Sept ans après que l’Etat du Cameroun ait restitué les biens des putschistes du 6 avril 1984. Plusieurs d’entre ces biens ne sont que des concessions demeurées en ruines, pillées en entier. Il ya de cela quelques années, nous vous annoncions dans nos colonnes que le 9 mars 2007, les deux concessions en ruines appartenant à Issa Adoum, ancien directeur général du Fonds National de Développement Rural (Fonader) et cerveau du putsch du 06 avril 1984 avaient été restitués à sa famille,
A l’époque, cette cérémonie de restitution de ces biens, s’était déroulée en discrétion à Mokolo dans la province de l'Extrême-Nord. Mohamadou Issa, administrateur des biens de la famille Issa Adoum, avait juste constaté les dégâts : Les deux boukarous et les deux villas qui ont survécu dans le domaine familial sont dans un état de délabrement avancé et les villas littéralement pillés jusqu’aux simples coupures de journaux dont on retrouve quelques feuilles ici et là .
A ce jour, la famille de Issa Adoum envisage de porter plainte contre l’Etat du Cameroun. Rappelons que Issa Adoum, directeur du Fonader à l’époque avait été exécuté à Mbalmayo dans le département du Nyong et So’o, le 1er mai 1984, en compagnie de 31 autres coaccusés, tous des militaires.
Juste après, comme bien d'autres, ses biens ont été confisqués sur l'ensemble du pays. Il en est de même des biens de Saleh Ibrahim, des biens du feu Ahmadou Ahidjo qui avait également été restitué à son fils Mohamadou Ahidjo à Garoua dans un état piteux.
A Maroua, pour la famille de Hamadou Adji trois concessions délabrées situés au quartier Kongola et au quartier Domayo, de même que l'actuel siège de l'Alliance nationale pour la démocratie et le progrès (Andp), avaient été restituées à l'homme d'affaires Hamadou Adji, l’un des trois condamnés à mort à la suite du putsch du 6 avril et aujourd’hui en exil au Nigeria.
Au ministère de l'Administration territoriale et de la décentralisation la tutelle considère donc que tous les biens immobiliers des putschistes de 1984 ont été restitués.
« Il sera difficile de gagner un quelconque procès » affirme un des membres de la famille de Saleh Ibrahim. Il ajoute que les biens avaient été confisqués sans aucune procédure avant d'être remis à la curatelle. Tous ces biens après leur confiscation par l’Etat du Cameroun, avaient été pillés et sont dans un état de délabrement avancé pour la plus part. Pourquoi confisquer un bien et de ne pas l’utiliser dans le cadre des biens public ou mieux encore le protéger ? Est-ce que cela valait la peine ?
Mieux, le gouvernement ayant toujours montré par le passé une réticence à appliquer dans son intégralité la loi du 23 avril 1991 portant amnistie des infractions et condamnations politiques, les observateurs doutent de sa volonté à réparer les préjudices.
Les anciens officiers putschistes n’ont jamais été réintégrés dans l'armée malgré les promesses du pouvoir de Yaoundé. Alors que quatorze officiers devaient réintégrer les rangs, aucun d'eux en définitive ne l'a été, tous ayant été mis d'office à la retraite sans reconstitution de carrière à l'exception des colonels Ousmanou Daouda, Ngoura Beladji et du chef d'escadron Mohamadou Abdoulaye Massel. Ces derniers quelques temps après avaient été révoqués par décret présidentiel.
On dénombre à ce jour une dizaine d’officiers en vie qui ont été sanctionnés en 2000, longtemps après le vote de la loi d'amnistie, perdant par cette manœuvre l'avantage de l'expression "avoir servi sans interruption" qui est la clé même de la loi d'amnistie.
Une jurisprudence qui devrait décourager les gestionnaires des biens délabrés des anciens putschistes à se référer aux tribunaux pour que justice soit rendue.
En dépit des apparences, la plupart des insurgés n’ont jamais été rétablis dans leurs droits réels et la dépouille du premier président Ahmadou Ahidjo, mort à Dakar au Sénégal en 1989, n’a toujours pas été rapatriée. La méfiance s’est instaurée entre les familles des putschistes et le pouvoir en place au Cameroun. Malgré la loi n°91/002 du 23 avril 1991 qui amnistie toutes les personnes ayant été condamnées pour des raisons politiques, la réconciliation n’a jamais véritablement eu lieu.