CAMEROUN :L’incidence des résultats du Troisième recensement général de la population et de l’habitat (3ème RGPH) sur le développement des collectivités territoriales décentralisées.Le Troisième recensement général de la population et de l’habitat effectué en 2005 évalue la population du Cameroun à 17 463 836 d’habitants. Cette même population est estimée à 19 406 100 d’habitants au 1er janvier 2010. Elle est répartie à travers les 10 régions et les 360 communes que compte le pays. Cette répartition laisse apparaître un déséquilibre entre la démographie d’une région et sa superficie.
Plusieurs communes ont connu une baisse ou une
augmentation de leur population et verront ainsi leurs recettes de
péréquation diminuer ou augmenter. Dès lors, sur la base d’une analyse
minutieuse de cette évolution, le gouvernement devrait prendre des
mesures en vue d’une bonne maîtrise de la situation afin de permettre à
toutes les communes de disposer des ressources nécessaires pour assurer
un niveau de développement viable.
A cet effet, il s’avère nécessaire d’adopter d’autres critères pour la
répartition des recettes de péréquation qui se fait actuellement sur la
seule base du nombre d’habitants de la commune.
Répartition régionale de la population du Cameroun
En fonction de l’importance numérique de leur population, les régions du Cameroun peuvent être classées en trois catégories.
La première comprend les régions les plus peuplées avec plus de 2
millions d’habitants ; il s’agit du Centre (3 525 664 d’habitants), de
l’Extrême-nord (3 480 414 d’habitants), du Littoral (2 865 795
d’habitants) et du Nord (2 050 229 d’habitants) ; la deuxième comprend
les régions dont l’effectif de la population se situe entre 1 et 2
millions d’habitants ; il s’agit du Nord-ouest (1 804 695 d’habitants),
de l’Ouest (1 785 285 d’habitants), du Sud-ouest (1 384 286 d’habitants)
et de l’Adamaoua (1 015 622 d’habitants) ; la troisième comprend les
régions ayant moins d’un million d’habitants ; il s’agit de l’Est (801
968 habitants) et du Sud (692 142 habitants).
En termes de poids démographique, la population de la région du Centre
représente 18,2% de la population totale du pays, celle de
l’Extrême-nord (17,9%). Les régions du Littoral (14,8%) et du Nord
(10,6%) ont des poids démographiques supérieurs à 10% et les régions du
Nord-ouest, de l’Ouest, du Sud-ouest et de l’Adamaoua ont des poids
démographiques compris entre 9,3% et 5,2%. Les régions dont le poids
démographique est inférieur à 5% sont celles du Sud (3,6%) et de l’Est
(4,1%).
En termes d’occupation de l’espace, les densités les plus fortes sont
observées dans les régions du Littoral (141,5 habitants au km²), de
l’Ouest (128,5 habitants au km²), du Nord-Ouest (104,3 habitants au km²)
et de l’Extrême-Nord (101,6 habitants au km²). Par contre, les régions
de faibles densités sont celles de l’Est (7,4 habitants au km²), du Sud
(14,7 habitants au km²), et de l’Adamaoua (15,9 habitants au km²).
Diversité des communes suivant leur taille démographique et leur étendue
La diversité démographique des communes apparaît comme suit :
- les villes les plus peuplées : Douala (1 931 977 d’habitants), Yaoundé (1 881 876) ;
- les villes et communes de plus de 200 000 habitants. Elles sont
au nombre sept : Maroua (369 486 hab.), Bamenda (336 987 hab.), Garoua
(322 601 hab.), Bafoussam (312 939 hab.), Ngaoundéré (301 661 hab.),
Mokolo (271 000 hab.) et Mora(201 093 hab.) ;
- les villes et communes dont la population est comprise entre 100
000 et 200 000 habitants. Elles sont au nombre de vingt-neuf : Touboro
(187 465 hab.), Kumba (175 298 hab.), Lagdo (172 596 hab.), Bibemi (161
836 hab.), Rey-Bouba (141 181 hab.), Buea(138 091 hab.), Ngong(136 884
hab .), Foumban (135 149 hab.), Kumbo (133 129 hab.), Ebolowa(128 972
hab.), Mogodé (126 292 hab.), Mbouda(125 186 hab.), Dschang(124 726
hab.), Limbe(124 301 hab.), Tiko(123 958 hab.), Mbonge (121 653 hab.)
