Cinquantenaire de la Réunification: Belinga Eboutou et Fame Ndongo forcent la main à Paul Biya
Douala, 09 avril 2013
© Souley ONOHIOLO | Le Messager
Pour avoir constaté que le chef de l’Etat Paul Biya traîne les pieds et n’a pas fixé la date de la célébration du cinquantenaire de la Réunification, le président du comité national d’organisation et celui de la commission études, conférences et débats, ont lancé les activités; mettant ainsi le président de la République devant ses responsabilités.
Question à un sou ; qui est capable de dire, dans combien de mois, semaines ou jours ; mieux qui est capable de fixer une date officielle de la tenue des festivités marquant la célébration du cinquantenaire de la Réunification ? Dans son adresse à la nation camerounaise le 31 décembre 2009, le président de la République, chef de l’Etat Paul Biya, annonce en grandes pompes, la célébration du 50ème anniversaire de l’accession du Cameroun à sa souveraineté. Tout en clamant l’importance de l’évènement, il martèle : « le cinquantenaire de l’indépendance en 2011, vient comme en prélude au cinquantenaire de la Réunification ». Et nous voici en 2013 ; si le cinquantenaire de l’indépendance a été célébré avec ses couacs, ses approximations, ses improvisations et son tissu d’amateurisme, l’on espérait qu’il n’en serait pas de même des festivités marquant la Réunification des Cameroun français et anglais. Que non. Depuis lors, on attend, on attend, on attend… la date, on ne la voit. Pour faire croire à ses compatriotes que cette célébration reste ancrée dans son agenda, Paul Biya, chaque fois que l’occasion se présente, invite à se préparer à cette fête.
Las d’attendre les éternels renvois sine die, éreintés de cette célébration rouler tel Sisyphe son rocher, le directeur du cabinet civil et président du comité national d’organisation, Martin Belinga Eboutou et le président de la « commission études, conférences et débats », Jacques Fame Ndongo, ont attrapé le taureau par les cornes ; espérant ainsi amener leur « mentor» à se décider à fixer la date de célébration de cet évènement. Les deux hommes forts du régime du Renouveau, reconnaissent que la célébration des cinquantenaires de l’Indépendance et de la Réunification est une très forte et opportune conceptualisation de son excellence Paul Biya, président de la République, que le Comité national d’organisation y afférent est chargé de mettre en œuvre cette célébration à travers les activités de plusieurs commissions spécialisées. « La Commission d’études, Conférences et débats » a hérité de l’insigne honneur d’organiser un certain nombre d’activités intellectuelles dont les trois premières sont celles-ci-après : un débat télévisé à Yaoundé sur le thème : la question du Cameroun à l’Onu ; une double conférence-débat à Foulassi sur les thèmes de l’hymne national et de la contribution des communautés religieuses dans le processus de réunification ; une conférence-débat à Foumban sur le thème : la contribution de la conférence de Foumban au processus de Réunification.
Création d’un Etat
Vendredi, 5 avril dernier, dans la salle mythique de l’Amphi 700 de Yaoundé, la conférence-débat autour de la thématique sur « la question du Cameroun à l’Onu de 1945 jusqu’en 1960» a servi de rampe de lancement. L’occasion a permis de constater que l’histoire du statut particulier du Cameroun depuis la Société des nations jusqu’à l’Organisation des nations unies est, à elle seule, tout un symbole qui a marqué non seulement comment cet Etat a évolué. Réagissant sur les sous thèmes de : « L’évolution historique de l’Etat du Cameroun », « La réunification de deux Etats : éclairage sur le cheminement juridique », « De la Sdn à l’Onu : les procédures de réunification du Cameroun », le panel composé en grande partie des enseignants d’Universités : Jacques Fame Ndongo, Louis-Paul Ngongo, Julius Ngoh, Magloire Ondoua, Nforbin Eric, Martin Belinga Eboutou, Dr. Abel Eyinga, Michael Ndobegang et Virginie Wanyaka, a retracé la marche du Cameroun vers son indépendance, son parcours exceptionnel vers son destin particulier symbolisé par son indépendance d’abord, et sa réunification ensuite.
