Cameroun: Se débrouiller ou ne pas aller à l’école
Cameroun: Se débrouiller ou ne pas aller à l’école
Beaucoup d’élèves se livrent au petit commerce ou s’adonnent aux travaux de manœuvres pour pouvoir préparer la rentrée scolaire.
En cette veille de rentrée scolaire pour le compte de l’année 2010 /
2011, les marchés et grandes artères de la capitale camerounaise
grouillent d’élèves. Et pour cause : «Je cherche l’argent pour ma payer
ma scolarité qui s’élèvent à plus de 50 000 Fcfa. En plus, je dois payer
mes cahiers», réagit Lionel Fondja, rencontré ce mardi au Carrefour
Obili.
Elève en classe de 5ème au collège privé laïc de la Réussite de Douala,
l’adolescent de 14 ans traine un seau dans lequel des morceaux de viande
de poulet sont entreposés. Ce qui ne constitue pas pour lui une gêne,
puisque, «C’est moi –même qui ai choisi, pour aider mes parents et mon
frère», confie-t-il. Cette activité, il la mène depuis trois années,
uniquement pendant les vacances. Quant au bénéfice, «Je cotise 10 000
Fcfa chaque semaine», avoue le jeune homme le visage noirci par le
soleil et les lèvres sèches.
La journée de Lionel Fondja commence le matin à 6 heures, comme celle d’Arnold Tsafack, venu de Fongo-Tongo (son village natal), pour s’adonner à la vente des arachides préparées. Plateau à la tête, celui qui intégrera la 3ème année menuiserie dès la rentrée prochaine clame la pauvreté de ses parents qui sont «au village». Avant de rentrer chaque soir dans la demeure de sa sœur aînée (au quartier Etoug-Ebé), le vendeur ambulant qu’il est, passe acheter au marché «Acacias», un seau de 10 litres d’arachides non préparées. Un réveil réglé le fait sauter du lit à 5 heures du matin. Il lui faut une heure pour préparer sa marchandise et la charger dans le plateau. Dès 6 heures, il est au carrefour Biyem Assi «pour attendre les passagers qui descendent des voitures au niveau des agences». Après 9 heures, c’est au campus de l’université de Yaoundé 1 qu’il se rend. Son activité lui donne 35 000 F cfa par mois, ce qui est «insuffisant pour payer mes cahiers», ajoute-t-il.
Ces débrouillards d’un temps ne sont pas toujours ambulants. D’autres ont choisi d’être statiques. On les retrouve au marché Mokolo, derrière des comptoirs de vivres frais. Parfois, leurs parents leur confient des « call box », en bordure de chaussée. C’est le cas de Marie Claire Anakan, élève en Form 3, au Government secondary school d’Oshie (région du Nord-ouest). Elle gère depuis le mois de juillet, le call box de sa maman, situé au carrefour Obili.
Anglophone d’expression, il arrive à la fillette
de 15 ans de se faire extorquer. Une chose que ne tolère pas sa mère.
Raison étant que c’est l’unique source de revenu pour envoyer sa
progéniture à l’école. Mais Marie Claire ne risque pas que de perdre de
l’argent, elle n’est pas à l’abri d’un accident de la circulation. Elle
est installée à moins d’un mètre de la chaussée. Elle affirme d’ailleurs
qu’un accident de moto a failli l’y emporté il y a une semaine.
En dressant les chiens pour gagner de l’argent, le jeune Johnson Keudem
(17 ans) s’est fait mordre pas un berger allemand, il y a un mois.
Depuis lors, il est habité d’une rage qui pousse sa famille à le garder
enchainé. Rodrigue Tsobeng (19 ans), élève au lycée technique de
Dschang, a quant à lui perdu deux doigts l’année dernière à Abong-Bang
dans une scierie. Il semble bien que le chemin de l’école passe par là.