Nkongsamba (120 300 hab.), Kaélé (118 013 hab.), Makary (117 174 hab.),
Bertoua (116 310 hab.), Kousséri (113 251 hab.), Bogo (106 421 hab.),
Yagoua (102 885 hab.), Tokombéré (102 076 hab.), Kribi(101 729 hab.),
Edéa (101 203 hab.), Sangmélima(100 044 hab.) ;
- quelques communes dont la population est comprise entre 50 000 et
100 000 habitants. Elles sont au nombre de quarante-huit ;
- quelques communes dont la population est comprise entre 10 000 et 50 000 habitants. Elles sont au nombre de cent quatre ;
- quelques communes qui ont moins de 10 000 habitants. Elles sont au nombre de trente-huit ;
D’une manière générale, plus des deux tiers des communes comptent moins de 50 000 habitants.
A cette diversité démographique des communes s’ajoute une grande
variété de leur étendue. Alors que certaines communes ont moins de 5 km²
de superficie, d’autres par contre ont plusieurs centaines de km² de
superficie, notamment: Yokadouma(10 000 km²). Douala(890 km²),
Yaoundé(256 km²), Eséka(755 km²), Kumba(225 km²), Kumbo(630 km²),
Nkongsamba(130 km²) et toutes les communes de la région de l’Est. C’est
ainsi par exemple certains arrondissements sont plus étendus que la
région de l’Ouest dont la moitié est occupée par le département du Noun.
Cette situation interpelle les pouvoirs publics.
En effet, une réflexion doit être menée sur les critères permettant une
meilleure répartition des recettes de péréquation aux communes afin de
leur permettre d’assurer le développement harmonieux de leur territoire,
développement qui passe nécessairement par l’amélioration des
conditions de vie des populations notamment : l’élévation de leur niveau
de vie, l’amélioration de leur niveau d’instruction, de leur état de
santé et de leur égalité de chances.
L’intervention dans ces différents secteurs vise l’atteinte des
Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), qui est la
réduction de moitié d’ici 2015 de l’extrême pauvreté dans le monde.
Le gouvernement Camerounais, pour sa part, a réaffirmé son engagement à
atteindre cet objectif à travers le DSCE. L’atteinte de cet objectif
passe nécessairement par l’amélioration des ressources locales, pour
permettre aux collectivités territoriales décentralisées de disposer des
financements dont elles ont besoin pour la réalisation des projets
communaux et intercommunaux.
Le rôle des collectivités territoriales décentralisées pour l’atteinte des OMD
Avec la décentralisation, la responsabilité des collectivités
territoriales décentralisées dans le développement social, économique,
sanitaire, éducatif, culturel et sportif s’avère essentielle. Ces
collectivités publiques locales sont plus à même qu’une administration
centralisée de répondre aux préoccupations immédiates des populations
par une meilleure prise en compte des besoins de ces dernières et
l’amélioration de leurs conditions de vie. En effet, le recueil de leurs
avis, la confrontation des idées, permettent de dégager, pour un
problème donné, des solutions mieux acceptées par tous.
Le Président Paul BIYA prenait déjà en compte cette exigence en
déclarant : « En effet, dans un Cameroun en pleine émergence, soucieux
d’efficacité et de maîtrise, les édiles locaux ne sauraient être de
simples gestionnaires voués à une routine stérile. Ils doivent être des
promoteurs de développement, un développement sachant compter d’abord et
surtout sur ses acteurs et ses bénéficiaires, se préoccupant d’aménager
convenablement l’espace en y traçant des lots, des voies et des places,
en le débarrassant de ses ordures et de ses herbes, en le décorant
d’arbres, d’espaces verts et de fleurs, pour ne citer que ces commodités
peu onéreuses, presque naturelles, mais tant attendues dans nos villes
et villages ».
