Ils circulent à vive allure et en toute impunité, ces véhicules bannis de la circulation en Europe et en Asie mais utilisés sans visites techniques appropriés comme taxis ou véhicules à usage personnel au Cameroun. Douala est leur fief. Idem pour les capitales régionales et même dans l'arrière pays. État des lieux d'un système de transport controversé. Le visiteur qui débarque dans les grandes villes camerounaises est tout de suite happé par un phénomène singulier : la prolifération de vieux véhicules.
Dans la capitale économique du Cameroun, ils sont
de plus en plus nombreux ces véhicules dépassant parfois leurs
conducteurs et leurs usagers en âge. Quand ce ne sont pas les routes qui
sont à l’image de la ville elle-même, ce sont les véhicules occupés par
les usagers qui en sont la marque caractéristique.
Vous n’avez pas besoin d’avoir un œil d’observateur averti pour remarquer ces cercueils roulants.
Pas étonnant que le délégué régional des
Transports pour le Littoral, Hamidou Maïdoki, ait constaté, lors de sa
visite inopinée, le 18 juin 2010 dans les compagnies de transport
interurbain, que le parc souffrait des mêmes maladies : vieillesse
généralisée, pneus usés, défaut de visite technique, de boîte à
pharmacie, surcharge, etc.
Le parc automobile réservé au transport urbain en Cameroun grouille de
ces véhicules pourris, usés jusqu’aux pneus, mais toujours autorisés à
circuler par on ne sait qui. Ce qui est surprenant, ce sont les usagers
camerounais qui, à leur risque et péril empruntent ces voitures, faute
de mieux, disent-ils.
Mais ce n'est pas tant le nombre de ces véhicules qui impressionne. Ce n'est pas non plus la nuée des carcasses de véhicules abandonnés quelquefois en bordure des routes qui gène dit on là bas.
A Douala, la capitale économique, la situation est plus dramatique. La quasi-totalité des véhicules réservés pour le transport en commun ne rassurent pas du tout les usagers de la route qui sont pourtant obligés de s’y engouffrer tous les jours souvent après d’intenses luttes. La police est bien renseignée de ces manquements mais, préfère recevoir des propriétaires de ces véhicules des sommes exorbitantes pour en contrepartie laisser circuler ces tombeaux roulant.
Pour la plupart de seconde troisième ou quatrième
main et donc vieux, sont mal entretenus : leurs conducteurs, plus
intéressés par les recettes que par l'état de leur véhicule, en viennent
à oublier les nécessaires réglages. En conséquence de quoi leurs
véhicules produisent une redoutable fumée dont l'échappement est
responsable de multiples maux : Irritation des yeux, toux, sensation
d'étouffement, asthme...
Des études récentes effectuées par les ONG locales montrent un
accroissement des cas d’accident de circulation et de pneumonie dans
cette métropole. Selon certains spécialistes, ces véhicules sont tous
bannis de la circulation en Europe et le benzène contenu dans l'essence
aurait des effets cancérigènes.
Malheureusement, les ravages ne s'arrêtent pas là. En réalité, certains
véhicules sont de véritables carcasses mortifères. Il ne se passe pas de
jour sans qu'ils ne provoquent des accidents ou dans certains cas, ne
conduisent des passagers malchanceux de vie à trépas. C’est ici que nous
avons vu des mini bus dits « clandos » dont en marge de toute de toute
réglementation, à la carrosserie tenant plus par des câbles électriques
ou des fils de fer et dont l’échappement crache une fumée noire..
Devant une telle situation, quelles solutions faudrait-il adopter ? Pendant les heures creuses, Certains usagers de la route, surtout les plus ingénieux portent des masques, sortes de morceaux d'étoffe qui leur recouvrent le nez et la bouche.
Il nous semble que pour réduire la pollution par le gaz d'échappement dans les villes camerounaise, des mesures courageuses doivent être prises : Surtaxer les véhicules les plus âgés de seconde main importés afin de privilégier l’entrée sur le territoire des véhicules les moins âgés.
Jusqu’ici c’est plutôt le contraire qui est en
pratique dans ce pays de l’Afrique centrale. Il serait aussi nécessaire
de faire assurer ceux qui sont en circulation et leur faire subir une
visite technique en bonne et due forme, conditions sans lesquelles
aucune autorisation de circuler ne devrait être délivrée …
Le Cameroun refuse de revoir l’âge maximum des véhicules importés sur
son territoire. Interpellé à plusieurs reprises, il ya de cela quelques
semaines par nos soins, le ministre en charge du Transport camerounais
n'a pas osé nous répondre. Une manière de dire que le Cameroun sera et
continuera d'être la poubelle des vieilles voitures bricolées et
rafistolées
Que dire de la visite technique au Cameroun ?
