Côte d'Ivoire. Affrontements inter-ethniques. 48 heures de feu et de sang
Les éléments des Frci ont encore fait tristement parler d'eux, cette fois-ci à Arrah, dimanche et lundi. Ils se sont illustrés par des agissements qui ont valu au moins un mort, plusieurs blessés et d'importants dégâts matériels
Les populations de la localité d'Arrah, ville située dans le département de Bongouanou, ont passé une journée noire, hier dimanche 12 février 2012. Des éléments des Forces républicaines de Côte d'Ivoire en provenance de Kotobi, une ville distante d'Arrah d'environ 8 km, et qui avaient élu domicile dans la ville, ont été priées par les populations autochtones, entre 10 heures et 11 heures, de quitter la ville d'Arrah, selon une habitante d'Arrah.
«Ces éléments des FRCI ont été chassés de Kotobi, on ne sait pour quelle raison. Ils sont arrivés à Arrah pour s'y installer, mais des jeunes se sont opposés à ce qu'ils s'installent dans la ville et leur ont demandé de partir. C'est ce qui a mis les FRCI en colère. Ils ont commencé à tirer partout. Nous étions cachés dans nos maisons, mais actuellement ça va. Les militaires de l'ONUCI sont venus de Daoukro pour intervenir, mais je ne sais pas où les FRCI se trouvent. C'était vraiment chaud ici», a-telle expliqué dimanche en soirée ce témoin. Mais l'on apprendra, que la furia des Frci combinés aux jeunes dioulas a occasionnés d'importants dégâts matériels. Notamment, des magasins saccagés ou incendiés, des domiciles attaqués, des véhicules personnels caillassés… et des pneus en feu étaient visibles partout dans les rues de la ville, dimanche en mi-journée. Selon un autre témoignage recueilli, il s'est agi d'affrontements entre les autochtones Agni et les allogènes Dioula soutenus par les éléments des Frci.
Ce qui a causé le ras-le-bol des populations
Les jeunes, manifestant contre la présence impromptue des Frci dans leur ville, excédés par les exactions commises par ces forces armées, se sont rendus dimanche matin chez le roi d'Arrah, Nanan Tehoua, pour demander le départ des Frci. En effet, les pauvres populations d'Arrah sont quotidiennement victimes de racket et de rançonnage dans la ville, comme sur les routes et des pistes, où chaque paysan est sommé de payer à l'aller et au retour des champs. C'est donc leur ras-le-bol vis-à-vis des agissements des Frci que les jeunes étaient allés exprimer devant le roi. C'est à leur retour qu'ils sont pris à partie par les allogènes dioulas qui ont vu d'un mauvais oeil cette volonté des autochtones de voir les Frci quittés la ville.
Des affrontements s'en suivent entre autochtones et allogènes soutenus par les Frci. Qui entre temps vont demander des renforts. Une fois les renforts arrivés dans la ville, ils vont tenter de mettre à exécution leur agenda secret. A savoir la prise de la brigade de gendarmerie de la ville, selon des témoins. Mais cette basse besogne sera vite déjouée avec l'intervention des Casques bleus venus de Daoukro. Le bilan de cette folle journée d'affrontements du dimanche était selon le maire d'Arrah, M. Bouadou, d'une vingtaine de personnes blessées et d'importants dégâts matériels.
2ème jour d'affrontements hier, la ville se vide
Selon plusieurs témoins, il y a eu au moins un mort, une dame qui a reçu une balle à bout portant, plusieurs blessés et de nombreux dégâts matériels hier. Notamment, des magasins saccagés ou incendiés. Mais d'autres sources avancent le chiffre de 3 à 6 morts non encore confirmés de sources officielles. En milieu d'après-midi du dimanche, le calme semblait revenir avec le déploiement des casques bleus et d'un renfort de militaires venus de Daoukro. Seulement, alors qu'on pensait que tout était revenu à la normale les affrontements ont repris de plus belle hier lundi dans la matinée et ce, malgré la présence des casques bleus venus de Daoukro. C'était la chasse aux autochtones dans les rues d'Arrah.
Plusieurs jeunes Agni ont eu la vie sauve en prenant la clé des champs. Des maisons de cadres de la ville ont été saccagées et pillées, des infrastructures publiques n'ont pas échappé à la furia des jeunes Dioula, aidés en cela par des hommes en armes. Le foyer des jeunes filles a été saccagé en grande partie. Joint hier en fin d'après-midi au téléphone, le Commissaire du gouvernement, Ange Kessy, cadre de la ville, était présent à Arrah. La tension restait encore vive selon lui, malgré la présence des renforts des forces mixtes. Il a déploré cette montée de violence inutile et a souhaité que le calme revienne dans la ville d'Arrah. Pour l'heure, les autochtones continuent de craindre pour leurs vies et souhaitent que des mesures idoines soient prises pour ramener la sérénité.
Frank Toti