Congo RDC: Le lapsus de Ban-Ki Moon en dit long sur la nécessité d’un leadership fort en RD Congo
Le lapsus lingua de Ban-Ki Moon le 27 septembre dernier à New York au cours du sommet qu’il avait convoqué sur la crise congolaise a suscité un rire étouffé dans l’assistance avant d’alimenter dès le lendemain un commentaire fourni sur la toile. Ouvrant la séance, le Secrétaire général de l’Onu avait malencontreusement présenté M. Paul Kagame comme président de la République Démocratique du Congo." Joseph Kabila" qui était juste à sa droite avait laissé échapper un sourire plutôt gêné.
Etait-ce parce qu’il venait de lui être répété à la face du monde, là-bas, à New York et par la plus haute autorité de l’Onu, ce que tous les Congolais considèrent comme un fait indiscutable ?
Peut-être, mais il y a deux autres raisons qui n’ont sans doute pas échappé à " Joseph Kabila" et qui lui ont surement fait froid au dos.
D’abord il y a le fait que pour des psychanalystes cet apparent innocent lapsus peut cacher une vérité refoulée dans le subconscient de son auteur. En d’autres termes, selon cette approche freudienne, au moins une fois, le secrétaire général Ban-Ki Moon, sur base d’une certaine grille de lecture, doit s’être déjà figuré la RD Congo sous la direction de Paul Kagame du Rwanda.
Et si tel est le cas, le patron de l’administration onusienne est loin d’être le seul dont la grille de lecture des événements au Congo fait passer ce dernier pays pour un protectorat rwandais. Avant lui l’ancien secrétaire d’Etat américain Herman Cohen l’avait laissé entendre. L’ancien président Olessegun Obassanjo du Nigeria l’avait traduit aussi.
La réalité est que quiconque a déjà eu à s’intéresser à la façon dont le Congo est géré ou, à l’instar de Ban-Ki Moon, à en « manutentionner » un tant soi peu les rapports bilatéraux qu’il entretient avec son voisin rwandais peut facilement tomber dans ce lapsus.
Car depuis un peu plus d’une décennie, dans beaucoup de domaines, même ceux lies directement à la souveraineté de son grand voisin, si Kigali n’est pas à la conception, il est à l’exécution ou tout au moins à l’accompagnement des mesures gouvernementales de Kinshasa. Et il arrive parfois même qu’il soit à toutes ces trois étapes.
La fameuse interview accordée courant septembre dernier au quotidien belge Le Soir par le ministre rwandais de la Défense le démontre suffisamment. Avec un arrogant franc parler mêlé de mépris à l’endroit de ses protégés de Kinshasa, James Kabarebe avait démontré, non sans aplomb, comment son administration a une haute main sur le gouvernement congolais au point que ce dernier ne peut rien initier de significatif à l’intérieur de ses propres frontières nationales avant d’avoir obtenu le feu vert des autorités rwandaises.
La connivence entre les dirigeants du Congo et du Rwanda est unique du genre dans les relations internationales modernes. L’ « Entente Cordiale » elle-même, conclue entre Paris et Londres en 1904 dans le but de mettre un terme définitif à presque mille ans de conflits intermittents entre la France et la Grande Bretagne, n’est pas à sa hauteur.
Car, contrairement à l’ Entente Cordiale qui laissa à chaque pays les prérogatives de protéger jalousement sa souveraineté et ses attributs régaliens, au terme du mystérieux accord entre Kinshasa et Kigali, le premier s’est laissé complètement phagocyter par le second jusque dans des domaines de souveraineté.