A ce titre, les défis à relever par les collectivités territoriales
décentralisées sont multiples. Ils concernent notamment : le
développement économique, la planification et le financement de la
croissance, le maintien et l’élargissement des infrastructures, la mise
en place des services et des installations de qualité, la réponse aux
besoins toujours plus grands des services sociaux et humains. Autant de
défis qui se dressent sur le vaste chantier du développement local,
lequel passe nécessairement par l’amélioration des ressources
financières et de la capacité de gestion financière et technique des
municipalités (et plus tard des régions), afin qu’elles deviennent
progressivement responsables de l’amélioration du cadre de vie des
habitants et du développement des infrastructures et des équipements
indispensables à l’accroissement de la productivité économique des
secteurs urbain et rural.
L’amélioration des ressources financières des collectivités locales
L’atteinte des OMD est étroitement liée à l’amélioration substantielle
des ressources financières allouées aux collectivités locales.
Conformément aux dispositions de l’article 2 de la loi n° 2009/019 du 15
décembre 2009 portant fiscalité locale, ces ressources comprennent
entre autres les impôts locaux qui représentent la part la plus
importante. Les impôts locaux comprennent : les impôts communaux, les
centimes additionnels communaux sur les impôts et taxes de l’Etat, les
taxes communales et tout autre type de prélèvements prévus par la loi.
De toutes ces ressources, nous nous attarderons sur les recettes
fiscales d’intercommunalité et de péréquation qui constituent l’une des
principales recettes des collectivités territoriales décentralisées. Il
s’agit d’une part, (i) d’une quote-part de 20% du produit des recettes
fiscales des collectivités territoriales ci-après énumérées : le produit
de la taxe de stationnement, le produit des centimes additionnels
communaux revenant aux communes ; le produit de la contribution des
patentes, le produit des droits de licence, le produit de la taxe sur
les propriétés immobilières, (ii) d’autre part, des produits des impôts
locaux ci-après : 70% des centimes additionnels communaux, 50% de la
quote-part de redevance forestière annuelle affectée aux communes, 100%
des droits de timbre automobile.
Les premières (recettes fiscales d’intercommunalité) sont prélevées et
affectées au FEICOM ou à tout organisme chargé de la centralisation et
de la péréquation pour le financement des projets des communes,
communautés urbaines et syndicats de communes alors que les secondes
(recettes de péréquation) sont centralisées et redistribuées à toutes
les communes et communautés urbaines. Cette redistribution se fait
suivant les critères et modalités fixés par voie règlementaire.
Les critères et modalités de répartition des recettes fiscales d’intercommunalité et de péréquation
Depuis l’année 1998, la répartition des centimes additionnels aux
communes obéit au seul critère démographique. C’est ainsi que la
détermination de la quote-part à reverser à chaque commune se fait au
prorata de sa population obtenu sur la base du recensement officiel de
la population précédant immédiatement les élections municipales. Afin de
permettre à chaque commune de disposer des ressources indispensables à
son fonctionnement normal, le décret n° 2011/1731/PM du 18 juillet 2011
fixant les modalités de centralisation, de répartition et de reversement
du produit des impôts communaux soumis à péréquation a apporté des
aménagements substantiels sur cette répartition en imposant le
prélèvement d’une retenue minimale de fonctionnement de 20% du produit
de ces impôts, à répartir équitablement entre les communes.
Il n’en demeure pas moins vrai que le chiffre de la population
conditionne grandement le montant des recettes affectées aux communes,
remettant ainsi en cause la justesse de la prise en compte de la
population comme principal critère de répartition des recettes de
péréquation aux communes. En effet, ces recettes ne reflètent pas la
réalité des moyens dont ces communes ont besoin pour leur développement.
Analyse des résultats du Troisième recensement général de la population et de l’habitat
Avant la publication des résultats du Troisième recensement général de
la population et de l’habitat, la population totale du Cameroun qui a
servi de base, depuis plus d’une décennie, à la répartition des centimes
additionnels communaux était de 13 974 525 d’habitants. Cette
population est passée à 17 463 836 en 2005, soit un accroissement de 3
489 311 d’habitants en valeur absolue et 19,98% en valeur relative.
Il ressort de l’analyse de ces résultats les observations ci-après : 237
communes soit les deux tiers ont connu une augmentation de leur
population à des proportions extrêmement variables allant de 67
habitants (commune d’Esse) à 245 878 habitants (commune de Yaoundé 4). A
contrario, 123 communes ont connu une diminution de leur population à
des proportions variant entre 199 habitants (commune d’Olanguina) et 143
093 habitants (commune de Douala 1).
