«
Vers un deuxième miracle ivoirien ». Cette affirmation, qui date de
janvier 2013, n’est pas de n’importe qui. Elle est de la directrice
générale du Fonds monétaire international (FMI), Christine Lagarde.
Venant d’une personnalité aussi avisée, il s’agit d’une prémonition qui
ne relève pas du rêve béat. La patronne du FMI se base en effet sur les
performances de l’économie ivoirienne. Et les derniers chiffres publiés
par son institution tendent à lui donner raison. Avec un taux de
croissance de 9,8% en 2012, la Côte d’Ivoire fait exploser les chiffres
des performances économiques en Afrique. Elle réussit un exploit que des
pays stables peinent à réaliser. Car le mérite des dirigeants ivoiriens
et particulièrement de Alassane Ouattara, c’est d’avoir réussi à
relancer l’économie ivoirienne deux ans seulement après une décennie de
crise qui a connu son épilogue par une guerre civile destructrice et
meurtrière. Cette performance est le résultat d’un travail acharné, qui a
amené le pouvoir à revoir de fond en comble la conception que l’on doit
avoir de la gouvernance économique. Résultat des courses, le pays est
désormais tellement attractif que tout le monde s’y bouscule. L’espoir
est donc permis de voir la Côte d’Ivoire connaître un nouveau boom
économique, après celui des décennies 1960-1980, sous la houlette de
Félix Houphouët-Boigny. Mais qui dit taux de croissance vertigineux dit
amélioration des conditions de vie des populations. C’est la corrélation
qui est toujours faite par les profanes de la chose économique. En
entendant ce taux de croissance de pratiquement deux chiffres, les
syndicats vont bien sûr dresser l’oreille. Ils attendent que les
chiffres se traduisent en éléments concrets dans le quotidien des
Ivoiriens. Il faudra donc beaucoup de pédagogie de la part des autorités
ivoiriennes, pour montrer que le pays revient de loin et que rien n’est
définitivement acquis. La redistribution des fruits de la croissance
est certes un impératif, mais dans le cas ivoirien, la prudence doit
être de rigueur. En tout état de cause, Alassane Ouattara doit se
préparer à faire face aux demandes pressantes des Ivoiriens.
Certes, il a déjà beaucoup investi dans les infrastructures de base, mais un peuple aussi longtemps resté dans l’indigence, que celui de la Côte d’Ivoire, aspire enfin à retrouver son niveau de vie d’antan. Tout économiste aguerri qu’il est, Alassane Ouattara n’ignore cependant pas la dimension humaine du développement. Même le FMI, jadis critiqué pour sa vision manichéenne du développement, estime que « la croissance et la prospérité doivent profiter à l’ensemble de la population et ouvrir des opportunités pour tous ». C’est ce que conseillait Christine Lagarde à la Côte d’Ivoire en janvier dernier. Reste à savoir si toutes les mesures préconisées par le FMI seront acceptées par une population fatiguée par de longues années de récession. C’est dire à quel point il va falloir aborder avec finesse cette phase à la fois réjouissante pour la Côte d’Ivoire, mais inquiétante en raison des nombreuses attentes des populations.