréhensible, si l’on tient compte qu’elle est impactée par la crise économique, car c’est un arcane des seuls experts. Alors qu’ici, on a à faire à des gens qui fabriquent eux-mêmes leurs taux de change et puis on ne sait même pas d’où proviennent ces devises ». Les clients, quant à eux, sont plus mesurés et brandissent fièrement l’argument de la proximité. « J’ai l’habitude de changer des devises dans la rue et je n’ai jamais eu de problème. Peut - être que d’autres en ont eu, mais moi non », argue Léonine MIMBOE, commerçante.

Spectre de la fatalité ou volonté sournoise de cacher des vérités ? La réalité en tout cas, c’est que l’argent se vend et s’achète allègrement dans la rue à Yaoundé, dans des conditions qui échappent très souvent aux normes en la matière.

© www.integrationafrica.org : Jean René MEVA’A AMOUGOU


19/03/2013
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