Cette variation diversifiée de la population des communes s’est
répercutée sur la population des régions et des départements. En dehors
de la région du littoral qui a connu une baisse de 36 208 habitants soit
1,44% de sa population, toutes les autres régions ont connu une
augmentation de leur population à des taux variant entre 9,62% (région
de l’Ouest) et 38,29% (région du Nord). Par ailleurs, 42 départements
sur 58 soit 72,41% ont connu une augmentation de leur population à des
taux variant entre 0,24% (département du Faro) et 45,14% (département du
Fako).
A contrario, 16 autres départements ont connu une diminution de leur
population à des taux variant entre 0,32% (département du Nyong et
Kelle) et 53,80% (département du Koung-Khi). Dans dix autres
départements qui ont connu des baisses importantes de leur population,
la population de la quasi-totalité des communes de ces départements a
baissé. Il en est ainsi des départements de la Lekié, du Nyong et
Mfoumou, du Nyong et So’o, du Mungo, du Nkam, de la Sanaga maritime, de
la Momo, du Haut-Nkam, du Ndé, de la Meme.
Incidence des résultats du Troisième recensement général de la
population et de l’habitat sur le développement des collectivités
territoriales décentralisées
Il s’en déduit de l’analyse ci-dessus que la variation de la population
offre des avantages aux collectivités locales qui ont connu un
accroissement du chiffre de leur population et qui verront ainsi leurs
recettes de péréquation s’accroître. A contrario, les collectivités
locales qui ont connu une diminution du chiffre de leur population sont
défavorisées car elles verront ainsi leurs recettes de péréquation
diminuer. L’analyse des cas ci-après permet de mieux illustrer cette
situation et de mesurer son impact sur les recettes des communes et
partant, sur leur développement.
Sur la base de la répartition des centimes additionnels communaux (CAC)
centralisés par le FEICOM et reversés aux communes et aux communautés
urbaines pour le compte du 2ème trimestre de l’exercice 2010, à titre
d’exemple, la commune d’arrondissement de Yaoundé 4 a reçu 48 246 652
FCFA pour 231 472 habitants soit 208,43 FCFA par habitant. Avec une
augmentation de sa population de 245 878 habitants, cette commune
recevrait sur la même base la somme supplémentaire de 51 249 353 FCFA
pour un trimestre.
A contrario, la commune d’arrondissement de Douala 1er recevrait en
moins la somme de 29 825 457 FCFA pour un trimestre, correspondant à une
diminution de sa population de 143 093 habitants. De même, la commune
de Fongo Tongo qui connaît une baisse de sa population de 52 775
habitants recevrait en moins la somme de 48 251 465 pour un trimestre à
raison de 914,29 FCFA par habitant. La commune de Lagdo dont la
population a connu une augmentation de 82 129 habitants recevrait une
somme supplémentaire de 75 089 429 FCFA pour un trimestre, à raison de
914,29 FCFA par trimestre.
Analyses et Commentaires
Plusieurs maires et élus locaux s’élèvent contre cette baisse de la
population de leur commune qui entraîne de facto la baisse du montant
des recettes de péréquation qui leur est attribué.
En 2011, les maires de la région de l’Ouest, réunis au sein de leur
association dénommée Communes et villes unies du Cameroun (CVUC), ont
adressé au Gouvernement un mémorandum qui retrace les conséquences
néfastes de cette situation très préjudiciable aux communes concernées.
Ils remettent en cause la fiabilité des résultats du recensement et
s’insurgent contre leur validité et leur prise en compte.
En effet, des voix s’élèvent pour fustiger le peu de sérieux des
opérations de recensement qu’ils estiment avoir été bâclées. C’est ainsi
par exemple que plusieurs Camerounais reconnaissent qu’ils n’ont pas
été recensés parce que non informés du passage des agents recenseurs.
Certains par contre ont refusé de se faire recenser parce qu’ils avaient
des appréhensions sur l’utilisation, par les pouvoirs publics, des
résultats aux fins de renchérir leur situation fiscale. D’autres ont
marqué leur réticence tout simplement parce que certaines informations
sollicitées sur les fiches de recensement étaient superflues, notamment
l’appartenance ethnique.
