Cameroun/Elections législatives et municipales: " moi Abba Aboubakar, je n'y prendrai pas part"
Analysant le décret présidentiel du 26 juin 2013 qui prorogeait le mandat des conseillers municipaux à nouveau pour trois mois,à compter du 1er août 2013, Abba Aboubakar, leader d´opinion bien connu, annonce qu´il ne prendra pas part aux élections couplées législatives-communales du 30 septembre prochain "pour des raisons et bien d autres contenues dans ce document.
ABBA ABOUBAKAR Yaoundé, le 1er juillet 2013
Leader d’opinion ________
BP 11398 Yaoundé
Prorogation du mandat des Conseillers
Municipaux, mon opinion personnelle.
Référence : Décret n°2013/195 du 26 juin 2013
Portant prorogation du mandat des
Conseillers municipaux.
Par décret sus référencé, le mandat des
Conseillers municipaux a été à nouveau prorogé pour trois (03) mois, à
compter du 1er août 2013.
De mon point de vue, cet acte est partiellement salutaire et nécessite
une grille de lecture à géométrie variable entre une prorogation à long
terme et une prorogation à court terme à la quelle je m’en voudrai
d’assortir quelques observations non moins objectives.
Sur la Prorogation à court terme :
Au sens de l’article premier du décret susvisé, il est clairement
mentionné je cite : le mandat des Conseillers municipaux, élus lors du
scrutin du 22 juillet 2007, précédemment prorogé de douze (12) mois par
décret n°2012/240 du 30 mai 2012 est prorogé pour une durée
supplémentaire de trois (03) mois, à compter du 1er août 2013, sauf
tenue durant cette période d’élections municipales dans les conditions
prescrites par la loi n°2012/001 du 19 avril 2012 portant Code électoral
stop
Optant pour le rapprochement stratégique du délai,
le Président de la République, cumulativement Président d’un parti
politique le RDPC, décida par la loi n°2013/005 du 08 mai 2013, à la
troisième prorogation du mandat des députés à l’Assemblée Nationale.
Comme évoquer par plusieurs organes de média et divers analystes
politiques camerounais, la probabilité de la tenue des élections
couplées législatives et municipales dans la première quinzaine du mois
d’octobre prochain est de mise ce d’autant, la conclusion de l’article
1er du décret de deuxième prorogation du mandat des Conseillers
municipaux y relève explicitement : « sauf tenue durant cette période
d’élections municipales dans les conditions prescrites par la loi
n°2012/001 du 19 avril 2012 portant Code électoral. » C’est clair…
Dans cette perspective, solliciter d’être candidat titulaire au poste de député dans une des circonscriptions électorales par les nouveaux dirigeants du parti RCPU dont moi-même j’ai dirigé pendant 20 ans, je n’y prendrai nullement pas part au cas où ces élections sont organisées en 2013.
Raisons personnelles et fondamentales.
- 1- En tant qu’acteur politique, pour avoir dénoncé le laxisme et la
violation des lois au sommet de l’Etat concernant les députés décédés
sans remplacement conformément à la loi, et en voulant manifester à
travers un mouvement populaire de revendications, je fus arrêter en
février 2011 et gardé à vue pendant près d’un mois, le procès y afférent
est en cours à la chambre criminelle du tribunal de grande instance du
Mfoundi, poursuivi selon l’accusation, comme le cerveau de tentative
d’insurrection en coaction ;
- 2- Le 27 mai 2013, à la suite d’une de mes correspondances adressée à Monsieur le Premier ministre Chef du Gouvernement, relevant les imperfections de gouvernance et voulant manifester une fois de plus pour des revendications, je fus à nouveau arrêter puis traduit au tribunal de première instance de Yaoundé centre administratif le lendemain 28 mai, pour être inculpé d’organisation de manifestation non déclarée sur le lieu public, précisément devant l’immeuble abritant les services du Premier ministre. (Pourtant elle est déclarée) ! je suis libéré sous caution avec mes co-accusés, la seconde audience y relative aura lieu le 29 juillet prochain ;
- 3- La confiscation abusive de mes biens matériels à l’issue de ces arrestations etc.
Toute chose, qui m’empêche actuellement de mouvoir librement sur la
scène politique sous réserve des décisions de justice devant intervenir
ultérieurement à mon endroit, (l’honnêteté morale oblige). C’est aussi
la raison de ma démission à la tête du parti que je dirigeais pour
obstruction de voie de la démocratie par l’administration publique.
Raisons administratives et ses corollaires.
