Congrès : Un cadre du Rdpc conteste la légitimité de Paul Biya
Charles Ateba Eyene vient de commettre un opuscule dans lequel il
indique que le mandat du président national de ce parti a expiré le 21
juillet dernier.
En attendant l’annonce de la date du congrès
ordinaire du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc), le
débat sur les délais et les attentes à propos de ce conclave fait
toujours rage. C’est dans cette optique que Charles Atéba Eyene, membre
du Bureau national de l’organisation des jeunes de cette formation
politique, vient de commettre une «réflexion» intitulée «le congrès
ordinaire du Rdpc de 2011 et ses enjeux pour la survie ou le déclin du
parti. Une contribution militante en 13 points d’un cadre du parti».
Dans cet opuscule de 42 pages, le souci avoué de l’auteur est
«d’explorer comment le Rdpc a fonctionné, fonctionne et fonctionnera
après son fondateur [Paul Biya, ndlr]».
Charles Ateba Eyene
indique ainsi au 3e point de ce qu’il considère comme sa «contribution»,
que «les textes de base du Rdpc ne connaissent pas de mandat
perpétuel». Selon lui, les critiques auxquels le parti est exposé, «dont
la plus régulière est le non respect des propres textes», sont
légitimes. «Si l’on veut que le président national du Rdpc ait désormais
un mandat perpétuel, que cela soit clairement dit dans les statuts»,
écrit-il. En fait, Ateba Eyene explique que «les mandats au Rdpc sont de
5 ans. Tout le monde savait que le 21 juillet, le mandat du président
national allait être remis en jeu…».
Pour ce cadre du «parti de la
flamme», la «juridisme et la ruse» utilisés pour expliquer la non tenue à
date du congrès est un signe de «faillite» du parti au pouvoir. «Au
lieu de narguer les citoyens ou les militants en leur demandant de citer
une seule disposition statutaire ou réglementaire relative à la fin du
mandat du président national et rendant obligatoire son renouvellement
dans tels délais avant ou après son expiration […], il convient de
s’ajuster en interne pour un meilleur fonctionnement de notre formation
politique en évitant d’interpréter les textes dans le sens du vent ou de
justifier nos erreurs et nos fautes».
Au sujet du congrès
ordinaire annoncé, l’auteur est d’avis qu’il faut saisir cette occasion
pour «dératiser» le Rdpc. «L’argent et la capacité pour certains à
organiser les fêtes ont adoubé le militantisme des bandits politiques.
Dans notre théorie du «braquage politique», il ressort que l’argent et
le décret consacrent désormais le militantisme au Rdpc». Selon Ateba
Eyené, qui est à son 9e ouvrage consacré au parti au pouvoir en 12 ans,
depuis que le congrès ordinaire est officiellement annoncé, la grande
bataille des «truands» est d’entrer, par tous les moyens, au comité
central et au bureau politique, pas forcément pour servir le parti,
qu’ils ne connaissent ni d’Adam, ni d’Eve, mais pour avoir un moyen et
un instrument supplémentaire de trafic d’influence de légitimation de
l’imposture.
Militantisme
Charles Ateba Eyene, qui
s’insurge contre «la prise en otage» du parti par la «bureaucratie» et
les «sectes», fustige également la mise à l’écart des militants de la
première heure. «Le militantisme politique est une école et non un
comportement de circonstance. Or, le phénomène que l’on observe de plus
en plus dans notre parti est la promotion du militantisme saisonnier
[…]. La tendance est qu’en 2011, les anciens opposants ont le vent en
poupe…».
L’auteur ajoute que «tous ceux qui prônaient le boycott,
les villes mortes, rédigeaient des memoranda incendiaires et exaltaient
la division du pays mangent aujourd’hui dans la main du régime et ne
critiquent plus ouvertement ses dérives. Dans le même temps, les
fervents militants et combattants d’hier sont à la touche». Ateba Eyene
pense du reste que le congrès ordinaire du Rdpc de 2011 est celui «de la
dernière chance».
D’après ce cadre en service au ministère de
la Culture, «il faut [déjà] démêler les écheveaux formés par les
pratiques dépourvues d’équité que l’on observe de plus en plus au sein
du parti. Sinon, il faut s’attendre aux drames des affrontements
épistolaires ; des démissions massives ; du conflit des générations ; du
conflit entre les riches et les pauvres du parti ; des hommes et des
femmes du Rdpc ; de l’élite des loges et celle non initiée».
Le
challenge pour le président national du Rdpc, Paul Biya, est donc grand.
Mais son plus grand défi, de l’avis d’Ateba Eyene, «est de réussir une
transition tranquille et laisser un pays prospère aux nouvelles
générations. Un pays où les valeurs de rigueur, de moralisation et de
gouvernance se pratiquent et se partagent». Reste à savoir si le cri de
ce «militant authentique» du Rdpc sera entendu. Le moment de la
publication de cet opuscule semble, en tout cas, avoir été choisi à
dessein : Moins de 24h après le retour de Paul Biya à Yaoundé, après 29
jours passés à l’étranger. Un retour qui présage du déclic imminent du
calendrier politique.
Georges Alain Boyomo