L’on a pu constater qu’il y a une controverse autour de la Réunification du Cameroun. Elle s’est construite sur des bases malsaines, avec un parfum de mésintelligence, de fourberie et de duperie. D’un côté la France qui a vendu la chèvre de la Réunification à Ahmadou Ahidjo en gardant la corde qu’elle pouvait agiter à tout moment. Dans sa volonté de préservation et le désir de s’éterniser au pouvoir, dans son envie de rester le seul maître du jeu, le président Ahmadou Ahidjo souligne-t-on a floué tout le monde ; les Camerounais francophones et anglophones. Magloire Ondoa fait remarquer, qu’au cours du conclave de Foumban 1961, il n’y avait pas eu de traités internationaux ; par conséquent, au plan juridique et technique, il est difficile de considérer que l’opération Cameroun de 1961 était une réunification. « Elle révèle plutôt de ce qu’on appelle en droit, la création concertée d’un Etat. Par conséquent, ce n’est pas la réunification qu’on doit fêter (comme c’est le cas depuis 1961), mais plutôt la création du Cameroun actuel que le président Ahmadou Ahidjo a appelé « le Cameroun global et unique » conclut Magloire Ondoa.
Focal: Les « retrouvailles » entre Belinga Eboutou et Abel Eyinga
Il était la plus grande attraction de la conférence. Combattant de toutes les batailles chaudes pour la quête des indépendances et de la réunification du Cameroun, héros de la résistance, l’un des derniers chantres du patriotisme et du nationalisme encore en vie, légende vivante de l’histoire du Cameroun, Dr Abel Eyinga que beaucoup n’ont connu ici que sur les écrits, a fait le déplacement de l’Amphi 700 de Yaoundé. Mais cet intellectuel émérite, nanti d’un doctorat en économie (il fit partie des premiers Camerounais à décrocher ce parchemin), après avoir transpiré sang et sueur, après avoir donné toutes ses énergies et sacrifié sa vie au service de la nation, est devenu l’ombre de lui-même. Agé de presque 86 ans, il est dans un dénuement et dans une misère qui démontrent l’ingratitude et l’indifférence d’un pays qui a choisi d’écrire son histoire avec la gomme. Dr Abel Eyinga se déplace sur un fauteuil roulant qui date de Mathusalem.
Si le plus grand coup médiatique pour Jacques Fame Ndongo a été de faire intervenir le héros de résistance dans une affaire du Renouveau, cela fait penser que l’apaisement et la fin de la radicalisation des positions sont amorcés. Il devient important pour l’histoire et pour la pérennisation de l’histoire du Cameroun, que des légendes vivantes comme Abel Eyinga, soient remise en selle. C’est vrai que ce dernier est affaibli et amoché par les maladies et les énormes batailles qui l’ont épuisé, mais il a encore de la voix, le sens du discernement et de la narration. Le visuel photographique qui a illustré les émotions de Martin Belinga Eboutou, racontant comment, alors qu’il est jeune étudiant à Paris, il a rencontré le Dr Abel Eyinga au cours de ses recherches, comment ce dernier lui a prodigué des conseils et l’a invité et reçu en toute confraternité chez lui, a fait verser des larmes. Le récit apparemment banal, devient lourd de signification. Le directeur du cabinet civil a-t-il juste eu le temps de bénéficier de la générosité de son compatriote et frère de la région du Sud et n’a jamais plus cherché à le rencontrer. Profitant d’une conférence, le président du comité national d’organisation des cinquantenaires, s’est rappelé de l’existence d’Abel Eyinga. Pour montrer qu’il n’est pas piqué par le virus de l’ingratitude, l’égoïsme, l’indifférence ; pour montrer qu’il n’est pas une personne désincarnée, amnésique.
La ministre des Affaires sociales, Catherine Bakang Mbock, présente du début à la fin de la conférence, a également du pain sur la planche. A l’observation l’étalage de l’amertume, du dénuement et de l’indigence qui se dégage à la première vue de Abel Eyinga, croulant sous son handicap, toute sa fonction de membre de gouvernement est placée sur le banc des accusés. Sauf à penser que ceux qui ont déplacé Abel Eyinga, l’ont fait par pur affichage, pour montrer qu’ils sont en train d’unifier les nationalistes et upécistes de souche au régime du Renouveau ; ce qui serait un drame.