Sans que cela n’émeuve personne en RD Congo en effet, Kigali dispose sur Kinshasa d’un droit de regard permanent dans les domaines de l’armée, de la police et des renseignements, de la sécurité le long de frontières communes (NDLR : les postes frontaliers entre la RDC et le Rwanda étaient jusqu’à récemment les seuls de tous les neuf voisins à ouvrir chaque jour 24 heures sur 24) et de l’organisation politico-administrative des provinces (les gouverneurs du Nord Kivu et du Sud Kivu, les maires de Bukavu et de Goma doivent montrer pattes blanches aux autorités de Kigali avant leur prise de fonction). Il dispose d’un droit de regard et jouit d’une tacite clause de la nation la plus favorisée chaque fois que sur une même balance se trouvent les intérêts respectifs de ces deux pays.
De là à voir des fonctionnaires et des techniciens internationaux s’exaspérer, petit à petit, des querelles que de jour le gouvernement congolais porte à leur table pour arbitrage contre le gouvernement rwandais dont il est auxiliaire, il n’y a plus qu’un pas. Et c’est là la deuxième raison du rire jaune de « Joseph Kabila » du lapsus de M. Ban-Ki Moon.
Car le lapsus peut avoir finalement traduit un ras-le-bol devant les vraies fausses querelles entre le gouvernement rwandais et sa marionnette qui tient lieu de gouvernement au Congo.
Du fait de leur durée dans le temps et dans l’espace, des catastrophes humaines qui les accompagnent ou les provoquent et des moyens mis vainement à contribution par l’Onu pour les contenir, ces querelles, toutes absurdes qu’elles paraissent à première vue ont réussi quand même à étaler au grand jour les limites et la duplicité de l’ONU elle-même et de la communauté internationale –autant dire les deux principaux soutiens du régime en place à Kinshasa, et raison supplémentaire de l’inconfort du président « Kabila » pour qui ce vilain lapsus serait prémonitoire à un lâchage - dans une crise dont le coût est sans précédent depuis la seconde guerre mondiale.
Les blessures sentimentales et psychologiques
Ce coût est d’abord humain. Les chiffres varient, mais il est de plus en plus admis qu’au moins 8 millions de vies ont été directement ou indirectement fauchées du fait de la crise que connaît le Congo. A ce chiffre s’ajoute des centaines des milliers des déplacés de guerre et des victimes de viols érigés en arme de guerre, créant des conséquences humanitaires incommensurables. Il est ensuite écologique avec la destruction des écosystèmes, de la faune et de la flore dans les régions touchées par les guerres. Il est aussi économique avec les pillages et les destructions des outils de production dans une région ou les activités agro-pastorales ont reçu un coup grâce du fait de la criminelle belligérance chronique y entretenue et de l’exploitation sauvage des minerais. Il est financier à charge de la communauté internationale avec un budget de près de 2 milliards de dollar par an alloue à la Monusco depuis un peu plus de dix ans.
Cette crise prend encore une dimension beaucoup plus inquiétante lorsqu’on tient compte des blessures sentimentales et psychologiques qu’elle cause et dont on ne parle pas souvent assez.
Il convient d’admettre que l’insécurité et l’instabilité de la région en général et de la RD Congo en particulier sont dans une grande mesure liées à l’amateurisme doublé d’une culture des flibustiers d’un leadership politique irresponsable en place à Kinshasa, outre l’hégémonisme et le pillage des ressources du Congo par les gouvernements rwandais et Ougandais (voir Mémo du Président national de l’APARECO au SG de l’ONU). Il est par conséquent illusoire de voir une élite politique aussi compromise que celle-là créer des conditions d’une paix véritable entre les descendants des agresseurs et des agressés d’aujourd’hui.
Au contraire l’incurie, l’égocentrisme et le bellicisme étant leur marque de fabrique, ces dirigeants sont aujourd’hui entrain de définitivement installer les terreaux de la méfiance, de la haine, de la division et des conflits (peut-être plus meurtriers encore que ce que le monde déplore déjà) entre les communautés selon les camps dans lesquels les unes ou les autres auront appartenu aujourd’hui. Les blessures sentimentales et psychologiques que finalement causent l’instabilité et l’insécurité entretenue au Congo laissent entrevoir des grandes tragédies demain sauf à les soigner dès aujourd’hui.
