Cote d'Ivoire: Ouattara veut prendre la main au risque d'un choc avec Gbagbo
Le camp d'Alassane Ouattara, l'un des deux présidents proclamés de Côte d'Ivoire, se préparait à tenter de prendre dans la semaine la télévision et le siège du gouvernement, une épreuve de vérité après le bref face-à-face armé de lundi avec les forces de son rival Laurent Gbagbo.
Désigné vainqueur de la présidentielle du 28 novembre par la
Commission électorale et reconnu président légitime par la communauté
internationale, Alassane Ouattara veut se saisir de leviers actuellement
aux mains du sortant Laurent Gbagbo, proclamé président par le Conseil
constitutionnel.
Le temps presse pour l'ex-opposant, retranché dans
un grand hôtel d'Abidjan avec son propre gouvernement dirigé par
Guillaume Soro, chef de l'ex-rébellion des Forces nouvelles (FN) qui
tient le nord du pays depuis le putsch raté de 2002. M. Gbagbo, lui,
siège au palais présidentiel et son Premier ministre Aké N'Gbo travaille
à la Primature.
Guillaume Soro (2e à G) et des membres de son gouvernement à Abidjan le 6 décembre 2010
Guillaume Soro a affirmé lundi qu'avec ses ministres il allait investir jeudi les locaux de la radio-télévision publique RTI --un atout majeur dans le jeu de Laurent Gbagbo-- pour y installer un nouveau directeur général.Vendredi, il compte réintégrer les locaux qu'il occupait comme Premier ministre de M. Gbagbo de 2007 à 2010 et y réunir son cabinet.
Mais ces deux lieux stratégiques étant sous bonne garde des forces fidèles à son adversaire, le camp Ouattara semblait pris dans une alternative: soit faire un coup d'éclat sans parvenir à ses fins, soit prendre le risque d'une confrontation violente.
"Ca va se faire", a assuré mardi à l'AFP, laconique, un proche de M. Soro. "Nous disposons de moyens, nous ne comptons pas sur les Forces impartiales" (Casques bleus de la mission onusienne Onuci et force française Licorne), a-t-il dit.
Mais ce projet renforce la tension à Abidjan, déjà vive lundi durant le blocus de plusieurs heures de l'hôtel servant de QG à M. Ouattara.
Les Forces de défense et de sécurité (FDS) de M. Gbagbo avaient pris le contrôle de la route d'accès au Golf hôtel tandis que des membres des FN accompagnés de Casques bleus gardaient l'entrée principale, jusqu'à la levée du blocus lundi soir.
La situation aux alentours de l'hôtel était calme mardi et le bâtiment de nouveau accessible en dépit de barrages filtrants tenus par des FDS et des Casques bleus, a constaté l'AFP.
Devant l'entrée de l'établissement de luxe situé au bord de la lagune, une dizaine de chars de l'Onuci étaient positionnés mais aucun membre des FN n'était visible.
L'origine de ce face-à-face très tendu restait obscure mais il semblait s'agir bien davantage d'un incident que de la première étape d'une confrontation.
Selon les journaux pro-Gbagbo, des éléments FN ont forcé un barrage des forces de l'ordre et en ont profité pour voler des armes qu'ils auraient emportées à l'hôtel. Des renforts FDS auraient alors été dépêchés sur place.
Les quotidiens pro-Ouattara racontent qu'un barrage FDS se serait rapproché du complexe hôtelier, mouvement qui aurait inquiété les FN. Le camp Ouattara a d'ailleurs dénoncé une "provocation".
L'incertitude et la tension actuelles - illustrées par le maintien du couvre-feu nocturne en zone sud à partir de mardi, même si la mesure est allégée de deux heures - continuaient d'engendrer des mouvements de populations.
Depuis le scrutin, quelque 3.700 habitants de l'ouest ivoirien ont fui pour rejoindre essentiellement le Liberia mais aussi la Guinée, selon un nouveau bilan du Haut commissariat des Nations unies aux réfugiés (HCR).