Pour passer au contrôle technique de son véhicule, les prix homologués par le ministère des Transports prévoient 9.540 francs Cfa pour les voitures dits "personnels" et 4.800 francs Cfa pour les taxis et autres voitures utilitaires. Curieusement selon certains témoignages, tous payent 9.500 frs Cfa
"La visite technique c'est pour les voitures neuves, pas pour les vieux véhicules comme ma Starlet", lance Epèsse, taximan à Douala.
Selon quelques agents des centres de contrôles techniques qui ont requis l'anonymat, les pistes de contrôles sont à mesure d'accueillir plus de 300 véhicules par jour. Mais curieusement, ils ne reçoivent que moins d'une centaine par jour,
Les pistes des centres d'Hydrocarbures analyses contrôles (Hydrac) et World Cameroon Industries (Wci) n'accueillent en effet quelques rares fois que des véhicules à usage personnel. Pas l'ombre d'un taxi, pourtant , tous ces derniers disposent d'un certificat de visite technique à jour. Comment ont-ils procédé pour entrer en possession de ce document ? Epèssè le taximan affirme qu'avec 2500 frs Cfa payés auprès des fonctionnaires véreux du ministère des transport, on peut s’offrir ce document. Par ailleurs, notre informateur affirme que ce réseau de faussaire est constitué de policiers, fonctionnaire du ministère des transports et des agents des centres de contrôles techniques. Ces derniers ont fait de la délivrance des vignettes de visite technique un fond de commerce, ce,en toute impunité
L'article 6 de la loi n°96/07 du 08 Avril 1997 portant organisation du patrimoine routier, est bien claire sur la procédure des visites techniques. Elle stipule bien qu'"au cours des visites techniques, sont vérifiés l'état, le fonctionnement et la conformité aux dispositions du Code de la Route, des différents organes des véhicules. Notamment : l'état de châssis et éléments de châssis. L'état de suspension essieu, la direction, le freinage, la transmission, l'éclairage et la signalisation. Les roues et les pneus, la carrosserie, l'équipement et tous autres contrôles jugés nécessaires au bon fonctionnement du véhicule".
Selon Nkonkep J. agent d'une agence de voyage à Yaoundé dont nous taisons le nom, la visite technique, malgré tout, est restée administrative puisque des agents du ministère des Transports délivrent toujours des certificats de visite technique sur la base des déclarations des usagers alors que le contrôle technique des véhicules est obligatoire, conformément à l'arrêté du 23 février 1998
Et les surcharges ?
Au Cameroun, l’usage veut souvent que les taximen, pour gagner davantage, remplissent trop leurs véhicules de passagers. C’est ainsi qu'il n’est pas rare de se retrouver assis à quatre derrière, et à deux à l’avant, à côté du chauffeur. Cela, malgré la présence des policiers assurant le contrôle des véhicules
La pratique est tellement entrée dans les mœurs que même certains Camerounais la défendent. « Je les comprends ! Ils doivent souvent payer les policiers pour passer les postes de contrôle », explique Beyene, taxiwoman à Yaoundé
« Même lorsqu’on est enceinte, les chauffeurs nous installent à quatre derrière et deux devant», raconte cette mère de famille qui vit à Kumba dans la région du Sud Ouest.
Selon M.K.B fonctionnaire au ministère des transports à Bafoussam, «Il est prévu deux passagers à l'avant et trois autres à l'arrière des voitures cinq places, y compris le conducteur ; pour les voitures neuf places, il est prévus deux passagers à l'avant, trois à la rangée suivant la cabine du chauffeur et trois autres à l'arrière mais, aucun conducteur de véhicule ne respecte cette pratique.» Notre interlocuteur demeure néanmoins muet sur les mesures coercitives envers les chauffeurs de véhicules qui ne respectent pas la réglementation en vigueur.
Que faire dans un pays où le citoyen est abandonné à lui même ? Une manière de dire que sur nos routes, les coûts de transport sont variants de même que les chances de sortir idem après un accident. Et comme un cercueil, nos véhicules tentent continuellement de nous conduire vers notre dernière demeure.