Sur ce volet, je maintiens l’intégralité du contenu de ma correspondance
adressée en date du 05 juin dernier au Premier ministre Chef du
Gouvernement, visant les points suivants :
- La mise en place du Sénat cette année 2013, a totalement changé la donne politique avec effet immédiat sur les élections législatives et municipales prorogées probablement de 2012 à 2013 pour cette cause ;
- La distribution de plus de cinq (05) millions des cartes électorales mal organisée en ce moment, est un sérieux handicap pour le bon déroulement du double scrutin dans un bref délai soit d’ici 3 ou 4 mois, car inscrire 5,4 millions d’électeurs selon sa durée est une chose, distribuer les 5,4 millions des cartes électorales aux inscrits, en est une autre dans la durée ;
- Au terme des prescriptions du Code électoral unilatéral par les députés du parti RDPC par rapport aux cautions électorales, la majorité des camerounais du moins ceux de l’opposition, éprouveront du dépit pour candidater à l’une ou l’autre élection en raison du montant élevé des cautions, sauf pour les militants du RDPC parti du Président de la République. Bien qu’à terme, l’objectif recherché par l’élévation de ces cautions électorales est la limitation des partis politiques aventuriers dans la course, cette mesure non concertée pour le moment, suscitera indubitablement des mécontentements sociaux des indigents face à l’autoritarisme gouvernant ;
- L’application en 2013 de la nouvelle méthodologie financière, dit budget programme et parallèlement, la récente crise financière européenne, ayant affecté le cours de diverses matières sur le marché mondial, le Cameroun comme d’autres pays du monde, subit en ce moment les impacts négatifs de cette crise difficilement tempérée par rapport au système de gouvernance. Ainsi, le lancement des grands chantiers d’investissements publics à la charge de l’Etat mal programmé, induisent des effets réducteurs de notre économie, cela corrobore la crise financière progressive dans nos trésoreries nationales, méthode devant être accentuée avant la fin de l’année 2013. D’autre part, il est évident, des faux billets d’argent toutes coupures confondues, sont en cours d’introduction dans les circuits des trésoreries publiques par certaines personnes malveillantes dans le but de blanchissement d’argent, entretenant une tension de trésorerie. Ces malveillants, entendent profiter à travers les actions de campagne électorale prochaine, pour stipendier nos caisses publiques et se faire fortune illicitement ;
- L’organisation probable ou non en octobre 2013 des festivités du cinquantenaire de la réunification, est un facteur non négligeable des grosses dépenses nationales ;
- Le risque perceptible des troubles sociaux à travers le phénomène de pauvreté ambiante n’est pas à minimiser ni à exclure.
Tout compte fait, la conséquence de la tenue des élections législatives
et municipales à court terme dans les conditions susvisées, ne sera que
cafouillage produisant sans nul doute l’instabilité au Cameroun. Cela
implique bien entendu, la crédibilité organisationnelle de ces élections
or, en tant que l’un des acteurs de ce processus, me voici plutôt
poursuivi en justice pour mes actes politiques. L’on peut m’estimer
minable, mais c’est à tort pour la démocratie.
S’agissant de la prorogation à long terme :
Au regard de la situation sociopolitique de l’heure au Cameroun, marquée
par la mise en place des institutions constitutionnalisées et le risque
de récession économique, l’option de la prorogation à long terme des
élections législatives et municipales est beaucoup plus salutaire afin
de permettre la mise en place rapide du Conseil constitutionnel derrière
le Sénat sous réserve des autres institutions notamment, la Haute cour
de justice et les Conseils régionaux devant être mise en place
ultérieurement.
A présent, la voie de prorogation intermittente
des mandats par le Président de la République, semble réduite. Mais,
d’autres voies constitutionnelles peuvent être mises à contribution à
travers les dispositions des articles 8 (12) et 34 (5) de la
Constitution. Théoriquement, elles imposent la réorganisation de l’ordre
gouvernant à savoir, la dissolution de l’Assemblée nationale ou la
démission du Gouvernement.
Relevant de la compétence constitutionnelle du Président de la République,
- L’article 8 (12) dit : Le Président de la République peut, en cas de
nécessité et après consultation du Gouvernement, des bureaux de
l’Assemblée Nationale et du Sénat, prononcer la dissolution de
l’Assemblée Nationale. L’élection d’une nouvelle Assemblée a lieu
conformément aux dispositions de l’article 15 alinéa 4
ci-dessous.
- L’article 34 (5) : Lorsque l’Assemblée Nationale adopte une motion de censure ou refuse la confiance du Gouvernement, le Premier ministre doit remettre au Président de la République la démission du Gouvernement.
(6) Le Président peut reconduire le
Premier ministre dans ses fonctions et lui demander de former un
nouveau Gouvernement.
Techniquement, à l’état actuel de la situation, seule la voie d’adoption
d’une motion de censure par l’Assemblée Nationale contre le
Gouvernement, peut inverser l’ordre institutionnel gouvernant et
maintenir l’Assemblée Nationale en sursis pour une longue période sous
réserve des nouvelles élections devant être conclues à date par le
Président de la République et le nouveau Gouvernement.