Les faibles taux d’augmentation de la population enregistrés dans les
régions du Littoral (-1,44%), de l’ouest (9,62%) et du Nord-ouest
(14,75%) donnent l’impression qu’il y a eu une résistance au recensement
dans ces régions. Ceci contredit ceux qui tentent de justifier que les
flux migratoires peuvent en être la cause car une région comme le
Littoral devrait connaître une forte croissance de sa population car la
ville de Douala est sans conteste le point de chute par excellence des
migrations dues à l’exode rural. Or le phénomène inverse, l’exode
urbain, est très marginal.
A contrario, les plus forts taux d’augmentation de la population
enregistrés dans les régions du Nord 38,29%), de l’Adamaoua (33,14%), de
l’Extrême-nord (29,17%) et du Sud (25,96%) se justifieraient par le
fait que les élites de ces localités ont pris le soin de sensibiliser
les populations sur la nécessité de se faire recenser compte tenu de la
prise en compte par les pouvoirs publics du chiffre de la population
pour l’allocation des ressources financières et la détermination du
poids de la représentativité politique à savoir le nombre de députés et
de conseillers municipaux par circonscription électorale.
Le gouvernement devra examiner sérieusement cette situation afin de ne
pas compromettre durablement les efforts déployés par les élus locaux en
vue du développement socio-économique de ces collectivités. Ceci
permettra aussi de ne pas prêter le flanc à ceux qui pensent que les
résultats du recensement étaient connus d’avance par l’Etat qui s’en
servirait pour freiner le développement de certaines régions au profit
des autres.
A cet effet, il convient de prendre des mesures qui s’imposent pour
combler ce déséquilibre en créant par exemple au niveau du FEICOM un
fonds de compensation des pertes des recettes en faveur de ces communes.
Cette mesure salutaire permettrait aux communes concernées par la
baisse de leur population de conserver les acquis que leur a longtemps
procuré les recettes de péréquation. Cette dotation qui vise à rattraper
le gap qui se dégage de la sous-estimation (ou de la perte) du chiffre
de la population des communes consécutive au 3ème RGPH 2005 favorisera
aussi la mise en œuvre de leur plan de développement tout en évitant des
tensions sociales que pourraient provoquer les revendications légitimes
des élus locaux concernés.
Ladite dotation serait financée par un prélèvement sur le produit des
centimes additionnels communaux (CAC) centralisés par le FEICOM au
profit des communes et des communautés urbaines. Sur la base de la
répartition des CAC centralisés par le FEICOM et reversés aux communes
et aux communautés urbaines pour le compte du 2ème trimestre de
l’exercice 2010, par exemple, ce fonds de compensation serait financé à
hauteur de 733 millions de FCFA pour un trimestre. Ce montant
correspond à la diminution de 1 153 963 d’habitants pour l’ensemble des
123 communes et communautés urbaines concernées, soit 95 millions de
FCFA pour 456 783 habitants correspondant à 14 communes d’arrondissement
à raison de 208,43 FCFA par habitant, et 638 millions de FCFA pour 697
180 habitants correspondant à 109 communes à raison de 914,29 FCFA par
habitant.
Une autre curiosité ressort de l’analyse des résultats du Troisième
recensement général de la population et de l’habitat : il s’agit de la
diminution du nombre de conseillers municipaux et du nombre d’adjoints
au maire dans plusieurs communes. En effet, d’après les dispositions de
l’article 25 (1) de la loi n° 2004/018 du 22 juillet 2004 fixant les
règles applicables aux communes, le nombre de conseillers municipaux est
fixé par strate de la population ainsi qu’il suit : 25 conseillers
municipaux pour une commune de moins de 50 000 habitants ; 31
conseillers municipaux pour une population comprise entre 50 000 et 100
000 habitants, 35 conseillers municipaux pour une population comprise
entre 100 001 et 200 000 habitants, 41 conseillers municipaux pour une
population comprise entre 200 001 et 300 000 habitants, 61 conseillers
municipaux pour une population supérieure à 300 000 habitants.
Par ailleurs, d’après les dispositions de l’article 58 (4) de la même
loi, le nombre d’adjoints au maire est déterminé suivant le nombre de
conseillers municipaux ainsi qu’il suit : 2 adjoints pour les communes
disposant de 25 à 31 conseillers municipaux, 4 adjoints pour les
communes disposant de 35 à 41 conseillers municipaux, 6 adjoints pour
les communes disposant de 61 conseillers municipaux.