Homme de la situation : Honoré Ngbanda
Le leadership actuel qui préside au destiné du pays-phare de la région (la R.D.C) ne peut hélas épargner au monde et aux Grands lacs des telles catastrophes. Parce qu’il est très faible pour se faire respecter par un partenaire aux atavismes belliqueux et hégémonistes qu’est Kigali et dont il est du reste complice dans beaucoup des crimes perpétrés sur le sol congolais. Parce qu’il est ensuite dépourvu de toute vision en rapport avec la vocation du Congo dans la sous-région, en Afrique et dans le monde. Parce qu’ enfin seul compte à ses yeux le présent et ce qu’il lui rapporte, ainsi qu’à ses complices locaux et étrangers, en terme des produits des rapines et de recel des biens volés du sol et du sous-sol congolais , et nullement le futur.
Alors, peut–être plus que les Congolais eux-mêmes, plus que les Rwandais ou les Ougandais qui doivent légitimement se soucier de leurs lendemains, c’est le monde entier qui a intérêt à voir arriver aux affaires à Kinshasa un nouveau leadership politique. Un leadership susceptible sinon de se faire aimer dans la sous-région, du moins capable de se faire respecter et de stabiliser de part sa stature et son model de gouvernance le pays-phare de la région avec effet d’entraînement dans tout l’espace régional en proie aujourd’hui aux tribulations. Il ne s’agit surement pas non plus , d’un leadership composé des hommes et des femmes politiques qui se s’étant jamais remis en question sur leur passé, se sont précipités aux côtés d’un imposteur rwandais aux commandes en RDC , pour mieux reproduire sinon amplifier les tares de la seconde République dont ils avaient déjà fait partie.
De ce point de vue le pouvoir dont la RD Congo a besoin devra se montrer non seulement compétent, fort mais aussi visionnaire et résolument engagé dans la construction des conditions maximales pour l’avènement de la paix et du développement au profit de l’Afrique de demain, celle des enfants et des petits-enfants des actuelles victimes de l’instabilité et de l’insécurité y imposée. Un leadership qui soit capable de sécréter des institutions fortes et capables de dire aux uns et aux autres avec garantie d’être suivi: C’en est assez maintenant. Il est temps de créer des nouvelles conditions de paix et de développement pour nos enfants et nos petits enfants.
Visiblement, au regard de son parcours, de son discours et de sa vision du monde imprégnée d’humanisme et des valeurs universelles dont la justice, l’équité et la solidarité internationale face aux défis communs qui se posent au genre humain, seul M. Honoré Ngbanda parait s’être préparé à relever un tel défi. L’homme est réputé coriace et ennemi numéro un du désordre et de la compromission. Même ses propres ennemis lui reconnaissent une capacité de travail et une force de caractère sans commune mesure au point d’être très exigeant avec lui-même et avec son entourage. Le fameux sobriquet de « Terminator » qu’ils lui avaient collé et dont les attributs se justifient aujourd’hui plus que jamais procéderait de ce constat. Car personne ne souhaiterait encore voir le laxisme et la compromission présider aux destinés de ce pays.
De son exil où il organise la résistance contre l’occupation de notre pays et par ricochet pour l’avènement d’une sous-region stabilisée, sécurisée et soldée du coût multiforme de la crise congolaise, le président national de l’Apareco, ni revanchard, ni xénophobe ni non plus va t’en guerre, mais foncièrement pragmatique entend (re)mettre le Congo à sa véritable place et dans son véritable rôle de locomotive, un rôle en porte à faux avec le lapsus de M. Ban-Ki Moon et au bonheur de toute la région des grands lacs. Car « Ce qu’il faut surtout pour la paix, c’est la compréhension des peuples. Les régimes, nous savons ce que c’est : des choses qui passent. Mais les peuples ne passent pas » (Général De Gaule).
Paris, le 26 octobre 2012