Souley ONOHIOLO
© Souley ONOHIOLO | Le Messager
Pour avoir constaté que le chef de l’Etat Paul Biya traîne les pieds et n’a pas fixé la date de la célébration du cinquantenaire de la Réunification, le président du comité national d’organisation et celui de la commission études, conférences et débats, ont lancé les activités; mettant ainsi le président de la République devant ses responsabilités.
Question à un sou ; qui est capable de dire, dans combien de mois, semaines ou jours ; mieux qui est capable de fixer une date officielle de la tenue des festivités marquant la célébration du cinquantenaire de la Réunification ? Dans son adresse à la nation camerounaise le 31 décembre 2009, le président de la République, chef de l’Etat Paul Biya, annonce en grandes pompes, la célébration du 50ème anniversaire de l’accession du Cameroun à sa souveraineté. Tout en clamant l’importance de l’évènement, il martèle : « le cinquantenaire de l’indépendance en 2011, vient comme en prélude au cinquantenaire de la Réunification ». Et nous voici en 2013 ; si le cinquantenaire de l’indépendance a été célébré avec ses couacs, ses approximations, ses improvisations et son tissu d’amateurisme, l’on espérait qu’il n’en serait pas de même des festivités marquant la Réunification des Cameroun français et anglais. Que non. Depuis lors, on attend, on attend, on attend… la date, on ne la voit. Pour faire croire à ses compatriotes que cette célébration reste ancrée dans son agenda, Paul Biya, chaque fois que l’occasion se présente, invite à se préparer à cette fête.
Las d’attendre les éternels renvois sine die, éreintés de cette célébration rouler tel Sisyphe son rocher, le directeur du cabinet civil et président du comité national d’organisation, Martin Belinga Eboutou et le président de la « commission études, conférences et débats », Jacques Fame Ndongo, ont attrapé le taureau par les cornes ; espérant ainsi amener leur « mentor» à se décider à fixer la date de célébration de cet évènement. Les deux hommes forts du régime du Renouveau, reconnaissent que la célébration des cinquantenaires de l’Indépendance et de la Réunification est une très forte et opportune conceptualisation de son excellence Paul Biya, président de la République, que le Comité national d’organisation y afférent est chargé de mettre en œuvre cette célébration à travers les activités de plusieurs commissions spécialisées. « La Commission d’études, Conférences et débats » a hérité de l’insigne honneur d’organiser un certain nombre d’activités intellectuelles dont les trois premières sont celles-ci-après : un débat télévisé à Yaoundé sur le thème : la question du Cameroun à l’Onu ; une double conférence-débat à Foulassi sur les thèmes de l’hymne national et de la contribution des communautés religieuses dans le processus de réunification ; une conférence-débat à Foumban sur le thème : la contribution de la conférence de Foumban au processus de Réunification.
Création d’un Etat
Vendredi, 5 avril dernier, dans la salle mythique de l’Amphi 700 de Yaoundé, la conférence-débat autour de la thématique sur « la question du Cameroun à l’Onu de 1945 jusqu’en 1960» a servi de rampe de lancement. L’occasion a permis de constater que l’histoire du statut particulier du Cameroun depuis la Société des nations jusqu’à l’Organisation des nations unies est, à elle seule, tout un symbole qui a marqué non seulement comment cet Etat a évolué. Réagissant sur les sous thèmes de : « L’évolution historique de l’Etat du Cameroun », « La réunification de deux Etats : éclairage sur le cheminement juridique », « De la Sdn à l’Onu : les procédures de réunification du Cameroun », le panel composé en grande partie des enseignants d’Universités : Jacques Fame Ndongo, Louis-Paul Ngongo, Julius Ngoh, Magloire Ondoua, Nforbin Eric, Martin Belinga Eboutou, Dr. Abel Eyinga, Michael Ndobegang et Virginie Wanyaka, a retracé la marche du Cameroun vers son indépendance, son parcours exceptionnel vers son destin particulier symbolisé par son indépendance d’abord, et sa réunification ensuite.
