Corruption:10 millions de francs CFA pour être proviseur
Enchères. L’inspecteur général des services au Ministère des Enseignements secondaires menace de sanctionner les personnels impliqués dans la vente des postes de responsabilité.
Les observateurs attendent avec impatience de voir le profil du futur proviseur du lycée bilingue de Gouache, dans la région de l’Ouest. Atteint par la limite d’âge, l’actuel proviseur, Joseph Mbadié prendra sa retraite à cette rentrée scolaire. Contrairement à ce que son nom laisse penser, le lycée bilingue de Gouache n’est pas un établissement rural.
Situé dans un quartier populeux de Bafoussam, sur la colline qui abrite l’Ecole normale bilingue des instituteurs de l’enseignement général, dont il squatte une partie des locaux, cet établissement secondaire d’environ 3000 élèves semble plus prisé que les réputés lycées classique et bilingue de la même ville.
Depuis que le départ à la retraite de l’ancien proviseur, qui a passé presqu’une décennie au poste, est confirmé, les montants avancés par les postulants donnent le tournis. Ici, l’on s’accorde sur le fait que le poste est juteux. Et les enchères montent. L’un d’eux a vendu sa maison à 13 millions de Fcfa il y a un mois, pour acquérir le précieux siège. Selon des sources, pas moins de trois proviseurs en service dans la périphérie de Bafoussam auraient versé 10 millions chacun, à des hommes-liges, pour ce poste. Info ou intox ?
Corruption générale
Le 15 juillet 2015, l’Inspecteur général des services (Igs) du Minesec, Souley Daouda, s’est fendu d’un communiqué placardé dans toutes les sorties d’ascenseur au Minesec, qui confirme les marchandages. « Il est constaté en ce moment une vaste campagne d’arnaque matérialisée par des appels et messages téléphoniques partant des agents des services centraux vers le personnel des services déconcentrés, relatifs au monnayage des nominations ou des affectations.
Les premières investigations en cours orientent nos soupçons, sur la base des éléments fiables, vers des collaborateurs des hauts responsables et des agents parfois non impliqués dans le processus des activités sus-évoquées, sinon par trafic oupar complicité », souligne l’Igs, par ailleurs président de la commission ministérielle de lutte contre la corruption. « Il est demandé instamment aux uns et aux autres, de mettre fin à cette pratique de corruption qui ternit l’image du département ministériel aux yeux de nos collaborateurs et de toute la communauté éducative, sous peine de sanctions prévues par la réglementation en vigueur », menace-t-il.
Dans les couloirs du ministère, cette manifestation de bonne foi amuse. « Ce n’est qu’aujourd’hui qu’il découvre ce qui se passe ? Le ministère est pourri », lance un chef de service à la lecture de l’avertissement. On s’accorde à dire que les affectations et surtout les nominations des enseignants sont une affaire de gros sous. Et cela, plus pour l’enseignement général que l’enseignement technique. Pour ces promotions qui ont cours même à des moments inattendus de l’année scolaire, les tarifs sont connus.
La région de l’Ouest viendrait en tête des postes les plus sollicités. Là- bas, un CES en création s’achèterait à 1,5 million. Sûrs de leur investissement, les proviseurs y sont gérés comme des chefs traditionnels. Même malades, certains continuent d’être maintenus en poste.