En application de ces dispositions légales, il s’ensuit la situation
paradoxale ci-après : dans l’ensemble, alors que la population totale
croit de 19,98%, le nombre de conseillers municipaux décroît de 6,76% en
passant de 10 626 à 9 908 soit une diminution de 718. Le nombre
d’adjoints au maire décroît aussi de 18,56% en passant de 970 à 790 soit
une diminution de 180. Le nombre de conseillers municipaux a baissé
dans 89 communes. Cette baisse des effectifs va de 4 à 30 conseillers
municipaux ; la commune de Bafoussam 1er enregistre la plus forte baisse
(30) et l’effectif de ses conseillers municipaux passe de 61 à 31. La
commune de Mokolo suit avec une baisse de 20 conseillers, son effectif
passant de 61 à 41. Cinq communes subissent une baisse de 16 conseillers
municipaux et leur effectif passe de 41 à 25 ; il s’agit de
Pete-Bandjoun, Belo, Batibo, Akonolinga et Fotokol. 49 communes
connaissent une baisse de 10 conseillers municipaux, 20 communes une
baisse de 6 et 13 communes une baisse de 4.
Dans 63 communes, la population a augmenté mais le nombre de conseillers
municipaux a baissé. Dans d’autres par contre, le nombre de conseillers
a augmenté avec la population. La commune de Bamenda 2 et celle de
Bamenda 3 ont 4 conseillers municipaux en plus alors que 11 autres
communes ont 6 conseillers municipaux en plus ; Il s’agit de Kumba 1,
Kumba 2, Mayo-Darle, Nkongsamba 1, Bafia, Logone Birni, Benakuma, Galim,
Bertoua 1, Edéa 1 et Limbe 1.
Le nombre d’adjoints au maire de la commune de Bafoussam 1er passe de 6 à
2 ; 42 autres communes connaîtront une baisse de 2 adjoints au maire.
Seules les communes de Bamenda 2 et de Bamenda 3 verront le nombre de
leurs adjoints au maire augmenter en passant de 2 à 4.
L’analyse de la composition numérique des conseils municipaux et du
nombre des adjoints au maire par commune laisse apparaître que le
législateur de 2004 avait fait un bond dans l’inconnu en modifiant
radicalement les critères de fixation de ces paramètres essentiels pour
la vitalité des communes.
Cette analyse montre que les mailles des strates de population
considérées sont très ouvertes, laissant ainsi place à de nombreuses
disparités d’une tranche à l’autre. C’est ainsi qu’en se mettant à la
borne supérieure des strates, l’on obtient les ratios suivants : 1
conseiller municipal pour 2 000, 3 226, 5 714 et 7 317 habitants ; ce
ratio était de : 1 conseiller municipal pour 1 429, 2 439, 4 444 et 7
317 en application de la règlementation antérieure.
Par ailleurs, le nombre d’adjoints au maire est fixé en fonction du
nombre de conseillers municipaux, en prenant en compte deux strates de
la population considérée : 2 adjoints au maire pour les communes de 25
et 31 conseillers municipaux soit 1 adjoint au maire pour 50 000
habitants, 4 adjoints au maire pour les communes de 35 et 41 conseillers
municipaux soit 1 adjoint au maire pour 75 000 habitants, 6 adjoints au
maire pour les communes 61 conseillers municipaux soit 1 adjoint au
maire pour 61 000 habitants. Ceci accentue davantage les disparités par
rapport à la règlementation antérieure qui prévoyait les ratios suivants
: 2 adjoints au maire pour 50 000 habitants et 3 adjoints au maire pour
100 000 habitants d’une manière générale, avec quelques cas où l’on
avait 1 adjoint au maire pour 60 000 à 75 000 habitants.