L’on a pu constater qu’il y a une controverse autour de la Réunification du Cameroun. Elle s’est construite sur des bases malsaines, avec un parfum de mésintelligence, de fourberie et de duperie. D’un côté la France qui a vendu la chèvre de la Réunification à Ahmadou Ahidjo en gardant la corde qu’elle pouvait agiter à tout moment. Dans sa volonté de préservation et le désir de s’éterniser au pouvoir, dans son envie de rester le seul maître du jeu, le président Ahmadou Ahidjo souligne-t-on a floué tout le monde ; les Camerounais francophones et anglophones. Magloire Ondoa fait remarquer, qu’au cours du conclave de Foumban 1961, il n’y avait pas eu de traités internationaux ; par conséquent, au plan juridique et technique, il est difficile de considérer que l’opération Cameroun de 1961 était une réunification. « Elle révèle plutôt de ce qu’on appelle en droit, la création concertée d’un Etat. Par conséquent, ce n’est pas la réunification qu’on doit fêter (comme c’est le cas depuis 1961), mais plutôt la création du Cameroun actuel que le président Ahmadou Ahidjo a appelé « le Cameroun global et unique » conclut Magloire Ondoa.
Focal: Les « retrouvailles » entre Belinga Eboutou et Abel Eyinga
Il était la plus grande attraction de la conférence. Combattant de toutes les batailles chaudes pour la quête des indépendances et de la réunification du Cameroun, héros de la résistance, l’un des derniers chantres du patriotisme et du nationalisme encore en vie, légende vivante de l’histoire du Cameroun, Dr Abel Eyinga que beaucoup n’ont connu ici que sur les écrits, a fait le déplacement de l’Amphi 700 de Yaoundé. Mais cet intellectuel émérite, nanti d’un doctorat en économie (il fit partie des premiers Camerounais à décrocher ce parchemin), après avoir transpiré sang et sueur, après avoir donné toutes ses énergies et sacrifié sa vie au service de la nation, est devenu l’ombre de lui-même. Agé de presque 86 ans, il est dans un dénuement et dans une misère qui démontrent l’ingratitude et l’indifférence d’un pays qui a choisi d’écrire son histoire avec la gomme. Dr Abel Eyinga se déplace sur un fauteuil roulant qui date de Mathusalem.
Si le plus grand coup médiatique pour Jacques Fame Ndongo a été de faire intervenir le héros de résistance dans une affaire du Renouveau, cela fait penser que l’apaisement et la fin de la radicalisation des positions sont amorcés. Il devient important pour l’histoire et pour la pérennisation de l’histoire du Cameroun, que des légendes vivantes comme Abel Eyinga, soient remise en selle. C’est vrai que ce dernier est affaibli et amoché par les maladies et les énormes batailles qui l’ont épuisé, mais il a encore de la voix, le sens du discernement et de la narration. Le visuel photographique qui a illustré les émotions de Martin Belinga Eboutou, racontant comment, alors qu’il est jeune étudiant à Paris, il a rencontré le Dr Abel Eyinga au cours de ses recherches, comment ce dernier lui a prodigué des conseils et l’a invité et reçu en toute confraternité chez lui, a fait verser des larmes. Le récit apparemment banal, devient lourd de signification. Le directeur du cabinet civil a-t-il juste eu le temps de bénéficier de la générosité de son compatriote et frère de la région du Sud et n’a jamais plus cherché à le rencontrer. Profitant d’une conférence, le président du comité national d’organisation des cinquantenaires, s’est rappelé de l’existence d’Abel Eyinga. Pour montrer qu’il n’est pas piqué par le virus de l’ingratitude, l’égoïsme, l’indifférence ; pour montrer qu’il n’est pas une personne désincarnée, amnésique.
La ministre des Affaires sociales, Catherine Bakang Mbock, présente du début à la fin de la conférence, a également du pain sur la planche. A l’observation l’étalage de l’amertume, du dénuement et de l’indigence qui se dégage à la première vue de Abel Eyinga, croulant sous son handicap, toute sa fonction de membre de gouvernement est placée sur le banc des accusés. Sauf à penser que ceux qui ont déplacé Abel Eyinga, l’ont fait par pur affichage, pour montrer qu’ils sont en train d’unifier les nationalistes et upécistes de souche au régime du Renouveau ; ce qui serait un drame.
Souley ONOHIOLO