A mesure que les jours passent, le Rassemblement démocratique du peuple Camerounais (Rdpc) attend en vain de faire sa mue. Entre atermoiements et approximations, le parti au pouvoir est l’illustration parfaite de la grossière illusion du tout va bien. Entre ces griots à l’enthousiasme débordant englués dans ce bourbier qu’est le comité central et l’activisme très peu désintéressé de quelques téméraires progressistes autoproclamés, c’est le petit militant de base qui se perd en conjectures.
Débat et argent
Depuis sa création le 24 mars 1985 dans la ville de Bamenda, devenue elle-même le 19 mai 1990, le symbole vivant d’une opposition aujourd’hui purgée de toute ambition, le Rdpc et son président national ont à peine entrouvert le portillon du débat contradictoire. Ici, Paul Biya tient le gouvernail. Il convoque quand il peut les rares réunions du bureau politique. Pour ceux des membres de cette instance encore en vie, ils vous diront que l’ordre du jour et les résolutions sont connus et arrêtés d’avance.
Presqu’un parti d’élite, au Rdpc, tout s’achète. Bandits à col blanc, feymen, fossoyeurs de l’économie, champions de détournements des deniers publics et adeptes des marchés fictifs dictent la loi de l’argent sale. A coup de millions, ils sont devenus députés ou maires par effractio au détriment des authentiques militants. Et pourtant et c’est le paradoxe, Paul Biya bien informé de cette situation tente de reprendre main. Constatant l’envahissement de l’argent lors de l’opération de renouvellement des organes de base, Paul Biya signait une circulaire référencée n° 01/Rdpc/Pm le 15 mars 2007 à l’attention des postulants acheteurs des consciences et des suffrages : « Vous éliminerez également les formes de trafic d’influence et d’envahissement de l’argent, qui sont incompatibles avec nos préoccupations plus que jamais actuelles, de moralisation de mœurs et des comportements ».
Changement
Tellement la machine Rdpc s’est compromise dans presque toutes les mafias qui ont mis le Cameroun à genou, certains militants rient sous-cape quant à la capacité de modernisation de cette formation politique otage des lobbies et réseaux sectaires. Paul Biya est donc la seule personne par qui et pour qui le Rdpc pourra encore tenir la route. A 77 ans, a-t-il encore la baraka et la volonté nécessaires pour y parvenir ? Là est toute la question. En attendant et à quelques encablures de l’élection présidentielle, les chantiers urgents nécessitent une attention plus que particulière : convocation d’un congrès ordinaire tant attendu et toujours reporté. Nomination de nouveaux hommes d’appareil au bureau politique, au comité central, ainsi que dans les deux organismes spécialisés des femmes et des jeunes. Paul Biya aura sans complaisance à se prononcer également sur l’agitation ennuyeuse entretenue par ses proches collaborateurs et la volonté de changement incarnée par l’immense majorité de la masse militante de la base. Le Rdpc a besoin d’un patron disponible et acquis à sa cause. Dans tous les cas, en 2011, rien ne sera plus comme avant avec la prise en main de la gestion du processus électoral par Elecam. Le parti de Paul Biya en est bien conscient et devrait en tenir compte. D’ailleurs pour donner l’impression qu’il est au fait des réalités de sa formation politique, il vient de décider de la création de 20 nouvelles sections au Cameroun, en Afrique et en Europe. Toute chose qui augure tout de même un probable rebondissement en prélude à l’élection présidentielle attendue en 2011.