Pour apporter des améliorations à ce système, il convient de resserrer
les mailles des strates de la population dans le but d’obtenir une
représentativité équilibrée de la population au sein des conseils
municipaux. A cet effet, nous proposons une modification de l’article 25
de la loi n° 2004/018 du 22 juillet 2004 fixant les règles applicables
aux communes qui fixe le nombre de conseillers municipaux par commune
ainsi qu’il suit :
- moins de dix mille (10 000) habitants : vingt-cinq (25) conseillers ;
- de dix mille un (10 001) à vingt mille (20 000) habitants : vingt-sept (27) conseillers ;
- de vingt mille un (20 001) à trente mille (30 000) : vingt-neuf (29) conseillers ;
- de trente mille un (30 001) à quarante mille (40 000) : trente-un (31) conseillers ;
- de quarante mille un (40 001) à cinquante mille (50 000) : trente-trois (33) conseillers ;
- de cinquante mille un (50 001) à soixante mille (60 000) : trente-cinq (35) conseillers ;
- de soixante mille un (60 001) à quatre vingt mille (80 000) : trente-sept (37) conseillers ;
- de quatre vingt mille un (80 001) à cent mille (100 000) : trente-neuf (39) conseillers ;
- de cent mille un (100 001) à cent cinquante mille (150 000) : quarante-un (41) conseillers ;
- de cent cinquante mille un (150 001) à deux cent mille (200 000) : quarante-trois (43) conseillers ;
- de deux cent mille un (200 001) à deux cent cinquante mille (250 000) : quarante-cinq (45) conseillers ;
- de deux cent cinquante mille un (250 001) à trois cent mille (300 000) : quarante-sept (47) conseillers ;
- de trois cent mille un (300 001) à quatre cent mille (400 000) : cinquante-un (51) conseillers ;
- de quatre cent mille un (400 001) à cinq cent mille (500 000) : cinquante-cinq (55) conseillers ;
- plus de cinq cent mille (500 000) : soixante-un (61) conseillers.
Par ailleurs, pour préserver les acquis, un alinéa 3 devra être ajouté à
cet article ainsi qu’il suit : « Toutefois les acquis demeurent ».
Ces ajustements adoptés, l’alinéa 4 de l’article 58 de la même loi devra
être modifié en conséquence par la fixation du nombre d’adjoints au
Maire suivant une taille optimum de la population à préciser.
Conclusion
Il revient au gouvernement de prendre les décisions qui s’imposent et à
temps (avant les prochaines élections municipales et législatives) pour
mieux gérer l’incidence des résultats du Troisième recensement général
de la population et de l’habitat sur le développement des collectivités
territoriales décentralisées.
Au-delà de la dotation proposée ci-dessus qui vise à rattraper
uniquement le gap financier des communes qui ont connu une baisse de
leur population, la baisse du nombre des conseillers municipaux et,
partant, celle des adjoints au maire demeure. Dès lors, il serait
souhaitable d’apporter un amendement aux dispositions de la loi qui fixe
le nombre de conseillers municipaux en fonction de la population
obtenue sur la base du recensement officiel de la population précédant
immédiatement les élections municipales.
A cet effet, une étude détaillée permettra de mieux cerner les contours
et d’envisager le cas échéant, les mesures législatives et
règlementaires à prendre. A l’occasion et pour rester dans la légalité,
un correctif devra être apporté au cas des trois communes qui se sont vu
attribuer 45 conseillers municipaux par décret n° 2007/118 du 25 avril
2007 fixant le nombre de conseillers municipaux par commune alors que la
loi ne prévoit pas de commune avec un effectif de 45 conseillers
municipaux. Il s’agit des communes de Mbonge, Mora et Guider.
La présente réflexion permet de mesurer l’incidence des résultats du
3ème RGPH sur le nombre des conseillers municipaux par commune et
partant sur celui des adjoints au maire. Ces résultats ont également un
impact sur la répartition des recettes de péréquation qui nécessitent
par ailleurs des améliorations.
Une autre réflexion est à entreprendre pour mesurer la même incidence
sur le nombre de députés par circonscription électorale. Conformément à
la législation en vigueur, ce nombre est aussi fixé en fonction de la
population obtenue sur la base du recensement officiel de la population
précédant immédiatement les élections législatives. Pour éviter les
disparités, le découpage électoral devra prendre en compte l’allocation
d’un nombre de population minimum qui justifie l’attribution d’un siège
de député, le nombre de députés par circonscription électorale étant
fixé par tranche de la population.
*Barthélémy KOM TCHUENTE est Ingénieur Général de
Génie-Civil,Expert-consultant en décentralisation et développement
local,Conseiller municipal de la Commune de Bayangam