Congo, Étienne Tshisekedi: Le sphinx de Limete peut-il renaître ?
Congo, Étienne Tshisekedi: Le sphinx de Limete peut-il renaître ?
Nous allons aux élections pour voter qui ? Nous n’irons pas à cette présidentielle”, déclarait Etienne Tschisekedi wa Mulumba en juin 2006, à quelques semaines de la présidentielle du 30 juillet. Une volte-face qui avait surpris, voire désarconné, ses partisans, les militants de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), qui étaient gonflés à bloc, depuis Mbuji Mayi, son fief, jusqu’à Kin pour ce combat majeur.“Quel gâchis ! Il joue et, au moment de marquer le but, il s’arrête”, avait même lâché, abasourdie, la candidate mobutiste de l’époque, Catherine Nzuzi wa Mbombo. Il n’est pas jusqu’à Louis Michel, alors commissaire européen au développement, qui n’ait pratiquement supplié Tschisekedi d’aller à cette élection. Las ! 5 ans après, l’enfant terrible du Kasai occidental promet d’être sur la ligne de départ à la présidentielle de 2011. A 78 ans !
Ainsi est l’opposant qui a incarné la résistance à Mobutu et le combat pour la démocratie. Versatile, reversant ! Mais cette prochaine descente dans l’arène n’est-elle pas celle de trop ? En 2006, les conditions semblaient réunies pour qu’il fasse mouche, à tout le moins qu’il s’impose comme un interlocuteur incontournable de Joseph Kabila, le futur vainqueur.
En effet, après avoir signé l’accord de paix instaurant la transition en décembre 2003 à Pretoria, il tourna casaque et refusa l’un des postes de vice-président. Avait-il cru qu’on viendrait le chercher chez lui comme un jour de 1992, où la conférence nationale l’a bombardé Premier ministre ? Toujours est-il que ses anciens compagnons se désolidariseront de lui. Ce qui provoquera une colère noire du “Lider Maximo”, qui, en guerrier, attaquera cette transition sur le thème de “1+4 = 0”, allusion au président et ses 4 vice-présidents.
Cependant, en 2006, il aurait dû croiser le fer avec Kabila et Bemba, cette posture lui aurait réussi, car dans ce cas de figure, à défaut de s’installer au Palais de Marbre, il aurait pu occuper la primature. Son aîné d’âge, le vieil Antoine Gizonga du Parti lumumbiste (PALU), lui, n’a pas hésité à le faire, même si son passage à cette haute fonction le confinait à l’immobilisme, tant son action était quasi invisible. Malade et perclus à Bruxelles depuis quelques mois, le sphinx de Limete veut renaître de ses cendres. Le peut-il vraiment ?
En tout cas, il promet d’être présent au congrès du parti en décembre 2010, rassemblement qu’il compte organiser pour se faire adouber. Pour certains analystes pourtant, cette annonce faite le 18 août dernier depuis la capitale belge, paraît un tantinet folklorique. Dernier baroud d’honneur d’un opposant au soir de sa vie politique sans doute. Car d’abord avec le décès de Mobutu, il avait perdu un peu de son fonds de commerce. L’homme à la toque de léopard légitimait et massifiait l’UDPS, qui était par excellence la formation antimobutiste.
En lançant urbi et orbi qu’il sera candidat, l’homme avoue qu’il veillait mal, car il sait qu’il ne peut pas gagner, sauf tremblement de terre, cette élection. En même temps, c’est un signe qu’à force de personnifier le parti, la relève est inexistante. Presque octogénaire, cette icône aurait pu pousser de jeunes premiers de son parti à aller au charbon. Car à force d’imiter Wade, certains opposants historiques sortent mal de l’Histoire.
Encore que Wade, qui est un cas pathologique de bonne santé (on meurt centenaire chez les Wade), est aux affaires quand il avait 73 ans. Lui Tschisekedi cherche à étrenner la présidence, il y a un fossé. On espère qu’après cette annonce tonitruante, il sera bien inspiré de mettre en orbite un de son entourage qui, certes, n’a ni sa carrure d’athlète ni son bougon, mais qui saura défendre les couleurs de l’UPDS et surtout continuer la lutte post- Tschisekedi. Quel leader ne voudrait pas que son œuvre lui survive ?