Chantier naval : Les temporaires emportent Antoine Bikoro Alo'o
Le président de la République a désigné hier, 30 aout, le Coréen Moon
Kwi-ho au poste de directeur général délégué de cette entreprise.
C'était
finalement la dernière apparition publique de celui qui, pendant deux
ans, n'aura été que directeur général par intérim du Chantier naval et
industriel du Cameroun (Cnic). Jeudi 26 aout dernier, Antoine Bikoro
Alo'o est apparu, au dessus d'une marée de jeunes réunis à la
l'inspection du Travail du Wouri, où se déroulait le paiement de leurs
droits de départ de cette entreprise spécialisée dans la réparation des
navires. Faisant usage d'un mégaphone, celui qui avait été porté en
triomphe le 07 mai 2008, avait du mal à contenir la colère de ces jeunes
qui avaient été engagés au Cnic quelques mois avant son arrivée. Sur
les 1458 dossiers examinés par le comité ad-hoc chargé d'assainir le
climat social au sein de cette société d'Etat, seulement ceux de 292
temporaires avaient été déclarés éligibles, ainsi que 48 autres des
travailleurs de l'ex-Union des industries du Cameroun (Uic). Plus de 270
millions de francs Cfa avaient été mobilisés pour cette opération.
Le
président de la République a donc coupé court à la vague de
contestations qui sont nées, trois mois seulement après que l'ancien
maire de Kye-Ossi dans la vallée du Ntem ne se soit installé, en
nommant le Coréen Moon Kwi-ho, représentant de la société coréenne
Marien Technology and information Co, partenaire technique du Cnic, pour
une durée d'un an éventuellement renouvelable. Selon nos sources
d'information, c'est le ministre d'Etat en charge des Transports,
Maigari Bello Bouba, qui a proposé le 02 aout dernier au Premier
ministre le nom nouveau patron du Cnic. Il était question, précisent
nos sources, dans la proposition de Bello Bouba de la nomination d'un
directeur général par intérim, mais l'on se retrouve plutôt en face d'un
directeur général délégué.
Accueilli en véritable héros après la
destitution de l'ancien directeur général, Zacchaeus Forjindam,
interpellé par la police quelques instants seulement après son
limogeage, puis conduit à la prison centrale de Douala où il attend,
jusqu'aujourd'hui, de connaitre son sort devant le Tribunal de grande
instance de Douala, Antoine Bikoro Alo'o n'aura pas eu le sommeil
tranquille.
Revendications
Trois mois seulement après
son arrivée, les temporaires du Cnic que le nouveau arrivant avait
décidé de ne pas recruter l'ont séquestré dans ses bureaux. Il ne sera
libéré que grâce à l'intervention du sous préfet de Douala Ier au moment
des faits, Pascal Mbozo'o. Les mouvements d'humeur de ces jeunes, qui
avaient pourtant été recrutés dans différents établissements techniques
du Cameroun, après un test de sélection largement médiatisé, ne vont
plus cesser.
Dans cette ambiance, les collaborateurs internes du
directeur général par intérim étaient presque sous pression. Les
entreprises sous-traitantes déstabilisées, parce que trainant des
factures non payées. Le chef de service de la chaudronnerie, de la
tuyauterie et de la soudure, le chef de la section chaudronnerie, le
responsable de la logistique sur le chantier de Limbé, le chef de la
section traitement des surfaces, le responsable de la grue flottante du
Cnic… sont ainsi rangés dans un placard.
Ulcéré par des actes de
gestion qui ne peuvent aboutir qu'à «un désastre annoncé», selon ses
propres termes, Ali Dembri, Canadien de nationalité et assistant
technique de la Banque africaine de développement (Bad) qui travaille
depuis le début sur le projet et le chantier du Yard pétrolier de Limbé,
avait fini par rendre sa démission en dénonçant le «climat délétère et
les brimades administratives à la limite de la xénophobie» (Cf
Mutations du 21 aout 2008). Après eux, des employés de l'Union Union
des industries du Cameroun (Uic), dénonçant le climat de travail, ont
demandé le départ pur et simple de la société qui venait ainsi d'être
fusionnée par le Cnic. Les revendications des employés d'Uic, 105
employés permanents et 80 temporaires, étaient axées sur le silence qui
leur est réservé par la direction générale du Cnic, suite à leurs
demandes de départs volontaires.
Ce ne sont pourtant pas les seules
affaires où Antoine Bikoro Alo'o aura été cité au cours de son passage à
la tête du Cnic. Son nom est également revenu aux côtés de ceux du Dg
du Port autonome de Douala (Pad), Dayas Mounoumé, et de l'expert
financier Francis Dooh Colins dans l'affaire qui avait coûté la vie au
journaliste Bibi Ngota et où des commissions auraient été versées à ces
trois personnalités dans le cadre de l'acquisition par la Société
nationale des hydrocarbures (Snh) d'un bateau-hôtel baptisé « Rio del
Rey ».
Lazare Kolyang