Ainsi, au sens de l’article 34 alinéas 3 et 5 de la Constitution, il revient à l’Assemblée Nationale, de mettre en cause la responsabilité du Gouvernement même à postériori par rapport au programme économique et social du Gouvernement présenté lors de la session de présentation du projet de loi de finance 2013, qui aurait abouti aux multiples prorogations de mandat des députés sans y prévoir ces prorogations et la carence financière. Bien qu’ils aient antérieurement voté les lois y relatives, dès que le quorum des signataires est atteint, le vote de motion de censure sera incontestablement exécuté et le Gouvernement démis.
Eu égard à la morbidité des acteurs politiques camerounais aux initiatives stratégiques, l’hypothèse qui précède ne sera jamais mise en œuvre, à moins que ce ne soit encore dans le cadre d’un autre projet de loi de prorogation du mandat des députés. Ou alors, le Président de la République, peut volontairement décider de la prorogation à nouveau du mandat des députés sans incidence éventuelle sur les dispositions de l’article 15 (4) de la Constitution et maintenir le même Gouvernement comme par le passé face à une opposition moribonde et désarçonnée. Mais, moi Abba Aboubakar, je ne laisserai plus cela se faire sans conséquence d’équité.
D’autre part, si l’article 8 (12) de la Constitution était appliqué, celui-ci impliquerait ipso facto la tenue des nouvelles élections législatives dans les cent vingt (120) jours qui précéderont la dissolution de l’Assemblée Nationale, idem de la convocation du corps électoral en vue des élections législatives et probablement des municipales attendue dans les tout prochains jours.
En tout état de cause, l’option d’une solution idoine pour les camerounais soit, la convocation dans quelques jours du corps électoral en vue du double scrutin législatives et municipales en début octobre 2013 avec ses lots de conséquences, soit la prorogation à long terme en vue des meilleures organisations des parties prenantes, c’est le Cameroun qui gagnera pour sa cohésion sociale dans le dernier cas, où qui subira par des troubles sociaux pour le premier cas.
En effet, le contexte planétaire des droits de
l’homme, de la démocratie et de la gouvernance, évolue de jour en jour,
ce à quoi, la dictature et l’intransigeance des gouvernants par le
mépris de leurs contradicteurs, débouchent toujours sur des actions
désastreuses. J’en veux de citer à titre d’exemple, quelques cas des
pays qui ont connu et qui connaissent encore pour certains, des épreuves
difficiles par rapport aux divergences idéologiques entre les élites
politiques concourant au développement démocratique.
Je commence par la Guinée Conakry, dont les dernières élections
législatives remontent à juin 2002, bien qu’ayant entre temps organisé
l’élection présidentielle, elle se trouve encore sur le terrain du
dialogue en vue d’un consensus commun visant l’organisation des
élections législatives, butant ainsi d’une date à l’autre aux fins des
meilleurs accords ;
Le Zimbabwe dont le Président de la République, qui était réputé intransigeant vis-à-vis de son opposition à certaine époque par rapport aux conditions électorales, semble opté maintenant pour la voie de conciliation avec cette même opposition en la modération des dispositions règlementaires et d’approche consensuelle sur le calendrier électoral ;
En ce qui concerne le système de gouvernance antipathique, je citerai le cas de la Tunisie, qui organisa les élections législatives et présidentielles le 25 octobre 2009 sous l’air de l’ancien Président déchu Zine El Abidine Ben Ali dont son parti le RCD ‘’Rassemblement Constitutionnel Démocratique’’ avait obtenu la majorité écrasante soit 161 députés contre 53 pour l’opposition sur les 214 que comptait le parlement et, en janvier 2011, Ben Ali tomba. En ce moment, la Tunisie est organisée par une Assemblée Nationale Constituante qui légifère. Cependant, les différents acteurs, fixent date après date de la tenue des nouvelles élections législatives jusqu’à lors ;
L’Egypte, après la chute de l’ancien Président Hosni Moubarak en février 2011, organisa les élections législatives selon son système calendaire en novembre, décembre 2011 et en janvier 2012. Mais en ce moment, les impondérables initiaux mal négociés ont suscité des divergences et remettent sur la place publique des revendications du bon sens ;
Les Etats, à travers leurs dirigeants, ayant la volonté démocratique avérée et prônant le dialogue, la liberté des manifestations de l’opposition, de la société civile et des autres acteurs sociaux, qu’ils soient voisins au Cameroun ou ailleurs en Afrique, ne sont pas moins paisibles, moins appréciés ni en guerre, encore plus en difficultés que le Cameroun ?
En conclusion, pour moi, dans le but d’éviter la
mauvaise organisation des élections législatives et municipales en 2013,
il est nécessaire de reporter les deux (02) élections pour l’année 2014
et ouvrir la porte du dialogue entre pouvoirs publics et forces vives
de la nation.
Telle se veut, ma modeste contribution aux débats sur la prorogation
itérative du mandat des députés à l’Assemblée Nationale et des
conseillers municipaux au Cameroun.