Comice agropastoral : Paul Biya confirme l’improvisation
Le chef de l’Etat vient de faire reporter le rendez-vous du monde paysan à janvier prochain.
«Dans l’ensemble, l’avancée des travaux est positive avec, ici et
là, des chronogrammes respectés entre 70 et 80%. Nous pouvons rassurer
les populations. Le Comice se tiendra à date.» Le vice-Premier ministre
en charge de l’Agriculture et du Développement rural, Jean Nkuété,
cheville ouvrière de l’événement, était plus que catégorique, le 10
novembre dernier dans les colonnes de Cameroon Tribune.
Son collègue
de l’Enseignement supérieur et élite de la Mvila, Jacques Fame Ndongo,
annonçait «l’un des plus beaux Comices jamais organisés dans le pays».
Et d’annoncer, grandiloquent : «Les choses se déroulent très bien et le
chef de l’Etat, nous le savons, sera très heureux d’être ici à Ebolowa.»
Toutes ces belles assurances sont tombées dans l’eau hier soir. En
effet, à l’ouverture de son journal parlé de 20 heures, la Cameroon
Radio Télévision (Crtv) a relayé un communiqué du secrétaire général de
la présidence de la République, Laurent Esso, indiquant que le Comice
agropastoral d’Ebolowa, initialement programmé du 15 au 19 courant, est
reporté à janvier 2011 pour permettre une bonne organisation de
l’événement. Il n’y eut aucun commentaire des présentateurs. C’était le
deuxième report consécutif, après le rendez-vous manqué du 9 au 14
décembre 2010.
Cet ajournement vient ainsi confirmer les alertes des
médias privés, et surtout de votre journal, qui n’a eu de cesse de
décrier «le bricolage», véritable scandale à ciel ouvert, en cours à
Ebolowa. Il vient, surtout, consacrer le désaveu du chef de l’Etat
vis-à-vis de ses proches collaborateurs et autres thuriféraires, qui en
dépit d’une improvisation patente avaient continué à lui servir des
rapports optimistes quant au respect des délais.
Courroux
Et Ebolowa de se souvenir de 1990, année
du premier rendez-vous du Comice dans le chef-lieu du Sud. Il y a 20
ans, le gouvernement avait, dans un bel ensemble, faisait miroiter un
Comice mémorable aux populations de la région. Et, de balbutiements en
tergiversations, le semblant de mobilisation avait fini en eau de boudin
et des dizaines de millions de francs – non dévalués – d’investissement
étaient partis en fumée. L’histoire va-t-elle se répéter ? Ebolowa
serait-il la malédiction du Comice agropastoral ?
Jusqu’en fin de
semaine dernière, même l’observateur non initié pouvait constater que
les travaux d’extension du réseau d’eau potable, ceux d’embellissement
ou encore les finitions des villas ministérielles, n’étaient pas au
point. De même, au Village du Comice, sis à Ngalane, des réglages
restaient à faire en terme d’aménagement, notamment des parkings. Sur
l’emplacement y réservé, l’on a signalé voici quelques jours le courroux
des riverains, qui s’estimant floués avaient manqué lyncher un
conducteur d’engin, n’eut été l’intervention des autorités
administratives qui les ont abreuvé de victuailles.
Rassurés par l’organisation, des dizaines de participants ont, dans
une certaine confusion, commencé à déferler dans la ville depuis le
week-end dernier. Les exposants venus de l’Ouest étaient les plus cités.
Le règlement du Comice précisant que la prise en charge des
participants commence 48 heures avant le début de l’événement, ceux-ci
finançaient leur séjour dans la cité. Qui va assurer la note ?
En
outre, plusieurs dispositions avaient déjà été prises par les
agriculteurs et les éleveurs pour la présentation de leur savoir-faire.
Dans certains cas, la préparation de l’exposition nécessite de longs
mois et les délais sont étudiés avec minutie. Aujourd’hui, il va de soi
que le report d’un mois créera un sérieux préjudice non seulement
financier, mais aussi en terme de qualité des produits présentés. Pire,
cet ajournement, qui plus est, ne précise aucune date ferme, créera à
n’en point douter le relâchement, le désintérêt et la démobilisation du
monde agropastoral. Qui va payer la facture de l’improvisation et du
mensonge ?
Félix C. Ebolé Bola